L'équation est simple : il faut nourrir une population mondiale croissante tout en réduisant l'énorme empreinte carbone de l'élevage. L'agriculture animale génère environ 14 % des émissions de GES globales, sans parler de la consommation massive de terre et d'eau douce.

Face à ces contraintes, les protéines microbiennes, issues de levures ou de champignons, apparaissent comme une solution incontournable. Une étude parue dans Trends in Biotechnology annonce aujourd’hui un pas de géant, grâce à l'ingénierie génétique.

Quel est ce champignon qui prend le goût de la viande ?

Le candidat idéal pour cette transformation est le champignon Fusarium venenatum, dont la texture filandreuse et le goût naturel rappellent fortement la viande. Déjà approuvé dans plusieurs pays (Royaume-Uni, Chine, États-Unis), cette mycoprotéine avait un défaut majeur : des parois cellulaires trop épaisses qui rendaient ses nutriments difficilement digestibles par l'homme.

L'équipe du professeur Xiao Liu de l'Université Jiangnan a corrigé ce point en supprimant deux gènes spécifiques. L'élimination du gène chitin synthase a permis d'affiner la paroi cellulaire, augmentant la biodisponibilité des protéines internes. Le second gène ciblé, le pyruvate décarboxylase, a été désactivé pour réorienter le métabolisme, permettant au champignon de produire plus avec moins d'apport.

Comment la génétique permet-elle une production plus écologique ?

Les résultats obtenus avec la souche modifiée, baptisée FCPD, sont spectaculaires. Non seulement elle est plus facile à digérer, mais elle utilise 44 % moins de sucre pour générer la même quantité de protéines et le fait 88 % plus rapidement que la souche sauvage.

L'analyse du cycle de vie montre que la production du FCPD réduit l'empreinte carbone globale jusqu'à 61 %. En comparaison avec l'élevage conventionnel, la mycoprotéine FCPD nécessite 70 % moins de terre et réduit de 78 % le risque de pollution des eaux douces par rapport à la production de poulet en Chine. C'est une véritable feuille de route pour une alimentation plus respectueuse de la planète.

Ce champignon peut-il vraiment décarboner l'industrie alimentaire ?

Les scientifiques ont simulé l'impact environnemental de la production de FCPD à l'échelle industrielle dans six pays aux matrices énergétiques variées (de la Finlande très renouvelable à la Chine dépendante du charbon).

Dans tous les cas, le FCPD affichait un impact environnemental inférieur à la production traditionnelle de Fusarium venenatum. L'enjeu est désormais d'intégrer cette technologie à la chaîne alimentaire globale. Cette approche prouve qu'il est possible de satisfaire les besoins croissants en protéines sans les coûts environnementaux astronomiques de l'agriculture animale, offrant ainsi une solution durable et nécessaire à l'avenir.

Foire Aux Questions (FAQ)

Qu'est-ce que le champignon Fusarium venenatum ?

C'est un champignon filamenteux qui est utilisé pour produire de la mycoprotéine, une alternative végétarienne à la viande. Il est apprécié pour sa texture fibreuse et sa saveur neutre qui peut être facilement assaisonnée.

Comment la modification CRISPR a-t-elle amélioré le champignon ?

Les chercheurs ont supprimé deux gènes. L'un a rendu la paroi cellulaire plus mince, améliorant la digestion humaine des protéines. L'autre a optimisé le métabolisme, ce qui permet au champignon d'utiliser moins de nutriments et de croître plus vite, rendant la production plus durable.

La mycoprotéine est-elle déjà approuvée pour la consommation ?

Oui, le Fusarium venenatum est déjà approuvé pour la consommation humaine et est commercialisé sous forme de mycoprotéine dans plusieurs pays, notamment le Royaume-Uni, la Chine et les États-Unis. La nouvelle souche FCPD éditée par CRISPR devra néanmoins passer par des processus de validation spécifiques, bien qu'aucun ADN étranger n'ait été inséré.