Tous en électrique en Europe dès 2035 ? Ce pari de l'Union européenne sur la fin du thermique dans une dizaine d'années semble de plus en plus mal engagé, du moins pour les constructeurs européens.
La transition est difficile, coûteuse et se joue face à une concurrence chinoise qui passe par des subventions et des aides d'Etat cachées pour casser les prix et s'imposer.
Mais avant même la menace de la Chine, le durcissement à venir des normes anti-pollution crispe les constructeurs automobiles face au risque d'amendes très lourdes s'ils n'atteignent pas les objectifs de réduction d'émissions de leurs véhicules.
Avec le CAFE, les constructeurs vont-ils boire la tasse ?
La nouvelle norme CAFE (Corporate Average Fuel Economy) qui doit être mise en place en 2025 va encore abaisser de 15% les seuils autorisés sur les véhicules neufs.
Il sera difficile ou impossible de tenir cette norme pour les véhicules thermiques et hybrides mais la valeur moyenne des émissions pouvait être compensées par les ventes de véhicules électriques purs ne produisant aucune émission.
Sauf que...le marché de l'électrique, après une croissance rapide au début des années 2020, tend à se tasser depuis le début de l'année 2024. Aux freins habituels du prix et de l'angoisse de la batterie à plat s'est ajouté celui de la réduction des aides à l'achat, voire à leur suppression comme en Allemagne, le plus gros marché automobile européen.
Faute de vendre suffisamment de véhicules électriques zéro émission pour compenser celles des véhicules thermiques et hybrides, certains constructeurs automobiles risquent de devoir payer de très lourdes pénalités.
La facture pour le secteur automobile européen pourrait ainsi atteindre 15 milliards d'euros, selon Luca de Meo, patron de Renault et président de l'ACEA (European Automobile Manufacturer's Association), organisation regroupant les constructeurs européens, à moins de réduire drastiquement la production de véhicules thermiques puisque les ventes de véhicules électriques sont dans l'impasse, ce qui reviendrait à se tirer une balle dans le pied.
Repousser les échéances, est-ce vraiment souhaitable ?
Le lobby des constructeurs cherche donc des solutions et va plaider à Bruxelles sa cause en demandant de repousser le durcissement des normes anti-pollution. L'échéance de 2035 pour la fin du thermique pourrait aussi être remise en question en essayant de la décaler à 2040, même si la Commission européenne s'est montrée plutôt ferme sur le maintien de cette date au regard de l'urgence climatique.
Invoquer l'article 122-1 du traité de l'Union européenne pour une prise de décision sans passer par le Parlement européen, sorte d'équivalent de l'article 49.3 de la Constitution française, serait à l'étude pour prendre des mesures rapidement.
Le journal Le Figaro note tout de même que les ONG environnementales s'apprêtent à faire de la résistance et que, même au sein des constructeurs automobiles, tous ne sont pas en phase avec les vues de l'ACEA.
Trouver le moyen de relancer les ventes de véhicules électriques, en poussant par exemple à l'électrification des flottes d'entreprise, resterait la meilleure option pour que tout ce petit monde s'y retrouve.