Le renouvellement de la composante des sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) de la Marine nationale se poursuit à un rythme soutenu. Au cœur de cette modernisation stratégique, le programme Barracuda, piloté par la Direction générale de l’armement (DGA), vise à remplacer les SNA de type Rubis, en service depuis les années 1980, par une nouvelle génération de submersibles plus performants, discrets et polyvalents.

La divergence : une étape critique et maîtrisée

Le 12 décembre 2025, le sous-marin nucléaire d’attaque De Grasse a connu son moment de vérité à Cherbourg. Les équipes de Naval Group et de TechnicAtome, en collaboration avec l’équipage d’armement, ont procédé à la « divergence » de sa chaufferie nucléaire.

Cette opération hautement technique consiste à enclencher, pour la toute première fois, une réaction nucléaire en chaîne maîtrisée au sein du cœur du réacteur K15.

Naval Group sous-marin Barracuda

Sous-marin classe Barracuda (credit : Naval Group)

Ce jalon est indispensable pour vérifier le bon fonctionnement de l'ensemble du système de propulsion. L’opération, réalisée sous la maîtrise d’ouvrage du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), n'a pu avoir lieu qu'après avoir obtenu le feu vert du Délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection (DSND), garant de la sécurité de ces installations complexes.

Un calendrier respecté pour un submersible de nouvelle génération

Cette étape cruciale s'inscrit dans un calendrier millimétré. Après son transfert sur le dispositif de mise à l’eau en mai 2025, le sous-marin avait fait l'objet d'une « prise d’armement pour essais » en octobre, marquant la prise en main du navire par son équipage bleu, commandé par le capitaine de frégate Owen. La divergence confirme ainsi l'avancement du programme, préparant le terrain pour les essais à la mer.

sous-marin Barracuda SNA Suffren

Cérémonie du SNA Suffren, même classe que le futur De Grasse
(credit : Naval Group)

Ces derniers sont désormais prévus pour le premier semestre 2026. Ils permettront de tester le bâtiment dans toutes ses dimensions avant sa livraison officielle à la Marine nationale. Le sous-marin De Grasse rejoindra alors ses prédécesseurs, le Suffren, le Duguay-Trouin et le Tourville, déjà admis au service actif.

Barracuda : un saut capacitaire pour la Marine nationale

Le programme Barracuda ne se contente pas de remplacer des navires vieillissants ; il représente un véritable bond en avant capacitaire. Décrits comme des "bêtes de guerre", ces nouveaux SNA affichent un déplacement de 5 300 tonnes et sont dotés de capteurs dix à quinze fois plus performants que ceux de la génération Rubis. Leur propulsion nucléaire leur confère une endurance et une discrétion remarquables, des atouts maîtres dans les océans.

Au-delà de leur furtivité, leur polyvalence est redoutable. Capables de mener des missions de lutte anti-sous-marine et anti-navire avec des torpilles F21 et des missiles Exocet SM39, ils peuvent également frapper des cibles terrestres à des centaines de kilomètres grâce aux missiles de croisière navals (MdCN).

Cette capacité, couplée à la possibilité de mettre en œuvre des forces spéciales, en fait un outil stratégique de premier plan pour la France, dont l'avenir se dessine avec les deux derniers navires de la série, le Rubis et le Casabianca, attendus d'ici 2030.