Avec la mondialisation, l'Europe a largement fait appel à des approvisionnements de matières premières venues d'autres zones géographiques. Mais à l'heure des tensions géostratégiques où même les anciennes alliances sont mises à mal, l'heure est à la reprise en main des ressources locales et à la souveraineté des approvisionnements.

Très dépendante de la Chine pour de nombreux matériaux stratégiques entrant dans la production des composants électroniques et des batteries de véhicules électriques, l'UE cherche maintenant à regagner une certaine indépendance.

La Commission européenne a dévoilé la liste de 47 sites stratégiques dans toute l'Europe dont l'exploitation doit permettre de réduire la dépendance aux terres rares et métaux stratégiques venus d'ailleurs.

Identifier et renforcer les sites, moins dépendre de l'extérieur

Stéphane Séjourné, commissaire européen à la stratégie industrielle européenne, fait les présentations et rappelle que la souveraineté industrielle passe par des sites de production locaux mais aussi la maîtrise des chaînes d'approvisionnement.

La liste des sites est articulée autour de quatre grands secteurs :

  • batterie
  • semi-conducteurs
  • énergie
  • défense

Les sites privilégiés sont situés dans 13 pays européens et concernent tous les aspects, de l'extraction de matières premières à leur transformation puis leur recyclage.

"L'Europe doit mettre en place des mesures pour éloigner les menaces existentielles. Et les ruptures d'approvisionnement en font partie", explique ainsi le commissaire européen aux médias.

L'appétit des Etats-Unis pour les minerais stratégiques ukrainiens, quitte à en faire un enjeu pour un accord de paix dans le conflit avec la Russie, en dit long sur l'importance de ces ressources stratégiques.

Or l'Europe est totalement dépendante du savoir-faire étranger pour certaines matières premières, ce qui peut constituer un vrai danger pour son autonomie. Un blocage sur n'importe quel point de ces chaînes d'approvisionnement et la rupture sera totale.

La Chine fait bien sûr l'objet de toutes les craintes. Premier exportateur mondial de bon nombre des terres rares et métaux essentiels à l'industrie high-tech, elle aussi en pointe en matière de techniques d'extraction et de raffinage.

Ses ripostes contre les restrictions économiques imposées par les Etats-Unis portent d'ailleurs à la fois sur les volumes des ressources exportées et sur les technologies d'extraction et de traitement associées.

D'autres sources d'approvisionnement, notamment en Afrique, présentent aussi des risques géopolitiques qui pourraient couper les accès, et ce d'autant plus à l'heure de la perte d'influence de l'Europe au profit d'autres blocs géographiques.

Des objectifs ambitieux pour une souveraineté retrouvée

Pour toutes ces raisons, l'UE veut désormais produire et raffiner à domicile. Elle se fixe un cap ambitieux : 10% au moins des matières premières consommées annuellement devront provenir de l'Union européenne et 40% devront être raffinées au sein de l'Europe d'ici 2030. Il faudra également renforcer très nettement le recyclage pour le faire passer de 1% actuellement à 25%.

La liste des 47 sites stratégiques couvre 14 des 17 matières premières identifiées comme critiques par l'UE. Elle concerne majoritairement le lithium, le nickel, le cobalt, le manganèse et le graphite, ainsi que le magnésium et le tungstène pour les besoins militaires.

Procédé d'extraction du lithium par Eramet prévu pour l'un des sites français

En France, huit projets ont été identifiés et concernent principalement le lithium, de l'extraction dans l'Allier et en Alsace au recyclage des batteries. D'autres sites serviront au raffinage des terres rares et du graphite.

Pour les soutenir et les mettre en service ou renforcer leur fonctionnement, la Commission européenne prévoit une enveloppe de 22,5 milliards d'euros et des modalités accélérées pour les activer. Au-delà du renforcement des sites de production, de raffinage et de recyclage, l'Europe va aussi constituer des stocks stratégiques. La modèle mondialiste a vécu.

Source : Portail Europa