Pour la première fois, des chercheurs du CERN ont observé la production simultanée d’un quark top, d’un boson W et d’un boson Z.

Cet événement, qui ne se produit qu’une fois tous les mille milliards de collisions, ouvre une nouvelle fenêtre sur les forces fondamentales de l'univers et pourrait révéler des failles dans le Modèle standard de la physique des particules.

Une aiguille dans une botte de foin cosmique

Au sein de l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire, mieux connue sous le nom de CERN, les équipes de la collaboration CMS (Compact Muon Solenoid) ont réalisé un véritable tour de force.

En analysant les données issues du Grand collisionneur de hadrons (LHC), ils ont isolé la signature d'un processus extraordinairement rare : la production tWZ. Cet acronyme désigne la création conjointe d'un quark top, la plus lourde des particules élémentaires connues, et de deux bosons, le W et le Z.

LHC CMS collisionneur

La probabilité d'un tel événement est infime, estimée à une chance sur mille milliards de collisions proton-proton. L'équipe du CERN compare elle-même cet exploit à la recherche "d'une aiguille dans une botte de foin de la taille d’un stade olympique".

Cette observation historique offre une occasion unique d'étudier les interactions entre le quark top et la force électrofaible, portée par ces deux bosons.

Le défi de distinguer le signal du bruit

Détecter ce phénomène n’était pas seulement une question de patience, mais aussi un immense défi technique. Le signal tWZ est en effet facilement masqué par un autre processus, bien plus fréquent, appelé ttZ.

Ce dernier, qui implique la création d'une paire de quarks top-antitop avec un boson Z, se produit environ sept fois plus souvent et génère un bruit de fond considérable qui complique l'identification de la signature recherchée.

LHC production tWZ

Pour surmonter cet obstacle, les scientifiques ont dû déployer des algorithmes de pointe basés sur l'apprentissage automatique (machine learning). Ces outils sophistiqués ont permis de trier des quantités colossales de données pour isoler avec une précision suffisante le fugace signal tWZ du bruit ambiant, confirmant ainsi son existence pour la toute première fois.

Une anomalie statistique ou l'aube d'une nouvelle physique ?

Au-delà de la prouesse technique, les premiers résultats contiennent une surprise de taille. Les mesures indiquent que le taux de production tWZ est légèrement plus élevé que ce que prédisent les théories actuelles du Modèle standard, ce cadre théorique qui décrit toutes les particules et forces fondamentales connues.

Cette divergence soulève une question cruciale : s'agit-il d'une simple fluctuation statistique, un hasard des probabilités qui s'estompera avec plus de données ? Ou bien pourrait-il s'agir du premier indice tangible d'une physique encore inconnue, au-delà de ce que nous comprenons actuellement ?

Les physiciens restent prudents, mais l'enjeu est immense. Si de nouvelles interactions ou particules étaient impliquées, l'écart entre la mesure et la prédiction théorique devrait s'accentuer à plus haute énergie.

Les prochaines campagnes d'expérimentation du LHC seront donc scrutées avec une attention redoublée pour déterminer si nous sommes à l'aube d'une nouvelle compréhension de l'univers.

Source : CERN