Début novembre, une offre a secoué les amateurs de high-tech. Le site italien de MediaWorld, un géant de la distribution, proposait l'iPad Air de 13 pouces équipé de la puce M3 pour la somme dérisoire de 15 euros, au lieu de son tarif habituel avoisinant les 870 euros. Réservée aux détenteurs de la carte de fidélité, l'offre a semblé crédible à beaucoup, surtout à l'approche du Black Friday. Plusieurs consommateurs ont donc sauté sur l'occasion, payant et récupérant leur tablette en magasin sans le moindre problème.
Comment MediaWorld a-t-elle réagi à cette erreur colossale ?
La prise de conscience a été tardive. Ce n'est que onze jours après les transactions que MediaWorld a contacté les acheteurs par un simple courriel, et non par une mise en demeure formelle. Dans ce message, l'entreprise évoque une « erreur manifeste » due à un problème technique et propose deux solutions pour régulariser la situation.
Les clients ont ainsi le choix : soit conserver l'iPad en réglant la différence avec le prix promotionnel réel, tout en bénéficiant d'une remise supplémentaire de 150 euros. Soit rendre le produit en magasin pour obtenir un remboursement intégral des 15 euros, accompagné d'un bon d'achat de 20 euros en dédommagement. Contactée par les médias, l'enseigne a confirmé un « bug exceptionnel » et a justifié sa démarche par une volonté de maintenir une relation « transparente et équitable » avec ses clients.
Les acheteurs sont-ils légalement obligés de rendre leur tablette ?
Toute la complexité de l'affaire réside dans cette question. Le droit italien, via l'Article 1428 du Code civil, permet en théorie l'annulation d'un contrat si l'erreur est jugée « fondamentale et reconnaissable ». Cependant, plusieurs juristes, dont l'avocat spécialisé dans la défense des consommateurs Massimiliano Dona, estiment que la situation est bien plus nuancée.
Pour annuler une vente, l'enseigne doit prouver que le consommateur avait conscience de profiter d'une anomalie. Or, une remise de près de 98 % ne suffit pas à elle seule à établir cette preuve. Selon l'avocat, le contexte actuel des promotions agressives, des ventes flash et des offres limitées, notamment durant la période du Black Friday, a rendu le concept de prix beaucoup plus volatile. Un acheteur pouvait raisonnablement penser qu'il s'agissait d'une stratégie marketing particulièrement agressive plutôt que d'une simple erreur.
Quelle est la différence entre un acheteur de bonne foi et un opportuniste ?
L'avocat Massimiliano Dona insiste sur le fait que chaque cas devra être évalué individuellement. La clé du débat juridique est la "reconnaissabilité" de l'erreur par l'acheteur au moment de la transaction. Le profil de ce dernier joue un rôle déterminant dans cette évaluation.
Par exemple, un particulier achetant une seule tablette pour son usage personnel pourrait plus facilement plaider la bonne foi, ayant cru à une offre exceptionnelle mais plausible. En revanche, la situation est très différente pour une personne qui aurait commandé cinq tablettes dans le but évident de les revendre. Une telle démarche démontre une connaissance du marché et une conscience de la valeur réelle du produit. Cette intention pourrait être utilisée par MediaWorld pour prouver la mauvaise foi de ces clients et ainsi justifier l'annulation du contrat. Pour l'heure, le dossier reste ouvert et son issue est encore incertaine.