Depuis le lancement de sa première génération en 2018, la famille de processeurs Graviton est devenue un pilier de l'offre de calcul d'AWS. Au cours des trois dernières années, Amazon affirme que plus de la moitié de la nouvelle capacité de calcul ajoutée à son infrastructure était basée sur ces puces.
Cette tendance de fond illustre la volonté des géants du cloud de maîtriser leur matériel de bout en bout pour optimiser les coûts et les performances tout en s'affranchissant progressivement des architectures x86 traditionnelles pour de nombreux usages.
Une architecture repensée pour la performance brute
Le nouveau composant Graviton5 marque un saut technique significatif en intégrant 192 cœurs Arm Neoverse V3 sur une seule puce. Alors que la génération précédente, le Graviton4, reposait sur une configuration à deux puces de 96 cœurs chacune, ce nouveau design monosocket change la donne.
Une évolution qui semble mineure mais qui est en réalité fondamentale. En effet, lier deux processeurs distincts introduit inévitablement des chemins de latence supplémentaires lorsque les cœurs doivent communiquer entre eux.
Avec Graviton5, AWS a consolidé cette architecture, ce qui met fin à ces goulots d'étranglement. Le résultat est une latence inter-cœurs réduite de 33%, un avantage crucial pour des applications comme les bases de données haute performance, les serveurs de jeux en temps réel ou l'analyse de données massives.
Cette densité est soutenue par un cache L3 cinq fois plus grand et une mémoire vive plus rapide, permettant à chaque cœur d'accéder plus rapidement aux données fréquemment utilisées et d'améliorer ainsi la réactivité globale des applications.
Quels gains concrets pour les entreprises ?
Au-delà des spécifications techniques, l'impact se mesure en bénéfices directs pour les clients. Les nouvelles instances M9g, basées sur Graviton5, affichent un gain de performance de 25% par rapport à leurs prédécesseures.
Cette amélioration s'accompagne d'une bande passante réseau jusqu'à deux fois supérieure pour les plus grandes instances et d'une bande passante des volumes de stockage EBS (Elastic Block Store) accrue de 20%.
Pour les entreprises, cela signifie des transferts de données plus rapides, des sauvegardes plus courtes et une meilleure performance pour les applications distribuées sur Amazon EC2.
Les premiers retours des clients sont éloquents. Atlassian, qui utilise déjà Graviton pour ses services Jira et Confluence, a observé une performance 30% plus élevée et une latence 20% plus faible lors de ses tests.
De son côté, SAP rapporte des gains encore plus spectaculaires, avec une augmentation des performances de ses requêtes allant de 35% à 60% sur SAP HANA Cloud. Ces résultats impressionnants confirment le potentiel du Graviton5 pour optimiser des charges de travail critiques et réduire les coûts d'infrastructure.
Sécurité et efficacité : les piliers du système Nitro
La performance ne serait rien sans une sécurité à toute épreuve. Les instances Graviton5 s'appuient sur le système Nitro de sixième génération, la fondation matérielle et logicielle qui isole les environnements clients.
AWS introduit une nouveauté majeure avec le Nitro Isolation Engine, un composant dont le code a été formellement vérifié. Cette approche utilise des preuves mathématiques pour garantir de manière certaine que les charges de travail d'un client sont totalement isolées des autres et inaccessibles aux opérateurs d'AWS.
Cet effort sur la sécurité se double d'une quête d'efficience. Le Graviton5 adopte un procédé de gravure en 3 nm, une finesse qui permet de loger plus de transistors tout en maîtrisant la consommation électrique.
Associé à des optimisations système comme le refroidissement direct de la puce (bare-die cooling), ce design permet à AWS de promettre une efficacité énergétique de premier plan. C'est un argument de poids pour les entreprises soucieuses d'atteindre leurs objectifs de développement durable sans sacrifier la puissance de calcul.
Avec les instances M9g disponibles en avant-première, AWS pose un nouveau jalon. La feuille de route est déjà tracée, avec des variantes optimisées pour le calcul (C9g) et la mémoire (R9g) prévues pour 2026.
Cette annonce place le Graviton5 en concurrence directe avec les puces maisons des autres géants du cloud, comme Cobalt de Microsoft et Axion de Google, signalant que la bataille pour le silicium le plus performant ne fait que commencer.