Fondée en 2015 à Silicon Valley, Cerebras fait couler beaucoup d’encre. Après avoir déposé son dossier d’introduction en bourse il y a tout juste un an sans réaliser l'opération, l'entreprise reste toujours privée, mais attire à elle des géants de l’investissement grâce à une levée de fonds exceptionnelle de 1,1 milliard de dollars.

Avec une valorisation qui bondit à 8,1 milliards, la société s’impose comme l’une des plus sérieuses rivales de Nvidia, le leader historique du secteur des puces d’intelligence artificielle, en proposant une technologie de puces géantes sur wafer,  alternative aux accumulations de GPU.

Une levée de fonds record et des investisseurs prestigieux

Ce nouveau tour de table réunit les poids lourds de premier plan du capital-risque, ce qui souligne aussi l'intérêt du marché pour le savoir-faire de la firme. La société, qui vient d’ouvrir cinq nouveaux datacenters depuis le début 2025, mise clairement sur l’expansion.

Parmi les villes concernées, Dallas, Oklahoma City et Santa Clara signalent une stratégie centrée sur le marché nord-américain, mais des implantations sont aussi prévues à Montréal et en Europe, pour soutenir une demande mondiale en explosion.

L'investissement clôt une série d’investissements qui porte le financement total de Cerebras à près de 2 milliards de dollars en dix ans. La précédente levée, en 2021, permettait déjà d'afficher une valorisation de 4 milliards de dollars.

Ce nouvel investissement est motivé par la croissance des services d’inférence IA, lancés en août 2024, qui permettent d’exploiter en temps réel les modèles d'intelligence artificielle.

Les ressources ont été réattribuées, de nouveaux experts recrutés, et la demande pour l’offre cloud s’est rapidement avérée supérieure à toutes les prévisions de l’équipe dirigeante. 

IPO reportée : entre ambitions et régulations

L’histoire récente de Cerebras n’a pas été simple : la société a initialement planifié d’entrer en bourse en septembre 2024, affrontant assez vite une série de difficultés administratives.

Le Trésor américain et le CFIUS (Committee on Foreign Investment in the United States) ont retardé la procédure, notamment suite à un investissement de 335 millions de dollars provenant de G42, acteur majeur de l’IA basé à Abu Dhabi.

Cette intervention soulève la question du contrôle étranger et met en pause la montée en puissance boursière de Cerebras. Au début du mandat de Donald Trump, des postes clés au sein du régulateur sont restés vacants, allongeant le délai de validation et freinant les ambitions publiques de la startup, qui doit se contenter d’un statut privé pour l’instant. 

Une croissance portée par l’expansion des datacenters et la fabrication américaine

Avec ce nouvel afflux de capitaux, la priorité de Cerebras se concentre sur l’augmentation de ses capacités industrielles aux États-Unis. Résultat : une capacité de fabrication multipliée par huit sur les 18 derniers mois, tandis qu’une expansion supplémentaire par quatre est prévue dans le semestre à venir.

La chaîne de production implique le fondeur taiwanais TSMC pour la fabrication des wafers, qui sont ensuite assemblés aux États-Unis. Un choix stratégique qui témoigne d’une volonté de répondre à la forte demande mais aussi de rassurer les instances américaines sur la localisation de la valeur ajoutée.

La demande s’accélère grâce à l’adoption massive des services IA dans le cloud, avec des clients comme Meta, Notion, Hugging Face et Perplexity qui utilisent déjà l’infrastructure Cerebras.

Des enjeux mondiaux et une bataille face aux géants de l’IA

La dynamique concurrentielle dans le secteur des puces IA s’intensifie. Cerebras se positionne face à Nvidia, leader établi, alors que la valorisation des sociétés spécialisées dans l’IA gonfle rapidement : OpenAI, par exemple, reçoit jusqu’à 100 milliards de dollars d’investissements pour développer ses propres centres de données.

Dans ce contexte, Cerebras affiche une ambition mondiale et prévoit d’intensifier ses recrutements tout en poursuivant ses efforts vers une entrée en bourse, lorsque les obstacles réglementaires seront levés. Mais le vrai défi consiste à répondre à une demande exponentielle tout en gardant une flexibilité suffisante pour naviguer sur les marchés internationaux et satisfaire aux exigences de sécurité nationale.