Pour près de 30 % des personnes traitées pour un cancer du sein, la fin des traitements n'est pas la fin de l'histoire. C'est le début d'une angoisse : la peur de la récidive. Jusqu'à présent, la médecine se contentait de surveiller, impuissante face à ces cellules cancéreuses silencieuses qui peuvent se réveiller des années plus tard.

Une nouvelle étude, publiée dans la prestigieuse revue *Nature Medicine*, vient de faire voler en éclats ce paradigme de "l'attente et voir", en proposant pour la première fois une stratégie de prévention active.

Comment ces "cellules dormantes" échappaient-elles aux traitements ?

Le principal ennemi dans la lutte contre la récidive, ce sont les cellules tumorales dormantes (ou DTCs). Après un traitement initial réussi, ces "cellules dormantes" peuvent se loger dans des sanctuaires comme la moelle osseuse.

Cancer du sein

Invisibles aux scanners traditionnels car elles ne se multiplient pas activement, elles peuvent rester en sommeil pendant des années, voire des décennies, avant de se réactiver soudainement et de provoquer une maladie métastatique, presque toujours incurable. C'est cette bombe à retardement que les chercheurs de l'Abramson Cancer Center de Penn Medicine ont enfin réussi à désamorcer.

Quels médicaments ont été utilisés pour obtenir de tels résultats ?

L'équipe de recherche a découvert que la biologie de ces cellules dormantes est très différente de celle des tumeurs actives. "Certains médicaments qui ne fonctionnent pas contre les cancers en croissance active peuvent être très efficaces contre ces cellules dormantes", explique le Dr. Lewis Chodosh. L'étude a donc testé des médicaments existants ciblant les mécanismes de survie de ces cellules. Les résultats de l'essai clinique de phase II sont spectaculaires :

  • Deux médicaments ont été testés : l'hydroxychloroquine (un anti-paludéen) et l'évérolimus (un anti-rejet).
  • Administrés seuls, ils ont éliminé jusqu'à 80% des cellules dormantes. En combinaison, ce chiffre atteint 87%.
  • Après trois ans de suivi, le taux de survie sans récidive a atteint 92-93% pour les patientes sous monothérapie, et un incroyable 100% pour celles ayant reçu la combinaison des deux.

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C'est la première fois qu'une intervention ciblée démontre une telle efficacité pour prévenir le retour de la maladie.

Quelles sont les prochaines étapes après cette avancée ?

Bien que les résultats soient spectaculaires, il est crucial de rappeler que nous en sommes encore au stade des essais cliniques. Les chercheurs de Penn Medicine ont déjà lancé des études de plus grande envergure (les essais ABBY et PALAVY) pour confirmer ces conclusions sur un plus grand nombre de patientes.

L'enjeu est de taille : passer d'une médecine de surveillance anxieuse à une médecine de prévention ciblée. Comme le résume la chercheuse principale, Angela DeMichele, "nous voulons pouvoir offrir aux patientes une meilleure option que 'attendre et voir'". Si ces résultats se confirment, ce sera un changement de paradigme majeur dans la prise en charge du cancer du sein.

Foire Aux Questions (FAQ)

Ce traitement est-il disponible dès maintenant ?

Non, pas encore. Les résultats publiés sont ceux d'un essai clinique de phase II. Avant que ce traitement ne devienne une pratique courante, il doit être validé par des essais de phase III, plus vastes, qui sont actuellement en cours. Cela prendra encore plusieurs années.

Comment les médecins détectent-ils ces cellules dormantes ?

Les cellules tumorales dormantes ne sont pas visibles sur les scanners habituels. Dans le cadre de cette étude, les chercheurs les ont identifiées en réalisant des analyses de la moelle osseuse des patientes. C'est aujourd'hui la méthode la plus fiable pour confirmer leur présence et donc un risque accru de récidive.

Les médicaments utilisés sont-ils nouveaux ?

Non, et c'est l'un des points forts de cette avancée. Les deux molécules testées, l'hydroxychloroquine et l'évérolimus, sont des médicaments déjà approuvés et utilisés pour d'autres pathologies (maladies auto-immunes, prévention du rejet de greffe). Le fait de "reconvertir" des médicaments existants pourrait considérablement accélérer leur adoption pour cette nouvelle indication si les essais à grande échelle sont concluants.