À quelques kilomètres de la base navale stratégique de Brest, les ateliers de Thales tournent à plein régime. Le groupe français de défense vient d'annoncer une montée en puissance spectaculaire de sa production de sonars, ces "oreilles" de haute technologie capables de traquer les sous-marins les plus silencieux.

Dans un contexte géopolitique tendu, la maîtrise du monde sous-marin est redevenue une priorité absolue pour les grandes puissances navales, et le carnet de commandes de Thales s'en ressent directement.

Pourquoi cette accélération soudaine de la production ?

La raison est simple : la demande explose. Portée par la hausse des budgets de défense en Europe, notamment en réponse à la menace russe, la guerre anti-sous-marine est redevenue un enjeu stratégique majeur. Thales a récemment vendu son centième sonar remorqué Captas, son produit phare qui équipe déjà dix-sept marines à travers le monde, y compris l'US Navy.

Pour répondre à cet afflux de commandes, le groupe va multiplier sa capacité de production "par 2 à 2,5" entre 2024 et 2026. Cette montée en charge s'accompagne d'une vague de recrutements sur le site de Brest, qui a déjà embauché 120 personnes en 2024 et prévoit autant de nouvelles recrues d'ici la fin 2025.

Comment fonctionnent ces "oreilles" sous-marines ?

La discrétion est l'atout maître d'un sous-marin ; une fois détecté, il devient une cible vulnérable. Les systèmes développés par Thales visent précisément à briser cette furtivité. Le sonar Captas, déployé depuis l'arrière d'une frégate, utilise des ondes de très basse fréquence pour sonder les profondeurs sur de très longues distances. Même les sous-marins les plus silencieux ne peuvent échapper à son écho.



En complément, Thales a développé les bouées Sonoflash, qui peuvent être larguées par hélicoptère pour affiner la localisation d'une cible suspecte. Cette combinaison permet non seulement de détecter, mais aussi de pister un submersible et, si nécessaire, de guider un armement contre lui. L'efficacité de ce système a été récemment démontrée lorsqu'une frégate française a suivi un sous-marin russe pendant plusieurs semaines dans l'Atlantique.

La lutte anti-mines est-elle aussi concernée ?

Oui, et Thales mise massivement sur les systèmes sans pilote pour cette mission à haut risque. Le groupe a développé le sonar remorqué Tsam, spécialement conçu pour être tracté par des drones de surface. Sa résolution est si fine qu'il peut repérer des objets de la taille d'une carte bancaire au fond de l'eau. Ce système, qui fait partie du programme franco-britannique MMCM, a déjà été livré à la Marine Nationale et à la Royal Navy, pour une mise en service prévue en 2026.



Sur ce marché en pleine croissance, la concurrence est rude, notamment face au groupe franco-belge Exail. Cependant, Thales conserve un avantage stratégique grâce à sa capacité à intégrer des systèmes complets, coordonnant les drones, les capteurs et le traitement des données en une solution unique.

Foire Aux Questions (FAQ)

Qu'est-ce qu'un sonar exactement ?

Un sonar (acronyme de Sound Navigation and Ranging) est un appareil qui utilise la propagation des ondes sonores dans l'eau pour détecter et localiser des objets sous la surface. Il peut être "actif" (il émet un son et analyse son écho, comme un radar) ou "passif" (il se contente d'écouter les bruits émis par les autres objets, comme les moteurs d'un sous-marin).

Qu'est-ce que le programme MMCM ?

Le programme MMCM (Maritime Mine Counter Measures) est une coopération entre la France et le Royaume-Uni visant à développer un système de lutte contre les mines navales entièrement basé sur des drones et des robots. L'objectif est de remplacer les traditionnels chasseurs de mines, où les équipages sont exposés, par des solutions autonomes qui opèrent à distance de la menace.

Quel est l'impact de cette activité pour la région de Brest ?

L'impact est très positif. Le site de Thales à Brest emploie déjà plus de 1 800 personnes et prévoit de recruter 120 nouveaux collaborateurs en 2025, après une vague d'embauches similaire en 2024. Cette dynamique renforce la position de la région comme un pôle d'excellence mondial dans le domaine de la défense navale et des technologies sous-marines.