Dès sa mise à disposition pour le public, l'agent conversationnel ChatGPT a immédiatement attiré des millions d'utilisateurs. Sa façon de répondre aux requêtes en langage naturel et de façon argumentée et ses possibilités d'automatisation de nombreuses tâches jusqu'à en faire un soutien (ou un remplaçant selon les cas) dans les métiers d'écriture, en ont fait une sorte de dieu surgi de nulle part et capable de transformer l'utilisation d'Internet, dans le bon comme dans le mauvais sens (triche, fake news...).

L'intelligence artificielle d'OpenAI est-elle donc ce démiurge vanté par les médias et exploré par tout-un-chacun ? En fait non, explique Yann LeCun, grand spécialiste français de l'intelligence artificielle et responsable du département IA de Meta.

D'un point de vue technique, ChatGPT n'a rien d'extraordinaire et "n'est pas particulièrement innovant", indique-t-il ainsi à ZDNet. Malgré ses réponses concises et ses talents rédactionnels, le deep learning utilisé en coulisses est connu depuis longtemps et utilisé dans bien d'autres intelligences artificielles.

Une avancée collective, pas individuelle

Yann LeCun tord également l'idée selon laquelle OpenAI a une avance spécifique en la matière. GPT-3, le système conversationnel derrière ChatGPT, utilise des briques provenant de nombreux acteurs et issus de travaux menés depuis des dizaines d'années.

Il reste que ce type de robot conversationnel peut impressionner par sa précision et donner la sensation d'un esprit ou d'une conscience. Le même problème était apparu il y a quelques mois avec l'agent conversationnel LaMDA de Google, certains affirmant y avoir perçu une conscience de soi.

Sans vouloir rabaisser les qualités de ChatGPT, le spécialiste de l'IA note qu'il n'y a pas là de percée majeure en matière d'intelligence artificielle ni d'avancée technique particulière d'OpenAI par rapport à d'autres entreprises travaillant sur le même sujet, malgré la perception inverse que peut en avoir le public.

Il évoque ainsi l'utilisation des concepts de transformeurs, une technique de deep learning proposée par Google en 2017 mais résultant de travaux antérieurs sur le deep learning mais aussi d'apprentissage par rétroaction humaine pour optimiser les résultats, utilisé initialement par DeepMind.

Les grands groupes vont devoir réagir

Et si des entreprises comme Google et Meta n'ont pas présenté d'agents conversationnels proches de ChatGPT, c'est peut-être bien parce qu'ils ne le souhaitent pas et que cela ne s'accorde pas avec leurs projets du moment.

OpenAI a tout intérêt à attirer l'attention du public et des investisseurs pour obtenir des financements (et tant pis pour les effets adverses non maîtrisés) alors que les grands groupes ne peuvent pas se permettre d'écorner leur image de marque avec un produit inabouti.

Après le coup d'éclat de la mise à disposition de ChatGPT auprès du public, la question du modèle économique est d'ailleurs à l'étude avec un abonnement donnant accès à des fonctionnalités avancées et un traitement privilégié des requêtes.

Il reste que les capacités de ChatGPT ne passent pas inaperçues et que ces mêmes groupes vont sans doute devoir accélérer leurs plans sous peine de manquer le train en marche.

Source : ZDNet