Depuis plusieurs années, les Etats-Unis freinent les progrès de la Chine dans les semi-conducteurs et la production de puces en gravure fine au nom de leur sécurité nationale
Blocage de l'accès aux techniques de gravure les plus fines des grands fondeurs, aux équipements de lithographie avancés, restrictions sur les échanges commerciaux et technologiques avec les entreprises américaines, listes noires imposant des licences spéciales, rien n'est négligé pour empêcher la Chine de rattraper son retard.
Mais ces mesures sont-elles efficaces ? Le lancement des smartphones Huawei dotés de puces mobiles gravées en 7 nm en septembre 2023 a créé un choc et montré que la Chine avait de la ressource pour parvenir à ses fins.
A ceci s'ajoutent ses efforts pour percer dans le domaine de l'intelligence artificielle, du quantique et dans la production de puces sur des noeuds plus hauts pourvant être produites en grandes quantités et à bas coût et toujours très demandées par de nombreuses industries.
Un retard certain mais pas irréversible
Alors, où en est l'industrie chinoise des semi-conducteurs ? Un rapport de l'ITIF (Information Technology & Innovation Foundation) tente de faire le point sur la situation.
Le document note les efforts massifs de la Chine pour mettre à niveau son industrie des puces malgré les obstacles mais indique dans le même temps que le blocage par les Etats-Unis semble plutôt efficace...pour le moment.
Si les entreprises chinoises n'ont que deux ans de retard dans la conception des puces par rapport à l'Occident, l'écart est plus conséquent pour toutes les étapes intermédiaires de certification, assemblage, packaging et test avec plusieurs années de décalage par rapport aux techniques les plus modernes de l'industrie mondiale. Les puces mémoire sont notamment un point de faiblesse pour l'industrie chinoise.
Le rapport estime globalement que la Chine a environ cinq années de retard par rapport aux champions du secteur des semi-conducteurs, soit deux fois moins que ce qu'indiquait le CEO d'Intel Pat Gelsinger il y a quelques mois.
Produire plus plutôt qu'innover
Ce décalage pourrait être réduit avec les nombreuses initiatives et les investissements du gouvernement chinois, même si certains obstacles sont irréductibles, comme l'accès aux équipements de lithographie EUV les plus récents.
Plus généralement, l'effort chinois porte d'abord sur l'augmentation de capacités de production de puces sur des noeuds de gravure matures plutôt que sur le souci d'une innovation dont tous les chemins lui sont barrés...en attendant de disposer de ses propres technologies qui lui permettraient de gagner son indépendance.
Toutefois, le rapport de l'ITIF observe que la Chine met de gros moyens pour améliorer son industrie, avec des investissements de 2 à 3 fois supérieurs à ce que mettent sur la table les blocs occidentaux, et ce depuis les années 2010, bien avant que les gouvernements Trump puis Biden ne commencent à imposer des restrictions commerciales.
Par ailleurs, le secret imposé par le gouvernement chinois sur les données officielles touchant le secteur des semi-conducteurs rend difficile le décryptage des évolutions en cours et pourrait cacher quelques surprises.