Fin septembre, le groupe Iliad annonçait son offensive en matière d'intelligence artificielle en dévoilant un important investissement couvrant le lancement de supercalculateurs IA, une grande conférence annuelle faisant le point sur les avancées en matière d'intelligence artificielle et la création d'un laboratoire d'excellence intégrant des pointures dans le domaine.
Ce dernier volet prend corps avec la naissance de Kyutai, un laboratoire français de recherche dans l'intelligence artificielle à but non lucratif. Armé d'un financement de 300 millions d'euros amenés à part (presque) égale par Xavier Niel, fondateur du groupe Iliad mais aussi de l'école d'informatique 42 ou de l'incubateur de startups Station F, Rodolphe Saadé (patron de CMA-CGM) et Eric Schmidt, ancien dirigeant de Google, il vise à devenir une sorte d'OpenAI à la française avec de véritables ambitions pour faire éclore les prochains usages et les pépites de l'IA.
credit : Cyril Marcilhacy
Un laboratoire de recherche non lucratif
Les présentations se sont faites ce 17 novembre à Station F et confirment une volonté de pouvoir faire jeu égal avec les grands centres californiens. La bataille qui se joue est aussi celle d'une forme de souveraineté dans les IA en cherchant à créer des intelligences artificielles répondant à des critères spécifiques qui ne sont pas forcément identiques d'une nation à une autre.
Il existe différentes philosophies de création des IA tout comme les jeux de données utilisés pour les entraîner façonneront différemment les intelligences artificielles. Kyutai vise donc à permettre la création d'IA, génératives mais pas seulement, que la France et l'Europe pourront utiliser sans crainte des arrière-pensées et règles pas forcément adaptées à un cadre européen présentes dans d'autres IA populaires et e train de façonner le marché.
Le laboratoire pourra profiter de la puissance de traitement fournie par Scaleway, filiale du groupe Iliad et qui vient de mettre en service Nabuchodonosor et Jeroboam, deux supercalculateurs (un grand et un petit) offrant la plus grande puissance de calcul à disposition en Europe dans un cadre open science, qui est aussi l'un des critères de Kyutai afin de mettre à disposition ses travaux au profit du plus grand nombre.
Des experts nationaux, un patronage scientifique international
Le laboratoire de recherche s'appuie sur une équipe d'experts français et étrangers en divers domaines (mathématiques, intelligence et vision artificielle, algorithmie, cryptographie, compression de données...), dont un ancien de Google DeepMind spécialisé dans l'IA générative, et sur un conseil scientifique composé de trois chercheurs de renommée mondiale : Yejin Choi, Yann Le Cun (responsable des travaux IA chez Meta) et Bernhard Schölkopf.
Avec Kyutai, l'objectif est d'attirer et de garder les talents IA formés en France en axant les travaux sur la recherche fondamentale et en open source. Xavier Niel, tout en reconnaissant un léger retard de l'Europe dans le domaine, estime que la course à l'IA n'est pas déjà jouée et que de petites structures sont tout à fait capables de produire des miracles IA face aux géants américains ou chinois.
Au journal La Tribune, il estime que que "la France à elle seule peut se hisser parmi les leaders mondiaux de l'IA"...si elle parvient à retenir ses talents. Ce sera sans doute le grand challenge pour Kyutai mais aussi une opportunité pour la French Tech et, au-delà, pour l'Europe.