Depuis plus de dix ans, les Fire Tablet d’Amazon fonctionnent avec un système dérivé d’Android, connu sous le nom de Fire OS. Si cette stratégie avait pour but de pousser les utilisateurs vers l’écosystème du géant du e-commerce, elle a aussi limité la compatibilité d’applications et ralenti l’adoption auprès d’un public exigeant.
Désormais, avec le projet interne baptisé Kittyhawk, Amazon préparerait son premier modèle de tablette véritablement basé sur Android, attendu dès l’année prochaine. Un tournant qui illustre une évolution plus large dans la manière dont l’entreprise conçoit ses appareils, avec l'espoir de relancer les ventes.
Pourquoi Amazon fait évoluer ses Fire Tablet
Lancé en 2011, le dispositif de tablette d’Amazon visait avant tout à proposer une porte d’entrée abordable vers ses contenus numériques : livres électroniques, films ou musique. La stratégie reposait sur un prix attractif, parfois proche du coût de fabrication, afin de séduire les ménages et générer des revenus via les services.
Mais cette orientation a ses limites. Le Fire OS, version modifiée d’Android, s’éloignait trop du système original de Google. Résultat : les utilisateurs se plaignaient de ne pas pouvoir installer librement leurs applications préférées et les développeurs étaient contraints de créer une version distincte de leurs logiciels pour l’Appstore d’Amazon.
La montée en gamme prévue signale donc un changement de cap. Amazon chercherait à séduire des acheteurs plus exigeants, avec des performances supérieures et une compatibilité accrue, deux faiblesses reprochées à ses modèles actuels.
Kittyhawk, le projet secret en préparation
En coulisses, Amazon travaille depuis plusieurs années sur ce basculement. Le projet Kittyhawk, dont le nom rappelle la ville américaine des premiers vols motorisés des frères Wright, ambitionne d’introduire une nouvelle génération de tablettes, quitte à faire table rase de la logique précédente.
Selon des sources proches du dossier, la toute première version pourrait être commercialisée l’an prochain et fonctionnerait avec une base Android open source. Cette approche permettrait à Amazon de personnaliser l’interface tout en restant compatible avec le vaste catalogue d’applications disponibles.
L'Amazon Fire Phone, vous vous souvenez ?
L’idée n’est pas anodine. Elle marque une rupture avec une politique historique consistant à privilégier les solutions internes ou à investir dans des alternatives. On se souvient, par exemple, de l’échec du Fire Phone, inadapté aux attentes du marché et abandonné après un coût estimé à 170 millions de dollars.
Cependant, le projet n’est pas encore gravé dans le marbre. Les sources évoquent la possibilité d’un report, voire d’une annulation en cas de contraintes financières ou stratégiques.
Mais si Kittyhawk réussit, Amazon pourrait franchir une nouvelle étape et faire de ses tablettes un véritable concurrent face aux poids lourds que sont Apple et Samsung.
Un modèle plus cher, mais pensé pour rivaliser
Le futur Fire Tablet, attendu dès 2026, briserait une autre habitude de la marque : le prix. Selon les informations disponibles, Amazon envisagerait un tarif avoisinant les 400 dollars, soit près du double du Fire Max 11 actuel vendu 230 dollars. Ce positionnement ferait entrer l’appareil dans un segment dominé par l’iPad, dont les prix démarrent autour de 350 dollars.
Cet ajustement tarifaire laisse entrevoir un produit supérieur, probablement doté d’une meilleure autonomie, d’un écran de qualité renforcée et d’une puissance accrue.
Les détails techniques (mémoire, taille de l’écran, audio) n’ont pas encore filtré, mais l’objectif semble clair : proposer enfin une alternative crédible face aux tablettes haut de gamme de la concurrence.
En parallèle, Amazon développerait aussi une série de modèles plus accessibles basés sur un système appelé Vega, un OS inspiré de Linux et déjà présent sur certains Fire TV. Une façon de conserver une offre large, tout en travaillant sur son grand virage Android.
Un marché encore dominé par Apple et Samsung
Si Amazon occupe aujourd’hui la quatrième place du marché avec 8 % de présence, juste derrière Lenovo (8,2 %), la route reste longue face aux géants. Selon les données récentes du cabinet d'études IDC, Apple détient à lui seul 33,1 % du marché mondial, largement devant Samsung à 18,7 %.
Une tablette Amazon sous Android peut-elle réellement changer l’équilibre actuel ? Pour séduire, elle devra convaincre sur plusieurs points : la compatibilité avec toutes les applications Android, des performances supérieures aux modèles d'entrée de gamme habituels et un bon rapport qualité / prix.
Si ces conditions sont réunies, Amazon pourrait espérer dépasser Lenovo, actuellement au même niveau de ventes, et s’installer durablement en troisième position, voire grappiller davantage si ses services numériques (Prime Video, Kindle, Alexa) s’intègrent harmonieusement dans l’expérience utilisateur.
Amazon, une nouvelle stratégie plus ouverte ?
L'adoption d'Android reflète une posture plus ouverte d’Amazon vis-à-vis de technologies tierces. On le voit aussi à travers ses investissements dans l’intelligence artificielle, notamment avec Anthropic, dont le modèle Claude alimente désormais l’assistant Alexa+ et sert de base à de nouveaux outils internes.
Autrement dit, l’entreprise semble assouplir ses positions historiques pour répondre aux besoins d’un marché qui évolue vite. Cette flexibilité pourrait être une condition de survie dans un secteur technologique dominé par la rapidité des innovations.