Face aux retards accumulés par le Starship de SpaceX, la NASA a décidé de rouvrir à la concurrence le contrat crucial pour l'alunisseur de la mission Artemis III du programme lunaire.
Cette décision stratégique vise à sécuriser le retour des astronautes américains sur la Lune avant 2027, en pleine course contre la Chine, et ouvre la voie à des acteurs comme Blue Origin et Lockheed Martin.
Prévue pour 2027, la mission Artemis III doit marquer le retour des astronautes américains sur le sol lunaire, plus d'un demi-siècle après Apollo 17.
Pour cette étape historique, la NASA avait misé sur un partenaire unique : SpaceX et son gigantesque vaisseau Starship, sélectionné pour servir de système d'alunissage humain (HLS). Mais le calendrier initial, déjà repoussé de 2024 à 2027, est aujourd'hui plus que jamais sous tension.
Une décision motivée par les retards et la pression chinoise
L'annonce a été faite par l'administrateur de la NASA, Sean Duffy. Face aux difficultés de développement du Starship, dont les vols d'essai ont connu de multiples revers avant un succès partiel en septembre, l'agence ne peut plus se permettre d'attendre.
Le comité consultatif sur la sécurité aérospatiale de la NASA (ASAP) avait déjà exprimé de sérieux doutes quant à la capacité de SpaceX à être prêt à temps.
Le principal enjeu est géopolitique : devancer la Chine, qui ambitionne d'envoyer ses propres taïkonautes sur la Lune d'ici 2030. La pression politique interne, avec une administration souhaitant voir un alunissage avant la fin du mandat présidentiel en 2029, a sans doute pesé lourd dans la balance.
Blue Origin et Lockheed Martin en embuscade
En rouvrant le contrat, la NASA envoie un signal fort au marché. Blue Origin, la société de Jeff Bezos, est désormais en position de force pour proposer son alunisseur Blue Moon Mark 1.
L'entreprise, bien que n'ayant jamais envoyé de charge utile en orbite, se dit "prête à soutenir" l'effort national. De son côté, Lockheed Martin, un pilier de l'industrie aérospatiale et déjà concepteur de la capsule Orion, a confirmé travailler sur sa propre technologie d'alunisseur.
Cette mise en concurrence a provoqué une réaction immédiate d'Elon Musk, qui n'a pas manqué de railler sur les réseaux sociaux le manque d'expérience de son concurrent direct en matière de vols orbitaux. La bataille pour la Lune se jouera aussi sur le terrain de la communication.
Quels défis pour le Starship ?
Au-delà des simples délais, les défis techniques qui attendent le Starship sont colossaux. Le vaisseau doit non seulement démontrer sa fiabilité lors de vols d'essais plus poussés, mais aussi maîtriser des manœuvres inédites et complexes, comme le ravitaillement en orbite terrestre qui nécessitera de multiples lancements de tankers.
Sa taille, estimée à plus de 50 mètres de haut, pose également des questions fondamentales pour un atterrissage stable sur le régolithe lunaire. C'est un défi sans commune mesure avec celui relevé par le module lunaire Apollo, qui ne mesurait que 7 mètres de haut. La moindre inclinaison au moment de se poser pourrait s'avérer catastrophique pour un véhicule aussi élancé.
Cette réouverture de la compétition ne signifie pas l'éviction de SpaceX, mais elle fragilise considérablement sa position de partenaire privilégié. En jouant la carte de la prudence et de la redondance, la NASA cherche avant tout à garantir le succès d'Artemis III.
La véritable course n'est peut-être plus seulement contre la Chine, mais bien entre les géants américains de l'aérospatiale pour décrocher ce contrat historique.