Pékin vient de franchir une étape majeure vers son autonomie technologique. Une nouvelle directive impose désormais l'usage exclusif de puces IA nationales dans tous les centres de données bénéficiant de fonds publics.

Cette décision, qui vise à écarter les géants comme Nvidia, rebat les cartes du marché mondial des semi-conducteurs et intensifie la guerre technologique avec Washington.

Une nouvelle directive gouvernementale chinoise, révélée par plusieurs sources concordantes, impose un changement de cap radical. Désormais, tout nouveau projet de centre de données recevant un financement public devra exclusivement s'équiper en puces dédiées à l'intelligence artificielle de conception nationale.

Huawei Ascend CANN

Selon les nouvelles directives, les projets dont la construction est achevée à moins de 30 % doivent retirer tout matériel étranger déjà installé et annuler les commandes en cours. Pour les chantiers plus avancés, une évaluation sera menée au cas par cas.

Une escalade dans la guerre technologique

Cette décision s'inscrit dans un contexte de tensions exacerbées entre Washington et Pékin, une véritable guerre technologique pour la suprématie dans le calcul de haute performance et l'intelligence artificielle.

Depuis des mois, les États-Unis multiplient les contrôles à l'exportation pour empêcher la Chine d'accéder aux processeurs les plus avancés, justifiant ces restrictions par des raisons de sécurité nationale.

Huawei Ascend 920 composant IA Nvidia H20

La réponse de Pékin est une accélération forcée de sa quête d'autonomie technologique. Sachant que la majorité des centres de données en Chine bénéficient d'une forme ou d'une autre de soutien étatique, l'impact de cette mesure sera massif.

Le contexte est désormais clair, il s'agit de sevrer son écosystème numérique des technologies américaines et construire une filière locale résiliente et entièrement souveraine.

Nvidia, principale victime de cette nouvelle doctrine

Le coup est particulièrement rude pour les géants américains des semi-conducteurs, et surtout pour Nvidia. Le concepteur de puces, qui dominait outrageusement le marché chinois avec 95 % de parts de marché en 2022, a vu sa présence s'effondrer à presque zéro suite aux sanctions américaines. L'entreprise espérait regagner du terrain avec des modèles spécifiquement adaptés pour contourner les restrictions, comme la puce IA H20.

Cette nouvelle directive anéantit ces espoirs. Elle couvre non seulement les puces autorisées à la vente, mais également les processeurs plus puissants comme les B200 et H200, qui, bien qu'interdits à l'exportation directe, circulaient via des marchés parallèles.

En fermant la porte des projets publics, Pékin assèche une source de revenus considérable pour Nvidia, mais aussi pour ses concurrents comme AMD et Intel.

Un pari risqué pour une opportunité en or

Cette politique du fait accompli crée un marché captif pour les entreprises chinoises. Des acteurs comme Huawei Technologies, mais aussi des sociétés spécialisées comme Cambricon, MetaX ou Enflame, se voient offrir une opportunité unique de déploiement à grande échelle. C'est une aubaine pour stimuler leurs ventes et affiner leurs produits dans des conditions réelles.

Toutefois, le défi est immense. Les développeurs et ingénieurs chinois sont habitués à l'écosystème logiciel mature et performant de Nvidia, notamment sa plateforme CUDA.

La transition vers des alternatives locales pourrait s'avérer complexe et entraîner des pertes de performance à court terme. Plusieurs projets, dont une installation prévue dans le nord-ouest du pays qui devait utiliser des puces Nvidia, ont d'ailleurs déjà été mis en suspens.

La question demeure : la Chine est-elle prête à accepter un possible retard technologique temporaire pour garantir son indépendance à long terme ? La réponse à cette question déterminera l'équilibre des forces pour la prochaine décennie.