L’orbite terrestre, autrefois domaine réservé à la science et aux télécommunications, est en train de devenir le nouveau théâtre d’une compétition technologique et stratégique entre deux puissances incontournables : les États-Unis et la Chine.
La publication d’images satellites inédites issues de part et d'autre a révélé une montée en puissance de l’espionnage orbital et une véritable course à la domination spatiale.
Déplacements de satellites intra- et interobite, rapprochements entre satellites, entraînement au dogfight spatial, moyens d'observation poussés...l'avenir spatial se fait plus hostile pour les satellites.
La montée en puissance de l’espionnage orbital
Le dernier épisode de cette rivalité s’est déroulé sous le regard du monde entier : l’américain Maxar Intelligence a, dès juin 2025, publié des photos spectaculaires du satellite chinois Shijian-26 capturées par son propre satellite WorldView Legion.
Loin d’être anodines, ces images ont offert un niveau de détail saisissant, à seulement 29 kilomètres de distance. Selon les experts, elles illustrent l’évolution rapide des capacités de reconnaissance optique en orbite terrestre.
Les États-Unis et la Chine possèdent chacun des constellations de satellites aux performances de plus en plus avancées et l’observation croisée d’engins spatiaux ennemis symbolise une volonté d’affirmer sa supériorité technologique autant que de collecter des informations sensibles.
Réponse chinoise : la riposte par l’image
Peu après la publication américaine, la riposte ne s’est pas fait attendre. Le 8 septembre, une image prise à 40-50 kilomètres montre cette fois le satellite WorldView Legion américain immortalisé par le satellite chinois Jilin-1.
CHANG-GUANG's Jilin-1 take photos of Maxar's Worldview Legion 2 pic.twitter.com/e1BJwtzbnW
— China 'N Asia Spaceflight ?? ?️ (@CNSpaceflight) September 13, 2025
Pour la première fois, la Chine publie dynamiquement sur ses réseaux des photos d’un satellite étranger en orbite, signalant à son tour “un savoir-faire de haute volée en imagerie spatiale” et la capacité de surveiller précisément les activités américaines. “Photographier un satellite en mouvement depuis l’orbite représente un défi technologique majeur”, notent des analystes militaires.
Pourquoi cette surenchère technologique ?
Ce duel d'images haute résolution est aussi une affaire de stratégie globale et de démonstration de capacités spatiales avancées. Les satellites sont plus que jamais des objets dont il faut surveiller les mouvements suspects et anticiper les manoeuvres orbitales.
L'espace est en train d'entrer dans les doctrines militaires comme potentiel terrain d'affrontement direct, imposant d'anticiper des actions offensives et défensives pour prévenir les menaces futures ou protéger des constellations sensibles.
Communication, observation, détection de menaces comme le lancement de missiles, capacités diverses pour identifier et neutraliser des menaces, la course aux moyens spatiaux s'accélère au rythme de la montée des tensions géopolitiques.
Le développement de constellations telles que Jilin-1 (plus de 100 satellites chinois, réactualisation de la zone en 10 minutes) illustre la volonté d’acquérir une couverture quasi continue et ultra-précise du globe, accentuant les frictions déjà palpables sur l’orbite basse.
La militarisation de l’espace en question
Depuis la création de la Space Force américaine en 2019, puis de la Force aérospatiale de l’Armée populaire de libération par la Chine en 2024, tous les signaux pointent vers une accélération de la militarisation spatiale.
Les idées de la DARPA pour neutraliser un satellite adverse
Les incidents, tels que les rapprochements entre satellites et autres manoeuvres d'intimidation, montrent le potentiel explosif de la situation. Si chaque démonstration d’observation possède clairement une valeur dissuasive, certains spécialistes redoutent désormais que la surveillance mutuelle n’aboutisse à des contre-mesures actives ou des opérations de brouillage, voire de sabotage physique, faisant de l’espace un nouveau risque d'escalade.
Quels risques pour l’avenir ?
Pour les experts, cette “hauteur stratégique” pourrait vite devenir un champ de bataille. Si la capacité à observer et à documenter les satellites étrangers rassure pour l’instant sur une certaine transparence, elle accroît aussi le risque de mésentente et de surenchère technique.
“Sans règles de comportement claires, la militarisation de l’orbite pourrait rapidement dégénérer en conflit ouvert”, soulignent les analystes interrogés. L’impact dépasse aussi la sécurité : la course à l’imagerie spatiale pousse à l’innovation, mais exacerbe la méfiance inter-étatique et pourrait influencer l’équilibre géopolitique mondial.