Depuis le rachat par Elon Musk en 2022 et le changement de nom radical en X en juillet 2023, l'identité de Twitter a été progressivement effacée. Le célèbre logo de l'oiseau bleu a disparu, le trafic de twitter.com est redirigé vers x.com, et le milliardaire lui-même avait annoncé vouloir dire « adieu à la marque Twitter ». C'est sur cette base qu'Operation Bluebird, une startup fondée par l'avocat spécialisé Michael Peroff et Stephen Coates, un ancien directeur des marques chez Twitter, a bâti son offensive juridique.

Comment une marque peut-elle être légalement considérée comme abandonnée ?

L'argument central d'Operation Bluebird repose sur la notion d'abandon de marque. Selon le droit américain des marques, une marque peut être annulée si son propriétaire cesse de l'utiliser pendant trois années consécutives ou s'il en discontinue l'usage sans intention de la reprendre. La pétition affirme que X Corp. a « légalement abandonné ses droits » sur la marque Twitter « sans aucune intention de reprendre son utilisation ».

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Les actions d'Elon Musk sont utilisées comme preuves principales. Son tweet annonçant la fin de la marque et de « tous les oiseaux » est une pièce maîtresse du dossier. En remplaçant systématiquement le nom, le logo et l'identité visuelle de la plateforme, X Corp. aurait manifesté une volonté claire de ne plus exploiter commercialement les marques « Twitter » et « Tweet », ce qui, aux yeux des plaignants, équivaut à un abandon pur et simple.

Quel est le projet derrière cette tentative de récupération ?

L'ambition d'Operation Bluebird n'est pas seulement symbolique. La startup a déjà déposé sa propre demande de marque pour le nom « Twitter » et prévoit de lancer une nouvelle plateforme sociale baptisée Twitter.new. Un prototype serait même déjà fonctionnel, permettant aux utilisateurs de réserver leurs noms d'utilisateur en avance. Stephen Coates décrit ce projet comme une plateforme familière aux anciens utilisateurs de Twitter, mais dotée de nouveaux outils pour garantir une expérience plus sûre.

Cette nouvelle version de Twitter miserait notamment sur l'intelligence artificielle pour la vérification des faits et la modération de contenu. L'objectif est clair : attirer les marques et les annonceurs qui ont déserté X, craignant d'associer leur image à des contenus jugés extrémistes ou peu fiables. Michael Peroff souligne que « les marques sont coincées sur X car elles n'ont nulle part où aller », alors que des concurrents comme Threads, Mastodon ou Bluesky n'ont pas encore l'impact culturel de l'ancien Twitter.

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Quelles sont les chances de succès de cette démarche face à X Corp. ?

Le chemin s'annonce long et complexe. Des experts juridiques sont partagés sur l'issue de cette affaire. Alexandra Roberts, professeure de droit, estime qu'Operation Bluebird a un « argument solide ». Cependant, elle soulève le concept de « goodwill résiduel », où une marque continue de vivre dans l'esprit du public même après que son propriétaire a cessé de l'utiliser. Le fait que de nombreux utilisateurs parlent encore de « Twitter » et de « tweets » pourrait jouer en faveur de X Corp.

D'autres, comme l'avocat en propriété intellectuelle Douglas Masters, doutent du succès de la pétition, suggérant que le passage à X ne prouve pas nécessairement une intention d'abandonner tous les droits commerciaux liés à Twitter. X Corp. a jusqu'en février pour répondre. Si l'entreprise conteste la pétition, la procédure pourrait durer des années. Malgré cela, Stephen Coates se montre confiant : « Nous pensons que notre position est très solide. Nous sommes prêts à nous battre ».

Source : Ars Technica