Une étude choc de Transport & Environment (T&E) révèle que les biocarburants, loin de réduire la pollution, aggravent le bilan carbone du transport. En intégrant les effets indirects comme la déforestation, ils émettraient en moyenne 16 % de CO₂ en plus que les carburants fossiles, remettant en cause deux décennies de politiques énergétiques et de stratégies RSE.
Le rapport publié début octobre 2025 par l'ONG dresse un constat sans appel. L'analyse approfondie du cycle de vie des biocarburants de première génération, ceux issus de cultures alimentaires, révèle une réalité bien plus sombre que les promesses initiales.
Un bilan carbone finalement négatif
Le cœur de la démonstration de T&E repose sur une analyse complète, du champ à la roue (« Well-to-Wheel »). En incluant les émissions liées au changement d’usage des sols (ILUC) et à la déforestation, le verdict est sévère : les biocarburants émettent en moyenne 16 % d'émissions de CO₂ de plus que les énergies fossiles qu'ils sont censés remplacer.
Le biodiesel à base d'huile de palme est le pire élève, triplant les émissions du diesel classique. Cette dette carbone initiale, issue de la conversion des terres, mettrait plus d'un siècle à être compensée, invalidant l'idée d'une neutralité à court terme.
Eau, terres, alimentation : les coûts cachés
Au-delà du seul CO₂, l'impact écologique est massif. La production de biocarburants est une activité extrêmement gourmande en ressources. Pour parcourir seulement 100 km, un véhicule au biodiesel requiert près de 3 000 litres d'eau.
Plus préoccupant encore, la surface agricole mobilisée est colossale : 32 millions d'hectares aujourd'hui, soit la taille de l'Italie, pour satisfaire à peine 4 % de la demande mondiale en carburant pour les transports.
Cette pression sur les terres arables entre directement en conflit avec la sécurité alimentaire mondiale, puisque 90 % de la production repose sur des cultures comme le blé, le colza ou le maïs.
Quand la stratégie RSE vire au greenwashing
Ces révélations ébranlent les fondations de nombreuses stratégies de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). De nombreux groupes de transport et de logistique ont massivement investi dans les biocarburants, les présentant comme un levier de décarbonation rapide.
Or, en s'appuyant sur une solution dont le bénéfice climatique est non seulement nul mais négatif, ces entreprises s'exposent désormais à de lourdes accusations de greenwashing.
La promesse verte se transforme en risque de réputation. T&E appelle ainsi à une refonte des politiques publiques, qui subventionnent encore massivement cette filière, et à un changement de cap vers des alternatives réellement durables comme l'électrification.