Le futur énergétique de la France se joue maintenant et il a un prix. Le géant énergétique a validé un devis révisé pour la construction de six nouveaux réacteurs nucléaires de type EPR2.
La facture maximale atteint désormais 72,8 milliards d'euros, une somme bien supérieure aux 51,7 milliards initialement estimés en 2022. C'est le chantier industriel du siècle, mais il est confronté à un double défi : maîtriser ses coûts et s'assurer qu'il y aura bien une demande pour toute cette électricité.
Pourquoi une telle explosion des coûts ?
Cette révision spectaculaire n'est pas une surprise totale. Le montant de 72,8 milliards d'euros est présenté par la direction comme un "prix plafond". L’idée est simple : intégrer une provision conséquente pour les risques et les aléas inhérents à un projet de cette ampleur. L'énergéticien veut à tout prix éviter les déboires des chantiers précédents, comme ceux de Flamanville en Normandie ou d'Olkiluoto en Finlande, devenus des symboles de retards et d'explosion du coût.
Pour tenir ses promesses, l'entreprise mise sur un "effet de série" et sur l'expérience acquise, notamment sur le chantier britannique d'Hinkley Point C. L'objectif est de réduire les dépenses de 30% entre le premier réacteur de Penly et le dernier de Bugey, pour viser à terme une électricité compétitive autour de 70 euros le MWh, un seuil jugé essentiel pour les consommateurs et l'industrie française.
Le calendrier est-il tenable ?
Face à ce défi financier, EDF s'est engagé sur un calendrier précis. Le premier béton "nucléaire" pour le premier réacteur sur le site de Penly est attendu pour mars 2029, avec une mise en service espérée en 2038. Le groupe estime qu'il lui faudra 88 mois pour construire la première paire de réacteurs, un délai ambitieux qui nécessitera une mobilisation sans précédent de toute la filière.
Cependant, la décision finale d'investissement pour le programme EPR2 n'est pas attendue avant fin 2026. D'ici là, le devis prévisionnel sera soumis à un audit de la Délégation interministérielle au nouveau nucléaire (DINN). Le plan de financement, particulièrement complexe, repose sur un prêt bonifié par l'État et des contrats à long terme pour sécuriser les revenus.
Quel est le plus grand risque pour le projet ?
Le vrai danger ne vient peut-être pas du chantier lui-même, mais de l'extérieur. Le gestionnaire du réseau électrique français, RTE, a tiré la sonnette d'alarme. Pour que ces investissements massifs dans le nucléaire et l'éolien en mer soient pertinents, la demande d'électricité de la France doit augmenter massivement. RTE projette une consommation de 580 TWh par an à l'horizon 2050, contre 442 TWh en 2024.
Si la décarbonation du pays est trop lente, notamment sur le parc de voitures électriques, la production d'hydrogène ou les besoins industriels, la consommation électrique stagnera. Dans ce scénario, la production des centrales devrait être modulée à la baisse, augmentant son coût complet et rendant les nouveaux projets économiquement intenables. Le gouvernement est donc face à un impératif : prendre des mesures fortes pour accélérer l'électrification des usages.
Foire Aux Questions (FAQ)
Quel est le coût final des six réacteurs EPR2 ?
Le coût maximal prévisionnel a été fixé à 72,8 milliards d'euros par EDF. Il s'agit d'un "prix plafond" qui inclut une marge pour les risques et les aléas potentiels du chantier.
Quand le premier réacteur EPR2 sera-t-il mis en service ?
EDF vise une mise en service de la première unité sur le site de Penly en 2038, après un début de construction du bâtiment réacteur prévu pour mars 2029.
Pourquoi la consommation électrique est-elle un enjeu pour ce projet ?
Selon RTE, si la consommation électrique française n'augmente pas fortement, la production massive des nouveaux réacteurs nucléaires ne sera pas absorbée. Cela rendrait l'investissement moins rentable et pourrait même remettre en question la construction des derniers réacteurs du programme.