Une vaste zone de faiblesse dans le champ magnétique terrestre, l'Anomalie de l'Atlantique Sud, s'est étendue de manière significative depuis 2014. Les données des satellites Swarm de l'ESA révèlent une accélération de cet affaiblissement, augmentant les risques pour les technologies en orbite et offrant un nouvel aperçu de la dynamique complexe du noyau de notre planète.

Le champ magnétique terrestre est un bouclier invisible mais essentiel, nous protégeant des radiations cosmiques et des particules solaires. Généré par les mouvements du fer liquide dans le noyau externe de la planète, ce champ n'est pas uniforme. Depuis le 19e siècle, les scientifiques observent une zone de faiblesse persistante, baptisée l'Anomalie de l'Atlantique Sud (AAS).

Une expansion de la taille de l'Europe

Les données collectées sur onze ans par la constellation de satellites Swarm de l'Agence Spatiale Européenne (ESA) sont formelles. Entre 2014 et 2025, l'AAS s'est étendue d'une superficie équivalente à près de la moitié de l'Europe continentale.

champ magnetique terre 2025

Plus inquiétant encore, le rythme de son affaiblissement semble s'être accéléré depuis 2020, notamment dans sa partie orientale.

Plongée au cœur du mystère : que se passe-t-il sous nos pieds ?

Selon Chris Finlay, professeur à l'Université Technique du Danemark et auteur principal de l'étude, ce phénomène n'est pas monolithique. L'affaiblissement est particulièrement intense dans une zone se déplaçant vers l'Afrique.

L'explication résiderait dans des poches de flux inversé à la frontière entre le noyau externe liquide et le manteau rocheux. Dans cette région, une partie du champ magnétique, au lieu de s'échapper du noyau, y retourne de manière anormale, créant cette instabilité.

Quels sont les risques concrets pour nos technologies ?

Cette faille dans notre bouclier protecteur n'est pas sans conséquence. Les satellites traversant cette zone sont exposés à des doses de radiations bien plus élevées. Ces bombardements de particules peuvent provoquer des dysfonctionnements matériels, des pannes de communication, voire des blackouts complets pour les engins en orbite basse, y compris la Station Spatiale Internationale. La sécurité spatiale est donc directement concernée.

champ magnetique variation Canada Siberie

credit : ESA

L'étude de Swarm ne se limite pas à l'Atlantique Sud. Elle révèle une dynamique planétaire complexe. Tandis que la zone de forte intensité magnétique au-dessus du Canada a diminué d'une surface comparable à l'Inde, celle au-dessus de la Sibérie s'est renforcée, s'étendant sur une zone équivalente au Groenland.

Ce rééquilibrage est directement lié au déplacement du pôle Nord magnétique vers la Sibérie, un mouvement continu qui impacte les systèmes de navigation.

Les trois satellites de la mission Swarm, bien qu'ayant largement dépassé leur durée de vie initiale, continuent de fournir des données cruciales. Anja Stromme, responsable de la mission à l'ESA, espère pouvoir prolonger leurs observations au-delà de 2030. Ces informations seront vitales pour anticiper l'évolution de notre bouclier planétaire et comprendre les forces turbulentes qui animent le cœur de la Terre.