Les ingénieurs britanniques et les physiciens japonais franchissent deux étapes majeures vers une fusion nucléaire viable, alliant contrôle magnétique innovant et compréhension des turbulences multi-échelles.
Au Royaume-Uni, les chercheurs de la UK Atomic Energy Authority ont obtenu un contrôle inédit du plasma dans le dispositif MAST Upgrade. En appliquant un champ magnétique tridimensionnel à l’aide de bobines spéciales, ils ont réussi à stabiliser la matière en fusion au cœur du tokamak sphérique.
Cette prouesse, saluée comme un jalon technique, marque la première suppression complète des instabilités appelées ELMs dans un tokamak de cette catégorie.
Un défi clé : maîtriser les instabilités du plasma
La fusion nucléaire reproduit sur Terre le mécanisme des étoiles, où deux noyaux légers se combinent sous d’immenses températures. Dans les tokamaks, la stabilité du plasma est capitale : un déséquilibre de pression ou de densité peut provoquer de brusques pertes d’énergie ou endommager les parois du réacteur.
Plasma is better in colour! Watch one of our latest #plasma pulses in our ST40 tokamak, filmed using our new high-speed colour camera at an incredible 16,000 frames per second.
— Tokamak Energy (@TokamakEnergy) October 15, 2025
Each pulse lasts around a fifth of a second. What you’re seeing is mostly visible light from the… pic.twitter.com/jWKmcl0tEx
Grâce aux nouvelles bobines dites RMP (Resonant Magnetic Perturbation), les chercheurs britanniques ont pu créer un champ magnétique finement tridimensionnel capable de neutraliser ces phénomènes destructeurs.
Le chef scientifique du projet, James Harrison, souligne qu’il s’agit d’une étape déterminante pour préparer les réacteurs commerciaux comme le futur programme STEP.
Au Japon, une percée sur la turbulence multi-échelle
De leur côté, les physiciens du Large Helical Device au Japon ont observé pour la première fois l’interaction dynamique entre les turbulences de différentes tailles à l’intérieur du plasma.
En exploitant un dispositif de diffusion par ondes millimétriques à antennes multiples, ils ont découvert qu’une diminution de la turbulence à grande échelle entraînait paradoxalement un accroissement de la turbulence plus fine.
Ce phénomène de régulation croisée, observé expérimentalement pour la première fois, éclaire les limites de confinement observées dans les machines actuelles et pourrait guider les futures stratégies de contrôle plasma.
Vers une maîtrise complète du feu des étoiles
Les implications de ces découvertes convergent : en combinant contrôle magnétique tridimensionnel et compréhension des turbulences multi-échelles, la fusion thermonucléaire se rapproche d’un régime stable et durable.
Le programme STEP britannique, soutenu par un investissement public de 2,5 milliards de livres (2,9 milliards d'euros), servira de banc d’essai à ces technologies. Quant aux expériences japonaises, elles affinent les modèles numériques employés pour prévoir les transferts d’énergie dans les futurs réacteurs comme ITER.
Ensemble, ces avancées tracent la voie vers une génération de tokamaks capables de produire plus d’énergie qu’ils n’en consomment, un rêve que les ingénieurs espèrent concrétiser d’ici 2040. Le défi reste immense, mais la direction semble enfin claire : comprendre, contenir et libérer le pouvoir du plasma.