En rendant son avis sur le principe de mutualisation des infrastructures et des fréquences entre opérateurs mobiles, l'Autorité de la concurrence s'est également exprimée sur le sujet connexe du contrat d'itinérance signé entre Free et Orange et qui permet au premier d'exploiter le réseau du second en attendant de déployer son propre réseau mobile.
Elle a souligné que l'accord d'itinérance ne doit servir qu'à aider le nouvel entrant à se faire une place sur le marché et n'a pas vocation à durer au-delà de quelques années, recommandant son arrêt d'ici 2018, voire 2016 (date de fin des accords d'itinérance 2G) et appelant à l'Arcep à se pencher sur les modalités d'extinction.
Free Mobile n'aura théoriquement plus vraiment besoin de l'itinérance dès 2015 puisque l'opérateur a pris pour engagement de posséder une couverture en propre d'au moins 75% de la population. Il est donc important de contrôler que le nouvel entrant fasse les efforts nécessaires pour tenir ce critère et ne puisse pas trouver dans son accord d'itinérance un viatique pour justifier un retard lié à un investissement insuffisant.
Un avis très logique de l'Autorité de la concurrence
Si beaucoup d'observateurs voient dans cette recommandation une victoire des opérateurs concurrents qui ont régulièrement dénoncé cet accord, il est à noter que l'Autorité ne fait que confirmer ce qui était prévu à l'origine, à savoir que l'itinérance entre Free et Orange ne pouvait être qu'une mesure transitoire et ne devait pas s'installer dans le temps.
L'Autorité exprime surtout la nécessité de poser un cadre pour s'assurer que les deux opérateurs ne puissent pas la laisser traîner en longueur. Elle se prononce également en faveur d'une mutualisation des infrastructures pour aider à faire face aux coûts des investissements dans les réseaux mobiles, sans pour autant aller jusqu'au partage des fréquences, hormis pour les zones à faible densité.
Commentant ces avis de l'Autorité de la concurrence, le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg et la ministre déléguée au développement de l'économie Fleur Pellerin ont salué ces orientations dans une tribune publiée dans le journal Le Figaro.
Free Mobile ou la tare d'être né sous le gouvernement précédent ?
Reprenant leurs arguments critiques envers le niveau d'investissement de Free dans les réseaux mobiles, les ministres rappellent l'importance du partage des investissements entre les opérateurs pour assurer le déploiement des réseaux mobiles dans de bonnes conditions mais aussi le fait que personne ne doit s'y soustraire :
" il ne peut y avoir de passager clandestin et chacun doit prendre sa part à l'effort, y compris Free, qui doit progressivement se passer d'Orange et s'affirmer comme un opérateur crédible et durable en investissant à son tour pour déployer son propre réseau ", indiquent-ils dans leur tribune.
Est-ce à dire que Free Mobile se comporte en passager clandestin du marché mobile français et en opérateur peu crédible ? Voilà de la matière pour Xavier Niel, patron du groupe Iliad, qui a lancé plusieurs plaintes pour dénigrement ou diffamation depuis le lancement de Free Mobile.
Les ministres regrettent l'absence d'étude d'impact (notamment ses conséquences sur l'emploi) du contrat d'itinérance entre Free et Orange alors qu'il a eu une profonde influence sur le marché mobile français depuis début 2012, rejetant la faute sur le gouvernement précédent qui aurait validé l'arrivée d'un quatrième opérateur sans trop se préoccuper des perturbations que cela engendrerait.
Le gouvernement avait annoncé l'automne dernier la mise en place de mesures de soutien au secteur télécom, dont un observatoire des investissements et des déploiements des réseaux des opérateurs, mesure qui avait été vue comme un premier avertissement envers Free Mobile et sa stratégie de réseau hybride.