Au cœur des technologies modernes, de l'industrie automobile aux énergies renouvelables en passant par la défense, se trouvent les terres rares. Ces métaux, dont la production mondiale est très largement dominée par la Chine, sont devenus un enjeu géopolitique majeur.

Conscient de sa position de force, Pékin n'a pas hésité à utiliser cet atout comme levier de pression, imposant des restrictions à ses exportations en avril puis en octobre de cette année, provoquant l'inquiétude des industriels européens.

Une suspension partielle de ces mesures, négociée avec Washington, n'a que très peu rassuré Bruxelles, qui la juge "probablement très temporaire".

Un "racket" aux secrets industriels ?

La charge est venue directement de Strasbourg, lors d'un débat au Parlement européen. Le vice-président de la Commission européenne, Stéphane Séjourné, a employé des termes particulièrement forts pour dénoncer les pratiques de Pékin.

Selon le commissaire chargé de la Stratégie industrielle, la Chine ne se contente pas de contrôler les flux de ces minerais essentiels. Elle exigerait des entreprises étrangères désireuses de s'approvisionner des informations sensibles, relevant bien souvent de secrets industriels.

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Ces exigences, qualifiées sans ambages de "racket", placent les acteurs économiques européens dans une position intenable. Cette pression met en lumière la vulnérabilité de l'Union européenne et la nécessité d'agir vite pour sécuriser ses chaînes d'approvisionnement.

Le message de la Commission est clair : il est temps pour l'Europe de "muscler son jeu" et de redoubler d'efforts pour diminuer sa dépendance stratégique.

ResourceEU : le plan de bataille européen

La réponse européenne se structure autour d'un plan ambitieux qui sera officiellement présenté la semaine prochaine : ResourceEU. Stéphane Séjourné en a dévoilé les grandes lignes, dessinant une stratégie proactive pour garantir l'accès aux matières premières critiques.

L'une des pierres angulaires de ce dispositif sera la création d'un "centre européen des matières premières critiques". Cette nouvelle entité aura pour mission de réaliser des achats en commun et, surtout, de constituer des stocks stratégiques afin de pouvoir amortir les chocs d'approvisionnement.

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Cette approche centralisée vise à donner plus de poids à l'Union sur le marché mondial. Parallèlement, le plan mettra un accent particulier sur le développement de l'économie circulaire.

Des dispositifs spécifiques seront mis en place pour encourager et optimiser le recyclage des terres rares déjà présentes sur le sol européen, une ressource encore trop peu exploitée.

Vers une autonomie stratégique sous tension

L'initiative ResourceEU vient renforcer et accélérer des efforts déjà engagés par l'Union européenne, qui cherche depuis plusieurs années à diversifier ses sources mais doit désormais accélérer le mouvement.

Le développement de sa propre production minière, là où c'est possible, et la conclusion de partenariats stratégiques avec d'autres pays producteurs font partie de cette démarche de fond. L'objectif n'est pas une autarcie illusoire, mais une réduction significative de la dépendance à un seul acteur dominant.

La volonté de durcir le ton face à la Chine est désormais une priorité affichée au plus haut niveau de la Commission. Le succès de cette stratégie dépendra de la rapidité de sa mise en œuvre et de la cohésion des Vingt-Sept.

La présentation détaillée du plan ResourceEU la semaine prochaine sera donc scrutée de près, tant par les industriels européens que par les partenaires et rivaux internationaux de l'Union.