L'avenir de SFR se joue dans une partie de poker à haut risque où les coups de bluff et la méfiance règnent en maîtres. Alors que l'opérateur, affaibli par une dette colossale et une fuite d'abonnés, cherche une issue, ses deux principaux prétendants, Free et Bouygues, peinent à trouver un terrain d'entente pour se partager les actifs.

Les négociations, relancées début septembre, sont si crispées qu'un ultimatum plane : si aucun compromis n'est trouvé d'ici mi-octobre, l'opération pourrait être purement et simplement abandonnée.

Pourquoi les négociations sont-elles si compliquées ?

Le blocage se cristallise autour de deux points majeurs. Le premier est la marque low-cost RED by SFR et ses précieux 5 millions de clients, seul segment en croissance du groupe.

Xavier Niel, patron de Free, veut la totalité de cette base d'abonnés, mais Bouygues refuse de lui laisser le champ libre, cherchant à en récupérer une partie pour ne pas se laisser distancer.

Patrick Drahi 2

Le second, et principal point de friction, concerne le réseau mobile partagé "Crozon". Bouygues est prêt à en racheter la moitié, mais évalue le surcoût d'exploitation à 300 millions d'euros par an. En conséquence, il réclamerait une compensation financière de près de 2 milliards d'euros à Free, une somme jugée exorbitante par le camp de Niel.

Quel est le rôle de Patrick Drahi et des autres acteurs ?

Face à cette impasse, le propriétaire de SFR, Patrick Drahi, est personnellement monté au front. Fin août, il a rencontré un à un les patrons de Bouygues, Free et Orange pour les presser de formuler une offre concrète, alors que la restructuration de la dette de SFR est sur le point d'être finalisée.

altice-sfr

Orange, de son côté, joue un rôle d'arbitre intéressé, cherchant à récupérer des fréquences et une partie des abonnés de la marque SFR pour conforter sa position de leader. Enfin, l'État surveille de très près le dossier et a rappelé son droit de veto en cas d'offre d'un investisseur étranger, au nom de la souveraineté des infrastructures télécoms.

Quel avenir pour SFR si aucun accord n'est trouvé ?

Le temps presse. Les négociations sont un enchevêtrement de rivalités historiques et de calculs stratégiques où chaque acteur craint de voir son concurrent direct sortir renforcé.

Si Free et Bouygues ne parviennent pas à un accord d'ici la mi-octobre, le dossier pourrait être refermé. SFR continuerait alors sa route en solo, avec une dette allégée mais toujours confronté à d'énormes défis commerciaux.

Pour l'heure, Altice, la maison-mère de SFR, assure qu'aucun processus de vente officiel n'est lancé, mais en coulisses, la pression est maximale pour éviter un échec qui laisserait le paysage des télécoms français inchangé, mais fragilisé.

Foire Aux Questions (FAQ)

Quels sont les principaux actifs de SFR convoités ?

Les deux principaux trésors sont la base d'abonnés de la marque low-cost RED by SFR (environ 5 millions de clients) et le réseau mobile partagé avec Bouygues, connu sous le nom de code "Crozon". Les activités dédiées aux entreprises (SFR Business) sont également au cœur des discussions.

Pourquoi le réseau "Crozon" est-il si important dans la négociation ?

Ce réseau est partagé entre SFR et Bouygues. Si Bouygues en reprend une grande partie, ses coûts d'exploitation augmenteront significativement. Il demande donc une compensation financière très élevée à Free pour "payer" ce surcoût, ce que Free refuse. C'est le principal point de blocage financier.

Un acteur étranger peut-il racheter SFR ?

Techniquement oui, mais c'est très improbable. Le gouvernement français a rappelé qu'il dispose d'un droit de veto sur toute prise de contrôle par un investisseur étranger, en vertu du caractère stratégique et sensible des réseaux télécoms. Une solution française est donc largement privilégiée.