Oubliez la laine de verre et les panneaux de polystyrène. En Allemagne, une équipe de l'Université des sciences appliquées de Hof travaille sur une alternative radicale pour l'isolation des bâtiments : des panneaux "cultivés" à partir de réseaux de champignons.
Le projet, baptisé Mycobuild, promet un matériau de construction compostable, moins énergivore et capable de stocker du CO2. L'objectif est ambitieux : passer du laboratoire à une production industrielle d'ici mars 2026.
Comment transforme-t-on un champignon en panneau isolant ?
Le processus relève presque de l'agriculture. Les chercheurs préparent d'abord un substrat composé de résidus végétaux locaux, comme de la paille sèche. Ils y inoculent ensuite le mycélium de champignon d'une espèce sélectionnée, par exemple le pleurote, pour sa croissance rapide et sa robustesse.
En l'espace de quelques jours, le réseau fongique se propage et tisse sa toile à travers le substrat, l'agglomérant jusqu'à former un composite solide et léger. La dernière étape consiste à sécher et chauffer le panneau pour stopper la croissance du champignon et stabiliser la structure. Le résultat est un isolant produit avec très peu d'énergie.
Quels sont les principaux défis techniques à surmonter ?
Le plus grand défi est d'ordre biologique. La culture du mycélium est extrêmement sensible à la contamination : la moindre bactérie ou moisissure indésirable peut ruiner une production entière, ce qui impose des conditions de travail parfaitement stériles.
L'autre enjeu, et non des moindres, est de rassurer les futurs consommateurs. Pour répondre à cette inquiétude, un revêtement minéral protecteur est appliqué en surface, le rendant plus résistant à l'humidité et plus solide.
Cette couche de protection, développée avec un partenaire industriel, est la clé pour éviter tout risque de moisissure une fois l'isolant installé dans un mur.
Cette technologie est-elle une véritable solution d'avenir ?
Sur le papier, les avantages sont énormes et pourraient redéfinir la construction durable. Le matériau est entièrement compostable en fin de vie, il stocke du CO2 au lieu d'en émettre et valorise des déchets agricoles. Mieux encore, les espèces de champignons choisies, comme le pleurote, peuvent pousser à température ambiante, réduisant encore davantage la facture énergétique de la production.
Le succès du projet dépendra désormais de la capacité à industrialiser le processus pour produire ces panneaux en grande quantité et à des coûts compétitifs face aux matériaux traditionnels. Si cet obstacle est franchi, cela pourrait marquer un vrai tournant pour le bâtiment écologique.
Foire Aux Questions (FAQ)
Ce type d'isolant est-il sûr pour la santé ?
Oui. Une fois que le panneau a atteint la forme désirée, il est chauffé pour "inactiver" le champignon, ce qui signifie qu'il n'est plus un organisme vivant. Le revêtement minéral ajouté en surface est conçu pour le rendre résistant à l'eau et empêcher tout risque de développement de moisissures à l'intérieur de la maison. Les tests en cours visent à garantir qu'il respecte toutes les normes de sécurité du bâtiment.
Quels types de champignons sont utilisés pour cette production ?
Les chercheurs privilégient des espèces de champignons natives, locales, et robustes qui n'ont pas besoin de conditions de température ou de chauffage spécifiques. Le pleurote (oyster mushroom) est particulièrement cité comme un excellent candidat, car il se développe rapidement et crée un réseau de mycélium dense et solide. D'autres espèces, comme le polypore géant, sont également étudiées.
Quand pourra-t-on acheter ces panneaux isolants en champignon ?
Le projet de recherche "Mycobuild" a pour objectif de démontrer la faisabilité d'une production à l'échelle industrielle d'ici mars 2026. Si les tests sont concluants et que la production de masse est lancée, les premiers produits commerciaux pourraient apparaître sur le marché dans les années qui suivent, mais il est encore trop tôt pour avancer une date de commercialisation précise.