Comme les particules qu'il tente de maîtriser, le secteur quantique est pris entre deux états distincts : l'euphorie des opportunités à venir et la réalité d'un travail de recherche qui pourrait demander encore des décennies avant d'avoir des applications concrètes.

Sans aller jusqu'à l'intrication (quoique...), l'industrie quantique est passée très vite entre ces deux états au fil des déclarations des géants de la high-tech. Cela a démarré par un sérieux coup de froid après la diffusion des propos de Jensen Huang, dirigeant de Nvidia et spécialiste des GPU et par extension des accélérateurs IA.

Ce dernier, en affirmant que les premiers ordinateurs quantiques utilisables ne seront pas disponibles avant 15 ou 20 ans, a mis à mal la confiance des investisseurs qui ont déjà placé des milliards de dollars dans le secteur et ont vu ainsi les perspectives de retour sur investissement s'éloigner dangereusement.

Nvidia Jensen Huang processeur Projet Digits

Jensen Huang : le quantique, c'est loin, l'IA c'est maintenant

Les cours des plusieurs acteurs du marché de l'ordinateur quantique ont vu leur cours s'effondrer à la suite de ces déclarations. Cela a-t-il incité à tenter de faire pencher la balance de l'autre côté, à la façon d'une bouée de sauvetage.

Toujours est-il que Microsoft, qui est aussi un acteur du quantique, s'est fendu d'un billet de blog par la voix de Mitra Azizirad, directrice générale des missions et technologies stratégiques au sein du groupe,  prédisant tout au contraire une ère imminente du quantique et invitant les entreprises à s'y préparer dès maintenant.

Quantum Ready, l'offensive de charme de Microsoft

Et l'entreprise joint le geste à la parole en lançant un programme Quantum Ready qui va permettre aux décideurs de se préparer à cette nouvelle opportunité. Cela passe par des accompagnements permettant d'identifier les scénarios d'usage, que ce soit pour l'utiliser ou s'en protéger alors que les techniques cryptographiques sont en train d'évoluer et de se transformer sous l'impact du domaine quantique.

Le programme doit aussi permettre de mieux cerner les implications du quantique afin de choisir les bons talents et de mettre en place une stratégie cohérente, et enfin d'identifier les partenaires les plus adaptés pour concrétiser le passage à l'ère quantique.

cryptage-quantique

Le programme Quantum Ready ne dément pas forcément les déclarations de Jensen Huang mais il propose au moins de préparer un cadre et d'apporter une couche d'information pour permettre aux entreprises de se préparer à une évolution qui semble ainsi inéluctable et moins lointaine qu'il n'y paraît, a minima dans certains aspects.

De fait, l'utilisation d'arguments tels que "nous sommes sur le point de voir les ordinateurs quantiques résoudre des problèmes réels et importants et de générer de nouvelles opportunités", donne le sentiment que la révolution est déjà en marche et qu'il faut s'y intéresser dès à présent.

Les investisseurs du quantique en quête de signes positifs

Il n'en fallait (presque) pas plus pour redonner espoir et refaire grimper la valeur du cours en Bourse de certains des acteurs du quantique, comme Rigetti Computing, D-Wave ou IonQ de 10 à 20%, après avoir perdu jusqu'à 30% quelques jours plus tôt.

Il reste toujours à faire la démonstration que les ordinateurs quantiques peuvent résoudre des problèmes du monde réel bien plus rapidement que l'informatique traditionnelle (et pas seulement des scénarios mathématiques complexes déconnectés du réel).

L'annonce fin 2024 de Google autour de sa solution quantique Willow et d'une capacité à réduire drastiquement le taux d'erreur de ses systèmes quantiques en augmentant le nombre de qubits va dans la bonne direction mais il faudra tout de même encore un peu de temps, Quantum Ready ou pas, avant de pouvoir en tirer des applications commerciales.

Source : CNBC