Le 19 janvier 2038, à 3h14 du matin très précisément, une partie colossale du trafic ferroviaire pourrait s'arrêter net, victime d'une obsolescence programmée involontaire.

Ce n'est pas de la science-fiction, mais la conclusion d'un audit technique qui a viré à la guerre ouverte. Si rien n'est fait, c'est l'ensemble du réseau francilien qui risque le black-out total à cause d'une simple ligne de code mal pensée il y a des décennies.

Comprendre le bug : pourquoi tout va s'arrêter ?

Pour comprendre cette menace invisible, il faut plonger dans les entrailles de nos machines. La plupart des vieux systèmes informatiques calculent le temps en comptant les secondes écoulées depuis le 1er janvier 1970. Le problème, c'est que les architectures en 32 bits ont une capacité de stockage limitée. Une fois le plafond de 2 147 483 647 secondes atteint, le compteur déborde et repart en négatif, renvoyant la date en 1901.

Metro RATP

C'est ce qu'on appelle le "Bug POSIX" ou bug de l'an 2038. Pour un train moderne, c'est fatal : perte de géolocalisation, incohérence des données, plantage des systèmes de sécurité. Contrairement au bug de l'an 2000 qui relevait de la peur irrationnelle, celui-ci est une certitude mathématique absolue pour tout matériel non mis à jour vers des architectures 64 bits.

Alstom a-t-il vraiment caché la poussière sous le tapis ?

L'affaire a pris une tournure judiciaire le 13 novembre dernier. Le tribunal administratif de Paris a estimé que le constructeur Alstom avait "sciemment dissimulé" cette vulnérabilité lors de la livraison des rames. Le pot aux roses a été découvert presque par hasard lors d'une maintenance en 2017, lorsque des techniciens ont réalisé qu'il était impossible d'entrer une date postérieure à 2037 dans le système.

Métro parisien

La justice a tranché sévèrement : il s'agit d'un "vice caché". L'industriel français, qui a décidé de faire appel, se voit contraint de corriger le tir à marche forcée. Le plan de bataille est strict : un an pour l'audit, deux ans pour la solution technique. En cas de retard, les pénalités financières pourraient grimper jusqu'à un million d'euros par mois, une épée de Damoclès pour forcer l'action rapide.

Quelles lignes du réseau sont en danger de mort ?

L'ampleur du désastre potentiel donne le vertige. Ce n'est pas juste un vieux train de banlieue qui est concerné, mais une flotte massive livrée entre 1989 et 2014. La RATP a identifié des risques critiques sur neuf lignes de métro (dont les très fréquentées 1, 4 et 14), six lignes de tramway et surtout le RER A, l'artère vitale de l'Île-de-France.

Si la correction n'est pas déployée à temps, ces lignes de métro et de RER deviendraient simplement "impropres à l'usage". C'est une course contre la montre qui s'engage pour modifier le code ou remplacer le matériel embarqué avant la date fatidique, afin d'éviter que Paris ne se réveille un matin de janvier 2038 sans aucun transport en commun fonctionnel.

Foire Aux Questions (FAQ)

Quelle est la date précise du bug ?

Le bug se déclenchera très précisément le 19 janvier 2038 à 03:14:07 (heure universelle UTC). À cette seconde exacte, les horloges internes des systèmes 32 bits "déborderont" et afficheront une date située en décembre 1901.

Pourquoi ne pas avoir utilisé des systèmes 64 bits dès le départ ?

À l'époque de la conception de ces trains (années 90 et début 2000), les architectures 32 bits étaient la norme industrielle standard et moins coûteuse. Le problème de 2038 semblait alors être un horizon lointain, bien au-delà de la durée de vie estimée des équipements.

Le problème sera-t-il résolu à temps ?

La justice a imposé un calendrier strict : Alstom doit avoir déployé la correction sur l'ensemble du matériel impacté d'ici 2030. Avec les astreintes financières lourdes mises en place, la pression est maximale pour garantir la sécurité du réseau avant l'échéance.