L'idée semble tout droit sortie d'un roman de science-fiction : créer un soleil artificiel en orbite pour faire fonctionner les panneaux solaires même la nuit. C'est pourtant le projet très sérieux de la startup californienne Reflect Orbital, qui a récemment demandé une licence à la FCC pour lancer un premier satellite de démonstration en 2026.

Soutenue par des investisseurs de renom, l'entreprise promet une avancée majeure pour l'énergie propre, mais son ambition se heurte à une levée de boucliers de la communauté scientifique, qui craint un désastre pour l'astronomie et l'environnement.

Reflect Orbital

Comment fonctionnerait ce "soleil artificiel" ?

Le concept est simple sur le papier, mais colossal dans son exécution. Reflect Orbital ambitionne de déployer une constellation de 4 000 satellites-miroirs d'ici 2030. Ces engins seraient capables de capter la lumière du Soleil et de la réfléchir de manière précise vers des fermes solaires sur Terre, prolongeant ainsi leur production d'électricité bien après le coucher du soleil.

L'objectif est de fournir une source d'énergie propre et continue, 24 heures sur 24. Pour son premier satellite de démonstration, la startup promet une illumination au sol similaire à celle d'une pleine lune.

Pourquoi les astronomes crient-ils au scandale ?

Si l'idée de doper les énergies renouvelables est louable, elle provoque une levée de boucliers quasi unanime chez les astronomes. Pour eux, ce projet est un cauchemar. Anthony Tyson, scientifique en chef de l'Observatoire Rubin, qualifie le projet de "potentiellement ruineux" pour l'astronomie optique au sol. Une lumière équivalente à une pleine lune serait "aveuglante" pour les télescopes ultrasensibles.

Reflect Orbital 03

La différence avec les constellations comme Starlink, déjà critiquées pour leur pollution lumineuse, est fondamentale : ici, le but n'est pas un effet secondaire involontaire, mais l'objectif même du projet. Les satellites de Reflect Orbital sont conçus pour être les objets les plus brillants possibles dans le ciel nocturne. Un sondage de l'American Astronomical Society a confirmé que la majorité de ses membres estiment que leurs travaux seraient directement impactés.

Quels sont les autres risques écologiques et économiques ?

Le cauchemar des astronomes n'est que la partie visible de l'iceberg. L'introduction d'une telle pollution lumineuse artificielle pourrait avoir des conséquences écologiques désastreuses. Les scientifiques alertent depuis des années sur l'impact de la lumière nocturne sur les écosystèmes, perturbant les cycles de vie et les comportements de nombreuses espèces nocturnes (insectes, oiseaux migrateurs, amphibiens...).

Reflect Orbital 01

Sur le plan économique, la pertinence du projet est également remise en question. Des experts en énergie soulignent que la solution du stockage sur batterie couplé au solaire est déjà une voie "plus viable", plus rapide à déployer et moins coûteuse que la mise en orbite de milliers de satellites. Sans compter l'empreinte carbone non négligeable des lancements eux-mêmes, qui pourrait contrebalancer une partie des bénéfices climatiques annoncés.

Reflect Orbital 04

Foire Aux Questions (FAQ)

Ce projet de satellites-miroirs est-il déjà autorisé ?

Non, pas encore. Reflect Orbital a déposé une demande de licence auprès de la Federal Communications Commission (FCC) aux États-Unis pour lancer son premier satellite de démonstration en 2026. La décision de l'agence gouvernementale n'a pas encore été rendue.

Quelles mesures Reflect Orbital propose-t-elle pour limiter l'impact ?

L'entreprise se dit consciente des préoccupations et promet de collaborer avec la communauté astronomique. Elle assure que les réflexions de lumière seront "brèves, prévisibles et ciblées". Reflect Orbital s'est également engagée à éviter systématiquement les zones proches des observatoires et à partager les positions de ses satellites pour aider les scientifiques à planifier leurs observations.

Le ciel est-il déjà très encombré par des satellites ?

Oui, et c'est un problème croissant. Le déploiement de méga-constellations comme Starlink (SpaceX), Project Kuiper (Amazon) ou OneWeb a déjà considérablement augmenté le nombre d'objets en orbite basse. Selon la Satellite Industry Association, près de 2 700 nouveaux satellites ont été mis en orbite pour la seule année 2024, rendant le ciel de plus en plus "encombré".