C'est un jalon attendu depuis plus d'une décennie. Le réacteur EPR de Flamanville 3, en Normandie, a enfin atteint sa pleine capacité ce dimanche 14 décembre 2025 à 11h37. L'annonce, faite par EDF, marque la fin d'une très longue phase de tests et le début d'une nouvelle ère, non sans défis, pour le nucléaire français.
Ce succès symbolique, obtenu après le feu vert de l'Autorité de sûreté nucléaire, intervient au terme d'un chantier devenu tristement célèbre pour ses déboires, ses retards et une explosion des coûts.
Comment s'est déroulée cette montée en puissance ?
L'opération s'est déroulée quelques jours seulement après l'autorisation délivrée par l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR). Cette étape, cruciale pour le réacteur EPR, permet de réaliser des tests à pleine puissance sur l'ensemble des matériels. L'objectif est simple : vérifier que tout fonctionne comme prévu avant une exploitation commerciale durable. Le réacteur a ainsi produit 1 669 MW de puissance électrique brute, une performance qui le place comme le plus puissant du parc français.
Cette phase de démarrage n'est pas encore terminée. Dans les semaines à venir, la puissance nucléaire du réacteur sera amenée à varier pour poursuivre les essais à différents paliers de puissance. Une intervention technique est également prévue sur un poste électrique interne, mais EDF a précisé qu'elle serait réalisée sans avoir à déconnecter le réacteur du réseau. Un signe de la confiance des équipes dans la stabilité de l'installation.
Quel est le véritable coût de ce succès ?
Ce succès technique ne peut occulter le parcours chaotique du projet. Le chantier de Flamanville est devenu le symbole des difficultés de la filière nucléaire, avec un retard de 12 ans sur le calendrier initial. La facture, elle, a littéralement explosé. Estimée à 3,3 milliards d'euros en 2007, elle est aujourd'hui évaluée par la Cour des Comptes à près de 24 milliards d'euros. Une dérive financière colossale qui pèse lourdement sur les comptes de l'énergéticien.
Malgré tout, cette mise en service est vitale pour la France. Il s'agit du premier réacteur nucléaire à démarrer depuis 25 ans et d'une pièce maîtresse de la stratégie de relance du nucléaire voulue par l'exécutif. Avec sa capacité à alimenter près de deux millions de foyers, l'EPR est indispensable pour assurer la souveraineté énergétique du pays et atteindre les objectifs de décarbonation. C'est aussi un test de crédibilité pour les futurs projets de réacteurs EPR2.
Quels sont les prochains défis pour Flamanville 3 ?
L'atteinte de la pleine puissance n'est pas la fin de l'histoire, loin de là. Un arrêt programmé et de longue durée est déjà dans les tuyaux. Le réacteur devra être mis à l'arrêt le 26 septembre 2026 pour une période de 350 jours. C'est un nouveau test majeur pour EDF, qui devra prouver sa capacité à tenir des délais stricts. Cette interruption est obligatoire pour réaliser la première visite complète de l'installation, un check-up de sûreté, mais surtout pour procéder au changement du couvercle de la cuve.
Cette opération s'annonce complexe et mobilisera 2 500 personnes et 200 partenaires industriels. C'est une nouvelle course contre la montre pour l'énergéticien. La capacité d'EDF à mener cette maintenance géante dans les temps sera scrutée de près, car elle conditionnera la fiabilité à long terme du réacteur et, par extension, la crédibilité de toute la filière EPR française à l'international.
Foire Aux Questions (FAQ)
Quelle est la puissance exacte de l'EPR de Flamanville ?
Le réacteur a atteint une puissance électrique brute de 1 669 MW. Sa puissance nette, c'est-à-dire celle injectée dans le réseau après déduction de la consommation interne de la centrale, est légèrement inférieure mais doit permettre d'alimenter environ deux millions de foyers français.
Pourquoi le réacteur doit-il déjà s'arrêter en 2026 ?
Cet arrêt planifié est une exigence réglementaire de sûreté. Il s'agit de la première "visite complète" qui doit intervenir au plus tard 30 mois après le chargement du combustible. Elle permettra une inspection détaillée et, surtout, le remplacement du couvercle de la cuve du réacteur, une opération complexe prévue de longue date.
Ce réacteur est-il le seul de ce type dans le monde ?
Non, d'autres réacteurs EPR sont déjà en service, notamment en Chine (Taishan 1 et 2) et en Finlande (Olkiluoto 3). Deux autres exemplaires sont également en cours de construction au Royaume-Uni, sur le site de Hinkley Point.