La région Île-de-France a officialisé sa décision de sortir progressivement de l'écosystème Microsoft pour la gestion des données de ses lycées. Dès la rentrée 2025, les 550 000 élèves et professeurs franciliens n'utiliseront plus les services de la firme de Redmond, au profit d'alternatives françaises.

Cette migration, loin d'être un simple changement technique, incarne une volonté de reprendre le contrôle des données personnelles et de s'affranchir d'une dépendance jugée problématique.

Pourquoi une mesure aussi drastique contre Microsoft ?

Une loi américaine, le Cloud Act, est au centre de ce changement de direction. Cette loi autorise les autorités américaines à demander l'accès aux données hébergées par des entreprises basées aux États-Unis, peu importe si ces informations sont conservées sur des serveurs situés en Europe.

Il est inadmissible pour la région que des données aussi sensibles que les bulletins scolaires, les emplois du temps ou les échanges privés des élèves soient accessibles à une instance judiciaire étrangère.

À cette préoccupation de souveraineté numérique s'ajoute une raison économique. Selon la région, les tarifs de Microsoft ont connu des hausses importantes, de plus de 30 % pour certaines collectivités, représentant des surcoûts de plusieurs centaines de milliers d'euros. Le choix de se tourner vers des solutions françaises est donc aussi un pari sur un meilleur contrôle des dépenses à long terme.

Quelles sont les alternatives françaises choisies ?

La transition s'organise autour d'un consortium d'acteurs français, fédérés au sein de la plateforme régionale MonLycée.net. La première étape, déjà en cours, est la migration des comptes Microsoft 365 vers les serveurs du service cloud français Leviia. Pour la gestion de la vie scolaire, la solution envisagée est Docaposte, filiale numérique de La Poste, qui a récemment acquis l'éditeur du très populaire logiciel PRONOTE.



La messagerie, quant à elle, sera confiée à Worldline. L'objectif est de créer un écosystème complet et sécurisé, où chaque brique logicielle est maîtrisée et hébergée en France, garantissant ainsi la protection des données personnelles des mineurs.

Cette initiative peut-elle faire tache d'huile ?

L'Île-de-France n'est pas une pionnière isolée. D'autres collectivités, comme la ville de Lyon, ont déjà amorcé une transition similaire en privilégiant des logiciels libres (OnlyOffice, Linux) pour remplacer les suites bureautiques américaines. Cette décision francilienne, par son ampleur, pourrait cependant accélérer le mouvement.



Elle prouve une prise de conscience croissante de la part des acteurs publics sur les enjeux de souveraineté. En démontrant qu'il existe des alternatives viables aux GAFAM, l'Île-de-France ouvre la voie à d'autres régions et administrations qui pourraient être tentées de rapatrier leurs données et de favoriser des solutions locales ou européennes.

Foire Aux Questions (FAQ)

Qu'est-ce que le Cloud Act ?

Le Cloud Act (Clarifying Lawful Overseas Use of Data Act) est une loi fédérale américaine de 2018 qui autorise les forces de l'ordre américaines à contraindre les fournisseurs de services basés aux États-Unis à fournir les données demandées, qu'elles soient stockées sur le territoire américain ou à l'étranger. C'est cette extraterritorialité qui pose un problème de souveraineté pour les pays européens.

Tous les services Microsoft seront-ils remplacés ?

Non, la transition est progressive et ciblée. Dans un premier temps, elle concerne principalement les services liés aux élèves et enseignants (suite bureautique, stockage cloud, vie scolaire, messagerie). La région a précisé que certains services informatiques internes, pour l'administration, restaient pour l'instant confiés à des acteurs américains comme ServiceNow.

Les lycéens verront-ils une grande différence à l'usage ?

L'objectif de la région est d'assurer une transition aussi fluide que possible. L'intégration de PRONOTE via Docaposte garantit une continuité pour un outil que les élèves et les parents connaissent déjà très bien. Pour la suite bureautique et le stockage, l'interface de Leviia ou d'autres alternatives pourrait nécessiter un court temps d'adaptation, mais les fonctionnalités de base resteront similaires.