La téléportation n'appartient plus seulement à la science-fiction. Dans une avancée majeure publiée dans la revue Nature, des scientifiques de l'Université d'Oxford ont réussi à faire communiquer deux ordinateurs quantiques distants de deux mètres, non pas par des câbles, mais par la lumière.
Ils ont "téléporté" une opération logique d'une machine à l'autre, prouvant qu'il est possible de créer un supercalculateur quantique unifié à partir de modules séparés.
Qu'entend-on par téléportation quantique et quel en est le principe de fonctionnement ?
Oubliez Star Trek, aucune matière n'a été transportée. La téléportation quantique repose sur l'un des phénomènes les plus étranges de la physique : l'intrication. Lorsque deux particules, comme des photons (des particules de lumière), sont intriquées, elles forment un système unique. Toute action sur l'une affecte instantanément l'autre, quelle que soit la distance qui les sépare. C'est ce qu'Einstein appelait une « action fantôme à distance ».
Grâce à ce lien invisible, il est possible de transférer l'état quantique (l'information) d'un point A à un point B sans qu'aucune particule ne parcoure physiquement la distance. C'est un transfert d'information instantané et parfaitement sécurisé.
Comment l'expérience d'Oxford s'est-elle déroulée ?
Les chercheurs ont utilisé deux petits ordinateurs quantiques modulaires, surnommés « Alice » et « Bob ». Chacun contient des ions piégés qui servent de qubits (les bits quantiques). Pour les connecter, ils ont eu une idée : chaque module émet un photon. Ces deux photons sont dirigés vers un analyseur central qui les rend intriqués, établissant ainsi un « pont quantique » entre les deux appareils.
Après avoir établi ce lien, les chercheurs ont réussi à réaliser une opération de calcul fondamentale, appelée « porte logique », sur le premier ordinateur. Ils ont pu observer le résultat se manifester en temps réel sur le second avec un taux de fiabilité de 86 %. Par la suite, ils ont effectué plusieurs de ces opérations pour la première fois sur deux machines distinctes afin de mettre en place un algorithme quantique complet.
Pourquoi est-ce un progrès si crucial pour l'avenir de la technologie informatique ?
Cette expérience représente un jalon crucial dans l'avancement vers le calcul quantique distribué. Le principal obstacle en informatique quantique est la mise à l'échelle : il est très ardu de construire un unique processeur capable d'héberger des millions de qubits stables. La méthode modulaire, qui implique l'interconnexion de multiples microprocesseurs performants, est perçue comme l'option la plus pragmatique.
Cette expérience démontre que ce concept est réalisable en utilisant la technologie actuelle. À terme, cette approche pourrait ouvrir la voie à la construction de réseaux d'ordinateurs quantiques, établissant ainsi les fondations d'un futur Internet quantique. Ce réseau offrirait des communications inaltérables et une capacité de calcul partagée à une ampleur actuellement impensable.
Foire Aux Questions (FAQ)
A-t-on vraiment "téléporté" quelque chose de physique ?
Non. Aucune matière, aucun atome n'a été transporté. Ce qui a été "téléporté", c'est l'état quantique d'un qubit, c'est-à-dire l'information qu'il contient. C'est une copie parfaite de l'information qui est recréée à distance, pas l'objet lui-même.
Qu'est-ce que l'intrication quantique ?
C'est un phénomène où deux ou plusieurs particules quantiques sont liées de telle manière que leur état est interdépendant, quelle que soit la distance qui les sépare. Mesurer l'état d'une particule influence instantanément l'état de l'autre. C'est une des propriétés les plus fondamentales et les plus contre-intuitives de la mécanique quantique.
Quand aurons-nous un Internet quantique ?
Il reste encore de nombreux défis à relever pour passer de deux modules distants de deux mètres à un réseau mondial. Les ingénieurs doivent notamment améliorer la vitesse et la fiabilité de la création de l'intrication sur de longues distances. Cependant, cette expérience prouve que les briques fondamentales existent et fonctionnent. Un premier réseau à l'échelle d'une ville ou d'un pays pourrait voir le jour dans la prochaine décennie.