Malgré des retards importants dus à des tests avortés en 2023, la première unité de l'US Army recevra l'intégralité de sa dotation en munitions du système d'arme hypersonique à longue portée, surnommé "Dark Eagle", d'ici la fin décembre 2025.
Cette étape cruciale concrétise l'ambition américaine de disposer rapidement d'une capacité opérationnelle face aux avancées chinoises et russes.
Cette livraison marque un tournant majeur pour le programme. Elle survient après une période d'attente prolongée, la dotation complète étant initialement prévue pour l'automne 2023.
Les huit derniers missiles, qui constituent la charge de base de la première batterie, devraient être livrés d'ici fin décembre, après l'acceptation du quatrième missile chez Lockheed Martin en Alabama. Une fois cette étape franchie, le travail commencera immédiatement pour une deuxième batterie.
Les contretemps d'un programme développé dans l'urgence
Les retards de déploiement, s'étalant sur près de deux ans, sont directement liés à une série de tests en vol avortés. Ces incidents, causés par des problèmes de portée ou des pannes lors de la phase de préparation au lancement, ont imposé à l'Army de revoir ses protocoles. Pour un système aussi complexe et rapide, le moindre accroc dans les procédures de tir ou les vérifications de sécurité est rédhibitoire.
Le développement typique d'un missile balistique prend souvent une décennie, voire davantage. Le programme Dark Eagle, lui, n'en est qu'à peine au-delà de sa cinquième année. Cette célérité est motivée par les avancées rapides de la Russie et de la Chine dans le domaine des missiles hypersoniques qui laissaient les Etats-Unis en retrait.
Les responsables américains ont souligné que malgré le ralentissement provoqué par les incidents de parcours, ce rythme est toujours considéré comme extrêmement agressif compte tenu de la complexité technologique en jeu.
Un succès décisif est survenu en mai 2024. L'US Army a mené un test en vol "de bout en bout" réussi de son missile hypersonique sur son site d'essai à Hawaï. Cette validation complète du système a définitivement ouvert la voie à la livraison imminente des munitions de combat.
Un planeur hypersonique et imprévisible
Le Long-Range Hypersonic Weapon (LRHW), connu sous le nom de Dark Eagle, est un système mobile, conçu pour être lancé depuis un camion. Sa capacité de frappe à longue portée atteint environ 2700 kilomètres, selon les sources. Cette portée inédite pour une arme terrestre change considérablement l'équation stratégique de la projection de puissance.
L'arme se compose d'un propulseur à deux étages qui sert à lancer un planeur hypersonique. Ce dernier est la composante clé : il est capable de voler à plus de Mach 5 (cinq fois la vitesse du son), tout en manœuvrant de manière imprévisible.
C'est cette combinaison de vitesse extrême et d'agilité qui rend son interception par les défenses anti-missiles actuelles extrêmement difficile, voire impossible.
Vers la production de masse
Si la première batterie est bientôt complète, la suite du programme ne sera pas de tout repos. Le passage d'un prototype complexe à une production de masse fiable et répétable pose des défis quotidiens aux ingénieurs.
Des défauts de qualité sont régulièrement détectés lors des inspections, notamment lors de l'assemblage de l'étage de propulsion avec la section médiane du missile, imposant une vigilance particulière et des délais dans la fabrication.
Cette accélération du programme des missiles hypersoniques américains s'inscrit dans le cadre de la course à l'armement hypersonique globale. Les États-Unis sont engagés dans une compétition de haute intensité avec la Chine et la Russie, qui ont déjà testé et parfois déployé leurs propres systèmes hypersoniques.
La mise en service du Dark Eagle n'est donc pas seulement une étape technique, mais un signal stratégique fort indiquant que l'ère des hypersoniques sur le champ de bataille approche à grands pas.
Le défi majeur demeure : continuer à pousser le rythme de production tout en assurant une qualité irréprochable pour chaque missile complexe sorti d'usine, rapportent les médias spécialisés.
Dans le même temps, les Etats-Unis veulent se donner les moyens de contrer des attaques par missiles hypersoniques sur leur territoire grâce à des réseaux de surveillance terrestre et satellite et de moyens d'interception qui devront justement déjouer la grande manoeuvrabilité des planeurs.