Saviez-vous que les étoiles pouvaient « chanter » ? En réalité, elles vibrent, un peu comme des instruments de musique, mais à des fréquences trop basses ou trop élevées pour que nos oreilles puissent les percevoir. Pour capter ces vibrations invisibles, les astronomes utilisent des outils spécifiques tirés de l’astérosismologie (ou astrosismologie), une branche de l’astrophysique qui étudie les vibrations internes des étoiles.
« Les vibrations d’une étoile sont comme sa signature sonore unique », explique Yaguang Li, chercheur à l’université d’Hawaï, dans un communiqué du Keck Observatory. « En étudiant ces oscillations, nous pouvons mesurer avec précision la masse, la taille et l’âge de l’étoile. »
C’est précisément ce que l’équipe de Yaguang Li a réalisé avec l’étoile HD 219134, aussi connue sous le petit nom de Gliese 892. Jusqu’ici, les astronomes avaient surtout étudié le « chant » d’étoiles plus chaudes que notre Soleil, grâce à des télescopes spatiaux comme Kepler ou Tess. HD 219134 est une étoile orange, plus froide, et ses vibrations sont si subtiles que les instruments spatiaux ont du mal à les détecter, ce qui rend cette observation encore plus remarquable.
Gliese 892 / HD 219134 (cercle) dans la constellation de Cassiopée
Crédits : NASA / JPL-Caltech / DSS (Wikipédia)
Pour contourner cette difficulté, les chercheurs ont utilisé le Keck Planet Finder (KPF), un spectromètre optique de nouvelle génération de l’observatoire Keck, capable de mesurer avec une extrême précision les oscillations stellaires. Après plus de 2 000 mesures en quatre nuits, ils ont pu déterminer que HD 219134 a environ 10,2 milliards d’années, soit plus du double de l’âge de notre Soleil.
Cette découverte est importante car elle apporte une nouvelle clé pour comprendre le vieillissement des étoiles. En effet, on sait que plus une étoile est jeune, plus elle tourne vite, un peu comme une toupie qui ralentit avec le temps. Mais pour des étoiles plus âgées comme HD 219134, cette décélération semble s’arrêter, ce qui complique la datation basée sur la vitesse de rotation. Cette autre méthode, basée sur le chant de l’étoile, c’est comme « retrouver un diapason longtemps perdu pour mieux régler les horloges stellaires », illustre Yaguang Li avec une belle métaphore.
La plateforme optique du KPF, faite en Zerodur, en cours d’installation dans le labo spatial de l’université de Berkeley.
Crédits : Jerry Edelstein / KPF team
Par ailleurs, cette étude a révélé que HD 219134 pourrait être environ 4 % plus petite que ce que l’on pensait, une différence modeste mais significative qui remet en question certains modèles pour les étoiles froides. Les scientifiques ne savent pas encore si cela s’explique par des phénomènes atmosphériques, magnétiques ou des erreurs dans les modèles eux-mêmes.
Vue d'artiste de Gliese 892 / HD 219134
Crédits : Gabriel Perez Diaz/Instituto de Astrofísica de Canarias / W. M. Keck Observatory
Connaître précisément la taille de cette étoile permet aussi d’affiner les données sur ses planètes. HD 219134 compte au moins cinq exoplanètes, dont deux semblent posséder une composition rocheuse similaire à celle de la Terre. Cela fait de cette étoile une cible privilégiée pour de futures missions, comme l’Observatoire des mondes habitables de la NASA, qui cherchent à détecter la vie ailleurs dans l’Univers.