Historique

arcep L'autorité française de régulation des télécoms, l' Arcep, a autorisé le 27 février 2008 les opérateurs Orange et SFR à utiliser la bande de fréquences 900 MHz pour la diffusion de leur réseau de troisième génération. Si l'annonce semble anodine, elle va pourtant avoir un impact important pour la pérennité des  services mobiles 3G.

La bande 900 Mhz est l'une des deux bandes de fréquences sélectionnées pour la diffusion des réseaux 2G, que ce soit pour la voix ( GSM ) ou les données ( GSM / GPRS / EDGE ). Pour la 3G ( UMTS / HSPA ), la bande de fréquences choisie en Europe est la bande 2100 MHz, capable de porter plus d'information mais offrant une portée moindre.

Mais les systèmes pour la 2G et la 3G fonctionnant sur un mode différent, il faut rebâtir un réseau complet de stations de base pour obtenir une couverture comparable. Si celle de la 2G couvre désormais 99% de la population, la couverture 3G, dont les premiers services commerciaux ont débuté fin 2004  en France, ne couvriront encore que 70% de la population d'ici la fin 2008.


Objectif : accélérer le taux de couverture 3G et à moindre coût
Les investissements sont conséquents et le calendrier de couverture imposé lors de l'attribution des licences 3G est contraignant. L'accès à la bande 900 MHz va permettre d'accélérer ce déploiement et d'obtenir un taux de couverture supérieur à 98% ou 99% ( selon l'opérateur ) dès l'été 2009.

Si cette évolution faisait partie des plans des opérateurs mobiles, il fallait encore obtenir les autorisations à la fois sur le plan européen et sur le plan national. Des pilotes ont été lancés en 2006 pour évaluer la faisabilité et les risques d'interférences tandis que l'Europe cherchait à s'accorder sur les fréquences supplémentaires à offrir à la 3G.

Outre les bandes 900 et 1800 MHz, la question de la bande 2500 MHz était également à l'étude mais cette dernière, bien qu'offrant une réserve de fréquences supplémentaire, possède les mêmes atouts mais aussi les mêmes inconvénients que la bande 2100 MHz en matière de portée et de pénétration dans les habitations.

D'autre part, l'accès à la bande 900 MHz, pilier des réseaux 2G, ne pouvait être rendue accessible trop tôt à la 3G pour des raisons économiques et concurrentielles. Tant que les échanges en 3G n'atteignaient pas un volume critique, pas question de toucher à cette bande.


2007, année des décisions réglementaires
GSMA logo Ce n'est qu'en 2007 que les conditions ont été réunies pour envisager cette possibilité. La GSMA ( GSM Association ), association influente regroupant les principaux opérateurs mobiles dans le monde, s'est lancée dans une phase de lobbying auprès des régulateurs, pendant que ces derniers, dont l'Arcep en France, lançaient des consultations publiques pour recueillir les avis des acteurs du secteur des télécommunications.

En France, justement, la situation était un peu particulière ca il fallait envisager l'entrée éventuelle d'un quatrième opérateur mobile sur le marché et prévoir des réserves de fréquences à lui attribuer et restituables aux opérateurs historiques si aucun candidat ne venait à émerger.

Deux scénarios ont dont été imaginés par l'Arcep avec, dans le deuxième cas, une exploitation de la bande 900 MHz pour la 3G réalisable dès 2008. Le seul dossier présenté par le groupe Iliad ( Free ) pour l'obtention de la quatrième licence 3G n'ayant pas été retenu, l'Arcep a donc autorisé Orange et SFR, et Bouygues Telecom dans un second temps, à exploiter cette bande de fréquences.

Si un quatrième opérateur mobile faisait son entrée sur le marché français d'ici 2010, un plan de restitution de fréquences serait appliqué, lui permettant également de profiter de cette disposition.

La 3G en bande 900 MHz, pour quoi faire ?

Qu'apporte l'accès à la bande 900 MHz pour les réseaux 3G ? Il relève d'abord de ses propriétés physiques. Le signal transmis sur la fréquence 900 MHz porte plus loin que celui transmis sur la bande 2100 MHz à puissance d'émission comparable. A l'origine, la 3G ne devait servir qu'à couvrir les zones denses urbaines. Sa portée était donc un critère moins important que sa capacité à transmettre plus d'information.

D'autre part, le signal à 900 MHz présente une meilleure pénétration dans les habitations et possède donc des qualités de réception supérieures dans des environnements complexes faits d'obstacles à la diffusion. Assez rapidement, ce point a constitué un problème pour les réseaux 3G sur la bande 2100 MHz.

Les femtocellules ( femtocells 3G ), qui commenceront à être déployées en 2008 et plus largement en 2009, doivent répondre en partie à cette problématique en créant un mini-réseau 3G dans les bâtiments, garantissant ainsi une bonne réception et un accès aux services mobiles.

Ces deux éléments, portée et pénétration, sont essentiels pour fournir une couverture de la population au-delà des  centres urbains. L'un des facteurs du lent démarrage des services 3G est lié à la faible couverture initiale qui ne permettait pas d'utiliser son terminal 3G en dehors des centres-villes des grandes agglomérations.


Des coûts de déploiement et de maintenance abaissés
Si les opérateurs mobiles promettent des couvertures de l'ordre de 70% de la population fin 2008 ( hors Bouygues Telecom ), les trous sont encore nombreux, ce qui ralentit l'utilisation des services mobiles associés, source importante de revenus alors que ceux du trafic voix déclinent.

Pour les opérateurs, les avantages de l'utilisation de la bande 900 MHz pour la diffusion de leur réseau 3G sont économiques. Ces derniers peuvent en effet réutiliser les sites des stations de base 2G et les mêmes systèmes d'antennes déjà en place.


Sachant que la couverture 2G de la population se situe autour de 99%, il sera facile de compléter la couverture 3G à moindre frais à partir de ces sites. D'autre part, les propriétés physiques de la bande 900 MHz permettent de réduire significativement ( 60% ) le nombre de stations de base nécessaires pour une même zone de couverture.

Ainsi, pour assurer un débit de 384 Kbps ( débit de l'UMTS ) sur une zone de 10.000 km², il faut près de 2000 stations de base à 2100 MHz contre à peine plus de 600 en bande 900 MHz (Source : Elisa). Cela signifie également pour les opérateurs moins de dépenses énergétiques et d'entretien des sites.

Cette différence de coût de maintenance est estimée à un tiers, selon des données fournies par l'opérateur finlandais Elisa, premier au monde à lancer un réseau commercial UMTS 900 MHz fin 2007. Ces avantages peuvent permettre aux opérateurs GSM qui ne l'ont pas fait d'envisager de passer à la 3G à moindre coût. On pense notamment aux réseaux mobiles de pays émergents qui pourraient ainsi faciliter leur migration vers des réseaux haut débit.


Le problème des terminaux compatibles
Il reste toutefois un problème à régler, celui de la disponibilité des terminaux compatibles. Les téléphones portables actuels ne sont en effet pas en mesure de recevoir les signaux 3G sur la bande 900 MHz. Seul un mobile est compatible, le Nokia 6121 Classic, disponible depuis le mois d'octobre 2007 en quantité relativement limitée.

Cependant, les accords pris au niveau européen garantissent un élargissement rapide de l'offre, aussi bien au niveau des PC Cards et modem USB que des terminaux mobiles. Le support de l'UMTS900 devrait être un standard dans tous les téléphones 3G à partir de 2009.

Ces mobiles seront capables d'utiliser les réseaux GSM classiques, les réseaux 3G à 2100 MHz et l'UMTS900 et basculeront automatiquement vers le réseau approprié, de façon transparente. A noter que la 3G à 900 MHz sera en mesure de supporter les évolutions de type HSDPA ( High Speed Downlink Packet Access ) et donc le haut débit mobile correspondant.

Conclusion

Avec l'accès à la bande 900 MHz, les opérateurs vont pouvoir accélérer le déploiement de leur couverture 3G et obtenir en un an un résultat qu'il aurait fallu trois bonnes années à achever en suivant le schéma classique de déploiement de stations de bases UMTS 2100 MHz, tout en coûtant bien moins cher en installation comme en maintenance.

Cette couverture 3G accélérée va servir de support au décollage des services mobiles, constaté depuis mi-2007 et renforcé par l'arrivée de forfaits dits "illimités" qui sont un passage obligé pour une adoption de masse.

C'est donc toute une économie de la 3G qui devrait profiter de cette nouvelle disposition et qui aura la garantie d'être accessible sur l'ensemble du territoire national et non plus seulement au niveau des zones urbaines. Cela ne signifie pas la mort des réseaux GSM / EDGE, qui continueront à être améliorés mais cela peut être considéré comme un premier pas vers la transformation de la 3G comme standard de base, comme cela commence à être le cas dans certains pays asiatiques, du côté de la Corée du Sud ou plus récemment du Japon.

Certes, il faudra encore attendre l'arrivée de terminaux compatibles UMTS900 pour garantir l'exploitation de cette couverture étendue mais ils devraient être disponibles en nombre lorsque cette option sera disponible d'ici 2009.

Elisa logo Après l'opérateur finlandais Elisa, qui a lancé le premier réseau commercial UMTS900 dès novembre 2007, on devrait logiquement observer une migration des opérateurs GSM vers cette solution jugée garante d'économies pour ces derniers et profitable pour les utilisateurs.


Et la santé dans tout ça ?
Alors, tout est pour le mieux et sort gagnant de cette décision ? Pas tout à fait puisque certaines associations considèrent la décision de l'Arcep comme un véritable "cadeau financier"  fait aux opérateurs sans considération pour les éventuels problèmes de santé publique que pourraient engendrer les rayonnements magnétiques.

Priartem logo L'association Priartèm, par exemple, dénonce ainsi un usage de la bande 900 MHz qui va accroître l'exposition aux rayonnements des individus, étant donné que cette fréquence pénètre mieux à l'intérieur des bâtiments et qu'elle sera plus énergétique pour assurer de hauts débits de transmission.

Même si le ministère de la Santé reste sur une position neutre, à défaut d'une confirmation certaine d'un risque sanitaire par des études scientifiques, Priartèm relève plusieurs publications récentes évoquant un stress au niveau cellulaire pour de faibles champs électromagnétiques émis à 900 MHz.

Le débat sur les risques provoqués par les radiations électromagnétiques de faible intensité sur la santé est donc loin d'être clos.