C'est un désaveu cinglant pour l'un des programmes d'armement les plus attendus de ces dernières années. Après des années de retards et de difficultés techniques, le drone MALE (Moyenne Altitude Longue Endurance) Patroller de Safran vient de subir un coup d'arrêt majeur.
Dans le projet de loi de finances 2026, le Ministère des Armées a discrètement acté la réduction de moitié de sa cible, confirmant les doutes grandissants sur la pertinence de ce drone dans un conflit de haute intensité.
Pourquoi ce programme est-il remis en question ?
Le projet, serpent de mer de l'armement français, accumule les déconvenues depuis sa notification à Safran en 2016. Initialement prévues pour 2018, les livraisons n'ont réellement commencé qu'en 2024, plombées par des problèmes techniques, dont la défaillance d'un calculateur de vol d'origine américaine. Le programme, qui devait doter l'armée de Terre d'un drone tactique moderne, s'est transformé en chemin de croix industriel.
Mais ce sont surtout les leçons tirées des conflits récents qui ont scellé son sort. L'appareil, qui n'est toujours pas déclaré pleinement opérationnel, semble déjà dépassé avant même d'avoir fait ses preuves.
Le drone Patroller est-il inadapté à la guerre moderne ?
La raison principale de ce revirement est brutale : le retour d'expérience (RETEX) de la guerre en Ukraine. Les experts militaires sont formels : dans un conflit de haute intensité, le Patroller ne survivrait que quelques minutes. Décrit comme une "antenne volante", ce drone de 1,5 tonne est jugé trop lent, trop gros et trop peu furtif. Il émet en continu des signaux qui le rendent facilement repérable et vulnérable aux systèmes de brouillage et de défense anti-aérienne qui saturent les champs de bataille modernes.
S'il reste potentiellement utile dans des conflits asymétriques, où la menace est moindre, il n'est clairement plus adapté aux guerres du futur, qui privilégient des drones plus petits, plus rapides, moins chers ou agissant en essaim.
Quelles sont les conséquences de cette décision ?
Plutôt que d'annuler purement et simplement le programme, ce qui aurait été un camouflet industriel et financier total, le ministère a donc "tranché la poire en deux" : l'armée de Terre recevra bien les 14 premiers drones de la tranche initiale, dont la livraison doit s'achever en 2026. En revanche, la commande des 14 appareils supplémentaires, pourtant inscrite dans la Loi de Programmation Militaire 2024-2030, est purement et simplement annulée.
Cette décision permet de sauver la face et de ne pas compromettre les quelques succès à l'export du Patroller (Grèce, Vietnam). Mais c'est un signal très clair envoyé à l'industrie : l'heure est à la réévaluation des besoins, et la France explore déjà de nouvelles pistes, incarnées par des projets plus agiles et innovants comme le drone Aarok de Turgis & Gaillard.
Foire Aux Questions (FAQ)
Qu'est-ce qu'un drone MALE ?
MALE est l'acronyme de "Moyenne Altitude Longue Endurance". Il s'agit d'une catégorie de drones capables de voler à des altitudes comprises entre 3 000 et 8 000 mètres pendant de longues durées (généralement plus de 20 heures), principalement pour des missions de surveillance, de renseignement et de reconnaissance.
Combien de drones Patroller l'armée de Terre recevra-t-elle au final ?
L'armée de Terre recevra un total de 14 drones Patroller, au lieu des 28 initialement prévus par la Loi de Programmation Militaire 2024-2030. La commande a été réduite de moitié.
Le programme Patroller est-il complètement annulé ?
Non, le programme n'est pas totalement annulé. Le contrat initial portant sur les 14 premiers drones est maintenu et les livraisons se poursuivront jusqu'en 2026. C'est la commande additionnelle de 14 drones supplémentaires qui a été annulée.