C'est une première, un moment historique : l'Agence Spatiale Européenne (ESA) a dévoilé des images uniques. Celles du pôle sud de notre Soleil. Une région totalement inconnue jusqu'à présent. Une "terra incognita" pour les scientifiques. Ces clichés viennent de la sonde Solar Orbiter. Ils sont bien plus que de belles photos. Ils ouvrent une nouvelle ère pour la science solaire.
Une "terra incognita" enfin révélée
Pourquoi a-t-on attendu si longtemps ? La raison est simple. La Terre, les planètes, et nos sondes orbitent sur un même plan. Comme des billes sur un disque plat, il s'agit du plan de l'écliptique. De là, impossible de voir les "calottes" du Soleil. Il fallait donc ruser. La mission Solar Orbiter a utilisé Vénus comme un tremplin au fil de survols rapprochés ayant permis d'incliner son orbite. En mars dernier, l'angle était de 17 degrés. Assez pour enfin voir le pôle sud. L'un des responsables de la mission, Sami Solanki, l'a dit : nous ne savions pas à quoi nous attendre... les pôles du Soleil sont littéralement terra incognita, mais le voile est enfin levé.
Le chaos magnétique du maximum solaire
Ces premières images montrent un chaos. Un véritable méli-mélo magnétique. Les polarités nord et sud sont complètement enchevêtrées. Ce n'est pas une surprise pour les experts. C'est le signe que notre étoile est en pleine effervescence. On appelle ça le "maximum solaire". C'est le pic d'activité de son cycle de 11 ans. Et c'est à ce moment précis que les pôles s'inversent. Un phénomène clé, enfin observé en direct.
Cette phase de désordre est temporaire. Une fois l'inversion terminée, une seule polarité s'installera de nouveau au pôle. Le Soleil entrera alors dans une période plus calme, le "minimum solaire". Pouvoir étudier ce cycle de si près est une chance inouïe pour la science.
La pièce manquante pour prédire la météo spatiale
Observer les pôles n'est pas qu'une curiosité. C'est un enjeu majeur pour notre vie sur Terre. Pour de nombreux scientifiques, ces données polaires sont la "pièce manquante du puzzle". Elles sont indispensables pour améliorer les modèles informatiques qui prédisent le comportement de notre étoile.
L'objectif final ? Anticiper la météo spatiale. Ces violentes tempêtes solaires qui projettent des particules à travers l'espace. Elles peuvent être dangereuses. Elles menacent nos satellites de communication et de GPS. Elles peuvent perturber nos réseaux électriques. Savoir quand une grosse tempête se prépare permettrait de mieux protéger nos infrastructures. C'est le "Saint Graal" de la physique solaire.
Trois instruments, trois regards complémentaires
Pour percer les secrets du pôle sud, Solar Orbiter est un concentré de technologie. Trois instruments ont été essentiels pour ces premières observations.
- PHI : le "cartographe" de la mission. Il a mesuré le champ magnétique et confirmé le chaos ambiant.
- EUI : le "photographe" de l'extrême. Il a pris des clichés de l'atmosphère solaire en ultraviolet, là où les températures atteignent le million de degrés.
- SPICE : le "chimiste" de la bande. Il analyse la lumière pour identifier les différents éléments présents. Il a aussi, pour la première fois, mesuré la vitesse du vent solaire à sa source.
La combinaison de ces trois regards permet aux chercheurs de reconstituer une vue 3D de cette région. Et ce n'est qu'un début. La mission menée par l'ESA ne fait que commencer. L'orbite de la sonde va continuer de s'incliner dans les années à venir. Pour des vues encore plus plongeantes. Encore plus détaillées. Le spectacle est loin d'être terminé.