L'Agence Spatiale Européenne (ESA) a fait sensation à Vienne lors de son Living Planet Symposium. Elle a dévoilé les toutes premières images capturées par son satellite Biomass, lancé il y a seulement deux mois. Ce n'est qu'un début, mais ces clichés offrent déjà un aperçu "spectaculaire" de nos forêts, déserts et glaciers. C'est une avancée majeure pour comprendre comment notre planète gère le carbone et comment le climat impacte ses précieux écosystèmes.

Qu'est-ce qui rend Biomass si extraordinaire ?

Le cœur de la mission Biomass, c'est son instrument révolutionnaire : le premier radar à synthèse d'ouverture en bande P (P-band synthetic aperture radar) jamais envoyé dans l'espace. Contrairement aux technologies optiques habituelles, comme celles des satellites Sentinel-2 qui ne voient que le sommet des canopées, le signal de ce radar possède une longueur d'onde suffisamment longue. Cela lui permet de littéralement "voir à travers" la végétation dense des forêts. Il peut ainsi mesurer directement la biomasse ligneuse – les troncs, les branches et les tiges. Cette capacité sans précédent à sonder sous le couvert végétal offre une évaluation bien plus précise de la quantité de carbone stockée dans les forêts mondiales. C'est un bond colossal pour la science du climat, comme si les scientifiques obtenaient une vision à rayons X de nos poumons verts planétaires.

Que nous révèlent ces premières vues de la Terre ?

Les premières images dévoilées ne sont pas seulement magnifiques ; elles regorgent déjà d'informations. Nous avons pu admirer des paysages vibrants de la Bolivie, où la rivière Beni serpente à travers d'épaisses forêts tropicales, distinguant clairement différents écosystèmes : forêts en vert, zones humides en rouge, et prairies en bleu-violet. Biomass a également capturé des portions de la forêt amazonienne au nord du Brésil, révélant des zones humides jusqu'alors masquées sous une végétation dense. En Indonésie, la forêt tropicale de Halmahera nous montre des caractéristiques topographiques, y compris l'imposant volcan actif Mont Gamkonora. Ces premiers aperçus confirment l'immense potentiel de Biomass à dévoiler des détails inédits sur la structure de la végétation, informations cruciales pour l'étude du cycle du carbone et la lutte contre la déforestation. Chaque image est une pièce supplémentaire dans le vaste puzzle de la santé de notre planète.

Le satellite peut-il regarder au-delà des forêts ?

Absolument ! Le radar en bande P de Biomass ne se limite pas aux forêts ; sa polyvalence lui permet de sonder certains des environnements les plus extrêmes de la Terre. Prenons l'exemple d'une image du désert du Sahara au Tchad, montrant une partie des montagnes du Tibesti. Ce radar a la capacité de pénétrer le sable sec jusqu'à cinq mètres de profondeur. Cela permet aux scientifiques de débusquer des caractéristiques cachées comme d'anciens lits de rivière ou des lacs asséchés, offrant des indices inestimables sur les climats passés et d'éventuelles ressources en eau fossile. L'Antarctique aussi a été explorée : Biomass a capturé des vues du glacier Nimrod et des monts Transantarctiques. La longue longueur d'onde de son radar lui permet de pénétrer plus profondément la glace que les satellites actuels, ouvrant de nouvelles perspectives pour l'étude de la vitesse et de la structure interne de ces immenses étendues gelées. C'est vraiment un observateur polyvalent de notre monde.

Pourquoi cette mission est-elle cruciale pour notre avenir ?

Même si la mission Biomass est toujours en phase de mise en service – avec ses systèmes et ses données en cours de réglage – ces premières images sont, comme le souligne Michael Fehringer, chef de projet Biomass à l'ESA, "tout simplement spectaculaires". Et elles ne sont qu'un aperçu de ce qui nous attend. L'objectif principal de Biomass est de fournir aux scientifiques les données les plus précises possible pour quantifier la biomasse forestière, et ainsi déterminer avec exactitude la quantité de carbone stockée dans les forêts mondiales. Cette connaissance n'est pas seulement théorique ; elle est fondamentale. Elle nous aide à affiner les modèles climatiques, à véritablement saisir l'impact de la déforestation et du changement climatique, et à élaborer des stratégies de conservation plus efficaces. Cette entreprise colossale, fruit du dévouement de "centaines de personnes", souligne l'immense potentiel de la technologie spatiale pour la protection de notre planète et la lutte contre le réchauffement climatique.

Questions/réponses :

  • Quand le satellite Biomass a-t-il été mis en orbite ?


    Le satellite Biomass de l'ESA a été lancé moins de deux mois avant la publication de ces premières images, ce qui correspond au printemps 2025.
  • En quoi le radar de Biomass est-il si particulier ?


    Le radar en bande P du satellite est le premier de son genre dans l'espace. Grâce à sa longue longueur d'onde, il peut pénétrer les canopées des forêts, mais aussi sonder le sable et la glace, révélant des informations inaccessibles aux autres satellites.
  • Les données de Biomass sont-elles déjà exploitables par les scientifiques ?


    Le satellite est encore en phase de calibration. Les images sont très prometteuses, mais les données ne sont pas encore totalement prêtes pour des études scientifiques quantitatives précises sur le carbone.
Source : ESA