L'obligation de vérifier l'âge des visiteurs sur les sites pornographiques, imposée par l'Arcom pour protéger les mineurs, a viré au casse-tête sécuritaire pour les adultes.

Une analyse menée par l'organisation AI Forensics pointe du doigt des failles béantes dans le système AgeGo, l'une des solutions les plus répandues. Non seulement ce système ne garantit pas l'anonymat, mais il crée une fuite de données personnelles vers des serveurs tiers, soulevant de sérieuses questions sur la protection de la vie privée.

Comment fonctionne cette vérification d'âge qui fuit ?

Le mécanisme de cette fuite de données est d'une simplicité déconcertante. Pour prouver sa majorité, l'utilisateur doit scanner son visage via la webcam de son ordinateur ou l'appareil photo de son smartphone.

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L'enquête a révélé que durant ce processus, des informations très personnelles sont envoyées directement vers les serveurs d'Amazon Web Services (AWS) :

  • Le flux vidéo complet du visage de l'utilisateur.
  • L'adresse IP de l'internaute.
  • Des informations sur le navigateur utilisé (user agent).
  • L'adresse e-mail de l'utilisateur.

Le problème vient du fait qu'AgeGo a basé son service sur la législation britannique, bien moins protectrice de la vie privée que les normes françaises et européennes, rendant la promesse d'anonymat totalement caduque pour un utilisateur français.

Pourquoi cet effet "passoire" était-il prévisible ?

Cet effet pervers était attendu : en rendant l'accès plus contraignant sur les plateformes historiques, l'obligation de vérification d'âge a créé un phénomène de vases communicants.

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Les données de recherche Google montrent une explosion du trafic vers de nouveaux sites pornographiques qui, eux, n'imposent aucune barrière à l'entrée. Parallèlement, les utilisateurs les plus avertis se tournent massivement vers des outils de contournement comme les VPN ou des services de DNS spécifiques pour masquer leur localisation et échapper à la procédure.

Le résultat est un échec sur les deux tableaux : la protection des mineurs est affaiblie par l'émergence de sites non régulés, et la vie privée des adultes est compromise.

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Quelle est la réaction des autorités et l'avenir de la vérification ?

Face à cette situation, l'Arcom, le régulateur du secteur, semble pris entre deux feux. Contacté, il a indiqué analyser le rapport d'AI Forensics. Du côté des éditeurs de sites, certains admettent avoir implémenté ces solutions "en urgence" sous la pression du régulateur, conscients que le système n'était "pas idéal". Tous les regards se tournent désormais vers une future application européenne, promise pour l'été 2025 mais toujours pas disponible, qui devrait enfin proposer une méthode de vérification à la fois robuste et respectueuse du double anonymat imposé par la loi française.

Foire Aux Questions (FAQ)

Mes données sont-elles en danger si j'ai utilisé AgeGo ?

Oui, potentiellement. Des informations comme votre adresse IP, votre e-mail et une capture vidéo de votre visage ont été transmises à des serveurs tiers. Bien qu'il n'y ait pas de preuve d'exploitation malveillante à ce jour, ces données ont quitté le cadre sécurisé et anonyme qu'elles n'auraient jamais dû quitter.

Est-il facile de contourner cette vérification d'âge ?

Oui. L'utilisation d'un VPN ou d'un service DNS comme NextDNS permet de simuler une connexion depuis un autre pays et d'échapper complètement au système de vérification français. De plus, de nombreux sites pornographiques sans aucune vérification gagnent en popularité.

L'Arcom va-t-elle agir contre les nouveaux sites sans vérification ?

Le régulateur a indiqué qu'il ne pouvait agir que de manière progressive. Après avoir ciblé les 17 plus grosses plateformes, il devrait "dans un second temps" s'attaquer à ces nouveaux acteurs. Cependant, la localisation de ces sites, souvent à l'étranger (Chypre, Roumanie), complique considérablement les procédures.