Au-delà des rêves de science-fiction, le concept de cargos atomiques parcourant les océans se transforme en une réalité concrète. Devant l'impératif de réduire les émissions de CO2 d'un secteur qui contribue à près de 3 % des gaz à effet de serre mondiaux, des acteurs industriels et des institutions de certification accélèrent la mise au point de navires propulsés par l'énergie nucléaire.

Des partenariats à l'échelle internationale, en particulier avec les États-Unis, l'Australie et la Corée du Sud, ont déjà conduit à des idées validées, ce qui pourrait entraîner une révolution dans le domaine du transport de marchandises et des opérations de secours en mer.

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Quelle sera la technologie utilisée pour ces vaisseaux du futur ?

On distingue deux méthodes technologiques. La première initiative, menée en collaboration par l'entreprise américaine Deployable Energy et l'entreprise australienne Seatransport, concerne des vaisseaux de sauvetage dotés de réacteurs à micro-modules (MMR).

Ces unités compactes pourraient permettre aux navires de 73 mètres de fonctionner durant une décennie sans besoin de réapprovisionnement, tout en étant capables d'alimenter des régions côtières touchées par des catastrophes en électricité.

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La deuxième approche, suivie par de grands acteurs sud-coréens tels que l'institut KAERI et Samsung Heavy Industries, repose sur l'utilisation de réacteurs à sels fondus (MSR) pour donner une propulsion aux méthaniers de grande taille.

Cette technologie de Génération IV, considérée comme à sûreté passive, offre une autonomie qui correspond à la durée de vie du vaisseau, soit 30 à 40 ans, sans nécessité de refaire le plein de combustible.

Pourquoi le nucléaire fait-il à nouveau son apparition en mer ?

La décarbonation est le principal facteur stimulant cette innovation. Le transport par voie maritime, qui fonctionne encore largement avec du fioul lourd, est sous pression pour diminuer son impact carbone.

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L'option de la propulsion nucléaire présente une réponse radicale : aucune émission directe de CO2, de soufre ou d'oxydes d'azote. Cependant, l'argument écologique n'est pas le seul. L'indépendance quasi sans limites de ces vaisseaux représente un avantage stratégique et économique de premier ordre.

Elle supprime la nécessité de réapprovisionnement, ce qui diminue les dépenses opérationnelles et accroît la disponibilité des navires pour des missions vitales. Cette innovation est supervisée par de prestigieux organismes de certification tels que Lloyd's Register et l'American Bureau of Shipping, qui œuvrent sans relâche à la définition de standards de sécurité et d'encadrements réglementaires adaptés à ces technologies émergentes.

Quels sont les enjeux et les conséquences ?

Bien que la promesse soit grande, la route vers une flotte commerciale nucléaire reste pleine d'obstacles.

La question de la sécurité est au cœur des préoccupations. Les initiateurs de ces initiatives soulignent le caractère « passivement sûr » des réacteurs de Génération IV, qui diminueraient considérablement les dangers comparés aux centrales conventionnelles. Néanmoins, il sera nécessaire de persuader le public ainsi que les responsables des ports à travers le monde.

Les enjeux réglementaires sont également d'une immense envergure. Il n'y a pas encore de cadre international harmonisé pour les navires à propulsion nucléaire civils, ce qui rend leur exploitation plus complexe. En définitive, la question du traitement des déchets nucléaires issus de la fin de vie des navires demeure un sujet délicat. En dépit des défis, la capacité de cette technologie est incontestable, non seulement pour la propulsion, mais également pour des usages plus vastes tels que l'approvisionnement en énergie de plateformes en mer ou de bases éloignées.

Foire Aux Questions (FAQ)

Peut-on vraiment dire que ces nouveaux réacteurs sont sûrs ?

En effet, les réacteurs de Génération IV (MMR et MSR) sont ceux qui sont envisagés. Ils sont équipés de systèmes de sécurité passifs, ce qui implique qu'ils ont la capacité de se refroidir et de s'arrêter sans l'intervention d'un humain en cas d'incident, diminuant ainsi considérablement les chances d'accidents graves comparativement aux modèles précédents.

À quand la vue de ces bateaux sur les mers ?

Les projets sont à un stade avancé. Le concept du méthanier sud-coréen a déjà obtenu un accord de principe et pourrait être achevé d'ici 2026. Toutefois, l'édification et la mise en fonctionnement nécessiteront encore plusieurs années. On ne prévoit pas une mise en œuvre commerciale à grande échelle avant la prochaine décennie.

Est-ce que cela pourrait impliquer les navires de croisière ?

Techniquement, c'est possible. Toutefois, les projets initiaux mettent l'accent sur des navires pour lesquels l'argument en faveur de l'autonomie et de la décarbonation est le plus pertinent, tels que les porte-conteneurs, les méthaniers ou les navires de soutien. Si elle s'appliquait aux navires de passagers, cela poserait des problèmes d'acceptabilité publique encore plus difficiles à résoudre.