L'Agence Spatiale Européenne (ESA) étudie sérieusement l'intégration des insectes dans l'alimentation des astronautes. Résistants, nutritifs et économes en ressources, ils pourraient constituer une source de nourriture durable pour les missions de longue durée, s'appuyant sur des décennies de recherche en microgravité.
L'histoire de la conquête spatiale est jalonnée de héros inattendus. Dès 1947, bien avant les premiers pas de l'homme sur la Lune, des mouches du vinaigre ont été les premières créatures vivantes à atteindre l'espace et à en revenir saines et sauves.
Cette expérience, initialement conçue pour étudier les effets des radiations, a involontairement posé les bases d'une question aujourd'hui cruciale pour l'avenir des missions habitées lointaines.
Des survivants nés pour l'espace ?
Les insectes ont démontré une capacité d'adaptation remarquable à l'environnement spatial. Des études menées depuis les années 1940 montrent que la microgravité ne perturbe que très peu leur développement ou leur comportement.
Un habitat à insectes pour l'espace (credit : ESA)
Comme le souligne Åsa Berggren, professeure à l'Université suédoise des sciences agricoles, ces créatures "supportent plutôt bien les contraintes physiques" de l'espace.
De la mouche du vinaigre, capable d'accomplir son cycle de vie complet en orbite, aux fourmis qui s'adaptent pour se déplacer, les preuves de leur robustesse s'accumulent.
Une solution nutritionnelle et durable
Au-delà de leur résistance, les insectes représentent une source de protéines incroyablement efficace. L'équipe de chercheurs européens rassemblée par l'Agence Spatiale Européenne (ESA) met en avant leur capacité à convertir des matières que les humains ne peuvent pas consommer en nourriture riche.
Ils sont une excellente source de protéines, d'acides gras, de fer et de vitamines. Sur Terre, le grillon domestique et le ver de farine sont d'ailleurs déjà autorisés à la consommation humaine par l'Autorité européenne de sécurité des aliments depuis 2023, ouvrant la voie à une acceptation plus large.
Vers des fermes d'insectes en orbite ?
L'objectif à long terme n'est plus seulement d'envoyer des insectes dans l'espace, mais bien de les y élever. La mise en place de fermes autonomes à bord des vaisseaux ou des stations spatiales est une perspective sérieusement envisagée.
Ces systèmes d'élevage nécessiteraient peu d'espace et de ressources, un avantage considérable pour des missions vers Mars. Les grillons, par exemple, requièrent douze fois moins de nourriture que le bétail pour produire la même quantité de protéines.
L'astronaute de l'ESA Samantha Cristoforetti a d'ailleurs déjà emporté une barre de céréales à la farine de grillon lors de sa mission en 2022, un premier pas symbolique et concret.
Cependant, le tableau reste incomplet. De nombreuses données existantes sont anciennes et les expériences ont souvent été trop courtes pour observer plusieurs générations en microgravité.
L'ESA prépare donc de nouvelles études pour analyser en détail les effets de l'environnement spatial sur la reproduction et la qualité nutritionnelle des insectes. La question n'est plus de savoir s'ils peuvent survivre là-haut, mais comment optimiser leur élevage pour soutenir l'humanité dans sa prochaine grande étape d'exploration.