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Associations et dons manuels : Témoins de Jéhovah

14 réponses
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droit_tj
Hello !

La Cour de Cassation a rendu ce mardi 5 octobre 2004 son arrêt dans
l'affaire Association Les Témoins de Jéhovah c/ Direction des Services
Fiscaux. Alors que la presse juridique s'est montré très critique
vis-à-vis de l'interprétation de la législation suivie par
l'administration fiscale, les juges de la juridiction suprême viennent
de confirmer la taxation à hauteur de 60 % des offrandes religieuses
reçues par l'Association les Témoins de Jéhovah, suivant ainsi les
arguments du Tribunal de grande instance de Nanterre (4 juillet 2000)
et de la Cour d'appel de Versailles (28 février 2002).

Rappel des circonstances qui ont conduit à ce redressement fiscal :

L'Association " Les Témoins de Jéhovah " a été soumise à un contrôle
fiscal d'une durée de 18 mois sur 1996-97, portant sur la période du
1er septembre 1992 au 31 août 1996, qui n'a relevé aucune irrégularité
et qui a conclu au caractère non lucratif de l'association. Selon
l'article 757 du Code général des impôts (CGI), les dons manuels ne
sont soumis aux droits de donation que lorsqu'ils font l'objet d'une
déclaration par le donataire (bénéficiaire du don) dans un acte soumis
à l'enregistrement, d'une reconnaissance judiciaire ou d'une
révélation à l'administration fiscale. À la suite de cette
vérification, la direction des services fiscaux des Hauts-de-Seine-sud
a estimé qu'en présentant sa comptabilité l'association a " révélé "
les dons manuels reçus entre le 1er janvier 1993 et le 31 août 1996 et
a donc décidé de les assujettir aux droits de mutation à titre
gratuit, c'est-à-dire à une taxe de 60 % (taux applicable aux
donations entre personnes non parentes, selon l'article 777 du CGI).
Aussi l'association religieuse a-t-elle reçu, en mai 1998, une
notification d'environ 45 millions d'euros, dont la moitié correspond
à la taxe, le reste étant constitué de pénalités (80 % du montant
réclamé) et d'intérêts.

Références juridiques disponibles sur cette page d'actualité :
http://www.geocities.com/droit_tj/actujuri.htm

Davy (droit_tj@yahoo.fr).

10 réponses

1 2
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Denis Redon
"À la suite de cette
vérification, la direction des services fiscaux des Hauts-de-Seine-sud
a estimé qu'en présentant sa comptabilité l'association a " révélé "
les dons manuels reçus entre le 1er janvier 1993 et le 31 août 1996 et
a donc décidé de les assujettir aux droits de mutation à titre
gratuit, c'est-à-dire à une taxe de 60 % (taux applicable aux
donations entre personnes non parentes, selon l'article 777 du CGI)."

Je n'ai pas très bien compris .. ca veut dire que les dons manuels pour une
association doivent restés dans une caisse noire, et ne pas apparaitre dans
la compta? Si mon association recoit des dons et qu'ils apparaissent dans sa
comptabilité, elle va devoir payer une taxe de 60% ??
Ca m'inquiéte pour mon association musicale... meme si pour l'instant
nous n'avons jamais eu de dons manuels! :-(((
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Emma
"Denis Redon" a écrit
Je n'ai pas très bien compris .. ca veut dire que les dons manuels pour


une
association doivent restés dans une caisse noire, et ne pas apparaitre


dans
la compta? Si mon association recoit des dons et qu'ils apparaissent dans


sa
comptabilité, elle va devoir payer une taxe de 60% ??
Ca m'inquiéte pour mon association musicale... meme si pour l'instant
nous n'avons jamais eu de dons manuels! :-(((



ça veut dire qu'au-delà d'une certaine somme ça devient suspect
Et les témoins de Jéhovah sont "assez" au-delà ... de cette certaine somme

Emma
--
pas de lezard pour me repondre
Avatar
chevalier b.
"Denis Redon"
Je n'ai pas très bien compris .. ca veut dire que les dons manuels


pour une
association doivent restés dans une caisse noire, et ne pas apparaitre


dans
la compta?



comme pour tout un chacun, les dons manuels sont taxables sur le
principe, en pratique, la taxation n'est possible qu'en cas de
révélation, soit spontanée (le bon contribuable remplit de lui-même
l'imprimé 2735), soit à la suite d'une demande d'information du fisc, (-
d'où viennent ces millions d'euros, de travail au noir ? - non M
l'inspecteur, d'un don manuel de mes parents. -dans ce cas, remplissez
moi l'imprimé 2735 ;) enfin troisième cas, de la révélation des dons
manuels dans un acte enregistré ou un jugement. Telle était sans doute
notre hypothèse.
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droit_tj
"Emma" wrote in message news:<41664a3e$0$17794$...

ça veut dire qu'au-delà d'une certaine somme ça devient suspect
Et les témoins de Jéhovah sont "assez" au-delà ... de cette certaine somme

Emma



Sur quel élément concret fondez-vous cette réflexion ?

Sachez que la modicité des dons n'est pas remise en question dans
cette affaire. Je n'ai pas encore pu consulter l'arrêt de la Cour de
cassation, mais les juges du fond en appel ont simplement retenu que "
la modicité du don ne suffit pas à exclure cette qualification de
libéralité ".

En moyenne, les dons effectués par les Témoins de Jéhovah aux
associations cultuelles locales et nationales ne dépassent pas 10
euros par personne. Ensuite, c'est sûr que si vous multipliez en
fonction des 200 000 fidèles et sympathisants, cela donne un chiffre
important à l'échelle d'un simple contribuable... Mais le financement
du culte des Témoins de Jéhovah n'est pas plus élevé que celui des
autres religions traditionnelles en France.

Davy.
Avatar
Matthaus
"Droit & TJ" a écrit dans le message de
news:
En moyenne, les dons effectués par les Témoins de Jéhovah aux
associations cultuelles locales et nationales ne dépassent pas 10
euros par personne.



10 EUR / personne et par jour?

Parceque si c'est 10 EUR / an, cette organisation et ses 100000 adeptes ne
vont pas aller loin...
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droit_tj
"Matthaus" wrote in message news:<41671365$0$6252$...
"Droit & TJ" a écrit dans le message de
news:
> En moyenne, les dons effectués par les Témoins de Jéhovah aux
> associations cultuelles locales et nationales ne dépassent pas 10
> euros par personne.

10 EUR / personne et par jour?

Parceque si c'est 10 EUR / an, cette organisation et ses 100000 adeptes ne
vont pas aller loin...



La moyenne était inférieure à 10 euros par mois et par personne.
J'avais effectivement oublié un élément important, la fréquence...

Davy.
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droit_tj
(Droit & TJ) wrote in message news:...
Hello !

La Cour de Cassation a rendu ce mardi 5 octobre 2004 son arrêt dans
l'affaire Association Les Témoins de Jéhovah c/ Direction des Services
Fiscaux.



L'arrêt est désormais consultable sur le site Légifrance. Je le
soumets ci-dessous à votre réflexion, avec les divers arguments
soutenus en défaveur de la taxation des dons manuels reçus par
l'association à but non lucratif (loi de 1901) en question.

Davy.
http://www.geocities.com/droit_tj/

----------

Cour de Cassation
Chambre commerciale


Audience publique du 5 octobre 2004 Rejet



N° de pourvoi : 03-15709
Publié au bulletin


Président : M. TRICOT



REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a
rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 février 2002), qu'au
cours de vérifications de comptabilité portant sur la période comprise
entre le 1er janvier 1992 et le 31 août 1996, l'administration des
Impôts a constaté que l'association "Les Témoins de Jéhovah"
(l'association) avait recueilli des sommes d'argent enregistrées dans
sa comptabilité, au titre des années 1993 à 1996, sous la désignation
d'"offrandes" et qualifiées par l'Administration de "dons manuels" ;
qu'elle a mis en demeure l'association de déclarer ces dons dans le
délai d'un mois ; qu'en l'absence de déclaration, l'administration des
Impôts, recourant à la procédure de taxation d'office, lui a adressé
une notification de redressement suivie d'un avis de mise en
recouvrement des droits, pénalités et intérêts de retard ; que sa
réclamation ayant été rejetée, l'association a fait assigner le
directeur des services fiscaux des Hauts-de-Seine devant le tribunal
de grande instance pour obtenir l'annulation de la notification de
redressement et de l'avis de mise en recouvrement au motif qu'il n'y
avait pas lieu à taxation sur le fondement de l'article 757, alinéa 2,
du Code général des impôts ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'association fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa
demande, alors selon le moyen, que constitue un traitement automatisé
d'informations nominatives tout ensemble d'opérations réalisées par
des moyens automatiques relatif à la collecte, l'enregistrement,
l'élaboration, la modification, la conservation et la destruction
d'informations nominatives ainsi que tout ensemble d'opérations de
même nature se rapportant à l'exploitation de fichiers ou bases de
données et notamment les interconnections ou rapprochements,
consultation ou communications d'informations nominatives ; que la
collecte à l'aide d'ordinateurs portables de données comptables
comportant la date de remise en banque, le nom du donateur et le
montant du don constitue un traitement automatisé, si bien qu'en
décidant le contraire à partir de considérations inopérantes, après
avoir cependant constaté la nature des opérations réalisées par
l'administration fiscale, la cour d'appel ne tire pas les conséquences
légales de ses constatations violant ce faisant l'article 5 de la loi
n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant constaté que les relevés des
versements des donateurs comportant leur nom, établis par
l'Administration au moyen d'ordinateurs portables, étaient la
transcription imprimée des documents papier remis par l'association à
seule fin de mise en forme des informations recueillies et d'édition
d'un document annexé à la notification du redressement à titre
d'information du contribuable sur les opérations concernées, ce dont
il résultait que l'utilisation des procédés informatiques par
l'Administration au cours de la procédure de vérification de
comptabilité n'avait pas porté atteinte aux intérêts du contribuable,
celui-ci disposant par ailleurs des moyens institués par la loi n°
78-17 du 6 janvier 1978 pour s'assurer du respect des dispositions
protectrices de ce texte, sa décision se trouve justifiée en l'état de
ce seul motif ; qu'il s'ensuit que la discussion relative à
l'existence d'un traitement automatisé d'informations nominatives est
inopérante ; que le moyen ne peut être acueilli ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses sept branches :

Attendu que l'association fait le même grief à l'arrêt, alors, selon
le moyen :

1 / que la donation se caractérise par un enrichissement corrélatif à
un appauvrissement ; qu'une association, soumise au principe de
spécialité de son objet statutaire, ne peut affecter ses ressources,
de quelque nature que ce soit, qu'à la seule réalisation de son objet,
ce dont il résulte que les transferts manuels de sommes d'argent à son
profit ne peuvent sauf circonstances particulières, nullement
caractérisées en l'espèce, constituer un enrichissement, mais
seulement permettre la réalisation de son objet ; d'où il suit qu'en
statuant comme elle le fait, après avoir constaté qu'en l'espèce les
sommes litigieuses avaient été remises à l'association "Les Témoins de
Jéhovah", qui ne pouvait -et ne devait- dès lors que les employer
conformément à ses statuts, la cour d'appel viole les articles 894 et
1105 du Code civil et 757 du Code général des impôts ;

2 / qu'en toute hypothèse, la modicité d'un transfert de valeur est de
nature à exclure la qualification de donation ; qu'en affirmant dès
lors de façon abstraite et péremptoire que "la modicité du don ne
suffit pas à exclure cette qualification de libéralité", sans autres
précisions la cour d'appel ne justifie pas légalement son arrêt au
regard des articles 894 et 1105 du Code civil, violés ;

3 / que, toujours en toute hypothèse, la modicité, ainsi que la
périodicité, des remises de fonds par les sociétaires ou
sympathisants, constitutives de ressources courantes pour une
association, emporte par nature leur affectation aux dépenses
courantes et au fonctionnement de l'association, exclusive de la
qualification de donation ; d'où il suit qu'en statuant comme elle l'a
fait, après avoir constaté que les sommes litigieuses étaient portées
sur un compte intitulé "offrandes" et que les fonds étaient recueillis
de façon régulière auprès des sociétaires et sympathisants sur
plusieurs années, la cour d'appel viole les articles 894 et 1105 du
Code civil et 757 du Code général des impôts ;

4 / qu'en statuant comme elle le fait, à l'aide d'une motivation
générale et abstraite, quasi-normative, cependant qu'il lui
appartenait pour justifier légalement son arrêt d'examiner chaque
opération qualifiée par l'administration fiscale de "donation" et de
caractériser dans chaque cas l'importance de la somme remise à
l'association par chaque donateur au regard de sa situation de fortune
et de ses revenus ; que faute de satisfaire à cette exigence, la cour
d'appel viole l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde
des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre
1950, 5 du Code civil et 455 du nouveau Code de procédure civile ;

5 / qu'il appartient à celui qui se prévaut d'un contrat à titre
gratuit de démontrer l'intention libérale qui ne peut se déduire de la
seule constatation d'un transfert de valeur d'un patrimoine dans un
autre ; qu'en se fondant dès lors sur la constatation d'un transfert
d'une chose mobilière de "la main à la main" pour en déduire que
l'exercice d'un culte auquel les donateurs entendaient contribuer "ne
peut suffire à caractériser la charge grevant un don et gommer
l'intention libérale qui anime à l'évidence les bienfaiteurs", la cour
d'appel présume l'intention libérale et renverse le fardeau de la
preuve en violation de l'article 1315 du Code civil ;

6 / qu'un avantage quelconque direct ou indirect, y compris une simple
satisfaction morale, est de nature à exclure toute intention libérale
; qu'en posant dès lors comme règle "que l'exercice d'un culte auquel
les donateurs entendraient contribuer ne peut suffire à caractériser
la charge grevant un don et gommer l'intention libérale qui anime à
l'évidence les bienfaiteurs", la cour d'appel ne justifie pas
davantage son arrêt et viole les articles 894 et 1105 du Code civil ;

7 / qu'en statuant comme elle le fait, à l'aide d'une motivation
générale et abstraite, quasi-normative, cependant qu'il lui
appartenait pour justifier légalement son arrêt d'examiner chaque
opération qualifiée par l'administration fiscale de "donation" et de
caractériser dans chaque cas l'existence d'une intention libérale
animant chaque donateur ; que faute de satisfaire à cette exigence, la
cour d'appel viole l'article 6-1 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4
novembre 1950, 5 du Code civil et 455 du nouveau Code de procédure
civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'article 6 de la loi du 1er
juillet 1901 relative au contrat d'association prévoit que toute
association régulièrement déclarée peut, sans aucune autorisation
spéciale, recevoir des dons manuels et que, dès lors, l'affectation à
la réalisation de l'objet statutaire de l'association des sommes
d'argent qui lui ont été remises n'est pas de nature à les priver de
cette qualification ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'il ne résulte ni de ses conclusions, ni
de l'arrêt, que l'association ait soutenu devant la cour d'appel qu'en
raison de leur périodicité, les sommes recueillies étaient affectées
par nature aux dépenses courantes et au fonctionnement de
l'association ; d'où il suit que le moyen, pris en sa troisième
branche, est nouveau et mélangé de fait et de droit, en ce qu'il
invite le juge à se prononcer sur la périodicité des versements
recueillis par l'association ;

Attendu, en troisième lieu, que l'article 894 du Code civil n'opérant
pas de distinction selon la valeur de la chose aliénée, la cour
d'appel a décidé, à bon droit, que la modicité des sommes données ne
suffisait pas à exclure la qualification de libéralité qui pourrait
leur être attribuée et n'était donc pas tenue de procéder à la
recherche inopérante visée par la quatrième branche du moyen ;

Attendu, enfin, que, répondant à l'association qui faisait valoir que
son budget était exclusivement constitué d'offrandes religieuses
consenties par les fidèles de la confession dont l'exercice du culte
était la contrepartie, la cour d'appel a relevé que les sommes
enregistrées par l'association dans sa comptabilité étaient des dons
manuels dont les auteurs étaient animés à son égard d'une intention
libérale que l'exercice d'un culte auquel ceux-ci entendraient
contribuer ne pouvait suffire à exclure ; que la cour d'appel a ainsi
considéré souverainement, sans inverser la charge de la preuve, que
l'intention libérale animant les donateurs était établie et légalement
justifié sa décision ;

D'où il suit qu'irrecevable en sa troisième branche, le moyen ne peut
être accueilli pour le surplus ;

Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que l'association fait le même grief à l'arrêt, alors, selon
le moyen :

1 / que la communication obligatoire de la comptabilité à
l'administration fiscale à l'occasion d'un contrôle ne constitue pas
une révélation par le donataire d'un don manuel à l'Administration au
sens de l'article 757 du Code général des impôts ; d'où il suit qu'en
décidant le contraire, la cour d'appel viole ce texte ;

2 / qu'en toute hypothèse, la comptabilité de l'association "Les
Témoins de Jéhovah" ne comportait aucune rubrique comportant
l'intitulé ou la revendication de la qualification de "don manuel", ce
que l'association soulignait en ce sens que le compte sur lequel les
sommes litigieuses étaient enregistrées était intitulé "offrandes", ce
qui était reconnu par l'administration fiscale ; d'où il suit que la
comptabilité de l'association ne comportait aucune révélation de
l'existence de dons manuels portée à la connaissance de
l'administration fiscale et qu'en décidant le contraire, la cour
d'appel méconnaît les termes du litige dont elle était saisie en
violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant énoncé que l'article 757, alinéa 2, du Code
général des impôts, qui prévoit que le don manuel révélé à
l'administration fiscale par le donataire est sujet au droit de
donation, n'exige pas l'aveu spontané du don de la part du donataire,
la cour d'appel, qui a retenu que le contribuable avait présenté au
vérificateur sa comptabilité, écrit émanant du donataire sur lequel se
trouvaient enregistrées des sommes d'argent qu'elle a qualifiées de
dons manuels, a décidé, à bon droit, que cette présentation par
l'association de sa comptabilité lors d'une vérification régulièrement
menée par l'administration fiscale, fût-elle la mise en oeuvre de
l'obligation légale d'établissement et de présentation des documents
comptables, valait révélation au sens de l'article 757, alinéa 2,
précité, abstraction faite des motifs surabondants visés par la
seconde branche du moyen ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses
branches ;

Sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que l'association fait le même grief à l'arrêt, alors, selon
le moyen :

1 / que les exigences d'un procès équitable imposent au juge qui
estime devoir forger sa conviction sur une pièce déterminée non
produite aux débats et dont la communication n'a été exigée par aucun
contradicteur, d'enjoindre à la partie concernée de produire cette
pièce et de procéder à la réouverture des débats pour permettre aux
parties de s'expliquer contradictoirement ; qu'en l'espèce, dans ses
conclusions du 7 janvier 2002, l'administration fiscale soutenait que
"l'exonération de l'article 795-10 du même Code est en revanche
subordonnée à une décision d'autorisation de recevoir des dons et legs
par l'autorité compétente, celle-ci s'imposant à l'administration
fiscale et au juge de l'impôt" et, après avoir constaté l'absence
d'autorisation, l'Administration concluait que "la situation de
l'association au regard des droits de mutation à titre gratuit n'est
que la conséquence de cette situation, de sorte que le débat de fond
sur le caractère cultuel ou non de l'association est étranger au
présent litige" ; qu'écartant ce moyen, la cour d'appel a estimé qu'il
lui appartenait d'apprécier le caractère cultuel de l'association pour
l'application de l'article 795-10 du Code général des impôts, mais a
rejeté tous les éléments de preuve fournis par l'association, lui
reprochant de ne pas avoir pris l'initiative de produire ses statuts
"condition première de la reconnaissance du statut d'association
cultuelle" ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il lui appartenait en
l'état des moyens dont elle était saisie d'ordonner la communication
des statuts de l'association "Les Témoins de Jéhovah" qu'elle estimait
déterminants pour la solution du litige, la cour d'appel ne satisfait
pas aux exigences de l'article 6-1 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4
novembre 1950, le procès n'étant pas à armes égales ;

2 / que toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience
et de religion ; que ce droit implique la liberté de manifester sa
religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en
public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et
l'accomplissement des rites ; que l'article 4 de la loi du 2 janvier
1907 prévoit que l'exercice d'un culte peut être assuré au moyen
d'associations régies par la loi de 1901 ; que l'article 795-10 du
Code général des impôts exonère de droit de mutation à titre gratuit
les dons et legs faits aux associations cultuelles ; qu'il appartenait
dès lors au juge judiciaire devant qui était revendiquée la qualité
d'association cultuelle, de s'assurer de la réalité de cette qualité
en faisant ordonner au besoin la production des pièces qu'il estimait
nécessaire, dès lors qu'elle était possible, ce qui était le cas des
statuts de l'association "Les Témoins de Jéhovah" ; qu'en statuant dès
lors comme elle le fait, la cour d'appel n'offre pas les garanties
nécessaires pour assurer l'effectivité de la liberté d'exercice d'un
culte et viole l'article 9 de la Convention européenne de sauvegarde
des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950
;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 795-10 du Code général des
impôts sont exonérés des droits de mutation à titre gratuit les dons
et legs faits aux associations cultuelles, aux unions d'associations
cultuelles et aux congrégations autorisées ;

Attendu que la cour d'appel ayant relevé, par un motif non critiqué,
que l'association ne justifiait pas d'une autorisation ministérielle
ou préfectorale contemporaine du fait générateur de l'imposition, est
inopérant le moyen pris de ce que le refus de reconnaître à
l'association la qualité d'association cultuelle ne pouvait être
décidé par la cour d'appel sans que soit préalablement ordonnée la
production des pièces de nature à établir cette qualité ; que le moyen
ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Et sur le cinquième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que l'association reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande
subsidiaire tendant à voir juger que l'administration fiscale avait
méconnu les dispositions de l'article 16 de la loi n° 96-316 du 12
avril 1996 prévoyant une réduction d'impôt de 25 % sur l'ensemble des
dons effectués par les donateurs âgés de moins de 75 ans et, en
conséquence, d'avoir rejeté sa demande d'annulation de la notification
de redressement et de l'avis de mise en recouvrement, alors, selon le
moyen :

1 / qu'il n'était nullement acquis que l'âge du donateur devait
s'apprécier pour les dons manuels révélés à la date de la déclaration
à la formalité de l'enregistrement, mais qu'il s'agissait seulement de
la position défendue par l'administration fiscale sur la base de
l'instruction 7-G-2-97 du 17 février 1997, publiée au bulletin
officiel des impôts n° 40 du 26 février 1997 ; d'où il suit qu'en s'en
remettant entièrement à l'interprétation faite par l'Administration de
la loi n° 96-314 du 12 avril 1996, la cour d'appel refuse d'exercer
les pouvoirs qu'elle tient des articles 4 du Code civil et 12 du
nouveau Code de procédure civile, violés ;

2 / qu'aucune disposition légale ne subordonne la réduction du taux
des droits dus sur une donation manuelle en vertu de la loi du 12
avril 1996 à la formalité d'une présentation à l'enregistrement d'une
déclaration du donataire, d'où il suit qu'en statuant comme elle le
fait, la cour d'appel viole les articles 15 et 16 de la loi n° 96-314
du 12 avril 1996 ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 790 du Code général des
impôts, dans sa rédaction issue des articles 15 et 16 de la loi du 12
avril 1996, que les donations bénéficiant de la réduction du taux
d'imposition prévue par ce texte en fonction de l'âge du donateur sont
celles consenties par actes passés à compter du 1er avril 1996 ; que,
dès lors, la cour d'appel a décidé, à bon droit, sans encourir les
griefs du moyen, que la réduction de droits ne pouvait profiter aux
dons manuels révélés qu'à la condition qu'ils aient fait l'objet d'une
déclaration présentée à la formalité de l'enregistrement et,
constatant qu'en l'espèce l'association avait refusé de procéder à
cette déclaration, qu'elle ne pouvait prétendre au bénéfice des
dispositions de l'article 790, précité ;

que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'association Les Témoins de Jéhovah aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la
demande formée par l'association Les Témoins de Jéhovah ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale,
financière et économique, et prononcé par le président en son audience
publique du cinq octobre deux mille quatre.
Avatar
chevalier b.
"Droit & TJ"

Merci de ce document, mais qu'en pensez vous ?.
Avatar
droit_tj
"chevalier b." wrote in message news:<41837d75$0$3673$...
"Droit & TJ"

Merci de ce document, mais qu'en pensez vous ?.



Je suis surtout surpris du décalage entre les commentaires de la
doctrine et la solution adoptée par la Cour de Cassation.

Par exemple, les juges n'ont pas retenu l'argument selon lequel la
modicité du don excluait la qualification de libéralité. Pourtant,
divers juristes allaient dans ce sens. Par exemple, le professeur
Nathalie Peterka, qui a consacré une thèse aux dons manuels,
expliquait :

" Il a été soutenu, au sujet des dispositions modiques, qu'elles ne
constituent pas des donations au motif que l'élément extra-causal de
la libéralité fait défaut. Alors que les dons manuels appauvrissent le
donateur et enrichissent le donataire, les dons modiques, tels que les
cadeaux d'usages ou les donations de fruits et de revenus,
n'enrichissent ni n'appauvrissent aucune des parties. Il en
résulterait que, toute donation supposant un enrichissement et un
appauvrissement corrélatifs, les dons minimes ne sont pas des
donations (19). [...] S'agissant des dons manuels consentis à
l'association « Les Témoins de Jéhovah », il n'est pas déraisonnable
de soutenir que la modicité de chacun d'entre eux pouvait être
présumée. Les critères formel et intentionnel - tenant à la forme de
la tradition, au caractère fréquemment anonyme des dons et à leur but
pieux et charitable - étaient incontestablement réunis. À ce titre,
l'association donataire méritait d'être exonérée de l'impôt. "
(Répertoire Defrénois, n° 01/02, pp. 10, 12, 13)

La plupart des auteurs avaient soutenu que la simple présentation de
la comptabilité lors du contrôle fiscal ne constituait pas une "
révélation " au sens de l'article 757 du CGI. En effet, en se référant
aux motivations du législateur, un tel acte doit être spontané, suite
à un choix délibéré de la personne de déclarer une entrée d'argent en
tant que don manuel.

Le moyen sur l'exonération prévue pour les assocations cultuelles est
plus discutable, car l'association en question était déclarée suivant
la seule loi de 1901. Le problème ne se pose d'ailleurs pas pour les
autres associations (locales et nationales) des Témoins de Jéhovah,
qui disposent de la grande capacité juridique des associations
cultuelles. En revanche, la distinction faite entre les associations
cutuelles et les autres en matière de libéralités pourrait être
défendue devant la Cour européenne des Droits de l'Homme. C'est ce que
peut laisser penser l'affaire Union des Athées contre France, jugée
recevable par la commission européenne et suivie d'une résolution,
commentée par Alain Garay dans la Gazette du Palais (mercredi 6, jeudi
7 février 2002, pp. 12-21).


Enfin, la question de l'application de la l'article 757 du CGI aux
personnes morales n'a pas été repris en cassation, alors que j'ai pu
lire dans divers commentaires juridiques, qui s'appuyaient sur
l'esprit de la loi, que seules les personnes physiques sont
concernées. Comme vous l'évoquiez dans un autre commentaire de ce fil
de dicussion, ce sont les contribuables, qui doivent déclarer leurs
revenus et l'origine de ceux-ci, qui étaient visés par cette
législation votée en 1992.

Et vous, qu'en pensez-vous ?

Cordialement,

Davy.

PS : J'indique mes sources ci-dessous :

Bulletin des Associations et Fondations, n° 31, septembre 2000, 254.
" Vers une taxation des dons manuels aux associations ? ", Xavier
Delsol, Juris Associations, n° 225, 1er octobre 2000, pp. 17, 38-44.
" La révélation des dons manuels ou l'apocalypse fiscale ", Michel de
Guillenchmidt, Revue de Jurisprudence Fiscale, décembre 2000, pp.
905-908.
Revue de Jurisprudence Fiscale, décembre 2000, pp. 977-980.
Bulletin Fiscal, décembre 2000, inf. 1250 et 1251, p. 684.
" Don manuel ", Louis Martin, La Semaine Juridique Notariale et
Immobilière, n° 1, 5 janvier 2001, pp. 24, 25.
" La liberté d'association menacée par Bercy ", Bruno Bélouis, Les
Échos, lundi 5 mars 2001, p. 69.
Droit & Patrimoine, n° 92, avril 2001, pp. 115, 116.
" Quelle arme fiscale contre les sectes ? ", Maurice-Christian
Bergerès, Revue de Droit Fiscal, n° 25, 2001, pp. 934-939.
" Jurisprudence - Enregistrement ", André Chappert, Répertoire
Defrénois, n° 18/01, pp. 1041-1047.
" L'imposition des dons manuels aux associations déclarées ", Nathalie
Peterka, Répertoire Defrénois, n° 01/02, pp. 3-19.
Bulletin des Associations et Fondations, n° 5, mars 2002.
" Dons manuels aux associations ", Xavier Delsol, Juris Associations,
n° 256, 1er avril 2002, p. 21.
" Dons manuels ", Maurice-Christian Bergerès, Revue de Droit Fiscal,
n° 16, 2002, pp. 680-683.
" La fiscalité des dons manuels aux associations : le syndrome de la
dilatation ? ", Noël Raimon, Associations - La lettre d'information de
la Société Générale, n° 16, avril 2002, pp. 1-6.
" De l'imposition des dons faits aux sectes ", Rédaction des Editions
Francis Lefebvre, Le Monde, dimanche 30 novembre, lundi 1er décembre
2003.
" Les associations cultuelles et l'article 757 nouveau du code général
des impôts ", Louis Martin, La Semaine Juridique Notariale et
Immobilière, n° 15, 9 avril 2004, pp. 652, 653.
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chevalier b.
"Droit & TJ"
Et vous, qu'en pensez-vous ?


J'en pense, premièrement que vous êtes étonnamment bien documenté,
deuxièmement que la thèse d'un professeur d'Université peut contenir des
erreurs, troisièmement, que la Cour de cassation peut également se
tromper ... et je pose la question bête : la position de la cour de
cassation est elle totalement exempte de parti pris contre le
contribuable incriminé ? (que le parti pris soit justifié ou non est une
autre question).
Bref, j'attends avant de me prononcer, et en tout cas, je vous remercie.
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