Face à l'expansion des réseaux de satellites espions chinois et russes, l'US Space Force réplique. Elle déploie deux nouveaux systèmes de brouillage réversibles, Meadowlands et le RMT, pour compléter sa capacité existante.
L'objectif : créer une triade de contrôle spatial capable de perturber les liaisons ennemies sans générer de débris, une préoccupation importante dans un espace terrestre proche déjà saturé.
Le péril du "Kill Web" chinois
La principale motivation derrière cet effort est la croissance fulgurante de l'arsenal orbital de Pékin. Selon le rapport Space Threat Fact Sheet 2025 de la Space Force, l'Armée Populaire de Libération dispose désormais de plus de 510 satellites de renseignement, de surveillance et de reconnaissance (ISR).
Ce réseau dense, doté de capteurs optiques, radar et RF, forme un véritable "kill web" maritime capable de localiser et suivre les groupes aéronavals américains dans le Pacifique.
C'est une menace directe qui pousse le Pentagone à chercher des moyens de neutraliser cet avantage sans déclencher un conflit cinétique.
Une triade de brouillage réversible
La réponse américaine ne passe pas par la destruction, mais par le brouillage électronique. Le pilier de cette stratégie est le Counter Communications System (CCS), un brouilleur au sol transportable qui cible les communications géostationnaires. Il est désormais rejoint par deux nouveaux venus.
Le premier est le système Meadowlands, développé par L3Harris. Accepté au printemps 2025, il est décrit comme un "saut capacitaire". Plus mobile et rapide à déployer, il peut concentrer une énergie radiofréquence puissante pour bloquer les liaisons montantes (tâches des satellites) ou corrompre les liaisons descendantes (transmission des données).
Le second est le Remote Modular Terminal (RMT). Développé par Northstrat et CACI, le RMT est un système compact et distribué. Le Pentagone prévoit d'en acquérir 24 unités. L'idée est de les disséminer sur des bases avancées, voire chez des alliés, pour une action discrète et résiliente.
Commander la guerre électromagnétique
Ces trois systèmes (CCS, Meadowlands, RMT) ne sont pas isolés. Ils seront coordonnés à distance par un nouveau Centre des opérations tactiques électromagnétiques spatiales (ou Space Electromagnetic Tactical Operations Center).
Ce centre s'appuiera sur le réseau de renseignement Bounty Hunter, qui suit activement les interférences contre les satellites américains et alliés. L'objectif est clair : disposer d'options réversibles.
Comme l'a souligné le général Chance Saltzman, chef de la Space Force, les États-Unis doivent "considérer l'espace comme un domaine de combat". Ces outils permettent d'imposer un délai, de la confusion et de rompre la chaîne de ciblage adverse sans franchir le seuil de la destruction et sans polluer l'orbite avec des débris.
La nouvelle doctrine de supériorité spatiale
La doctrine de la Space Force définit la supériorité spatiale comme la capacité de garantir sa propre liberté d'action tout en la refusant à l'adversaire, souvent par des moyens non cinétiques. L'accent est mis sur la perturbation contrôlée et précise.
Le financement de ces systèmes, avec des modernisations du CCS avoisinant les 120 à 125 millions de dollars et l'acquisition prévue de 32 systèmes Meadowlands, montre un pivot stratégique. Il s'agit de contester l'espace sans escalade, en aveuglant l'adversaire bien avant que le premier missile ne soit tiré.