À l’heure où l’industrie automobile remet en cause l'échéance du tout électrique d'ici 2035, l’Union européenne se mobilise pour remettre sur les rails un segment longtemps négligé : celui des petites voitures électriques vraiment abordables et produites sur le territoire.

Face à l’invasion de véhicules chinois et au risque de voir les constructeurs automobiles européens fragilisés, Bruxelles veut poser les bases d’une stratégie visant à rendre la mobilité durable bien plus accessible, tout en confortant le tissu industriel européen. 

Vers une renaissance des petites électriques en Europe

Depuis l’automne 2024, l’UE impose des droits de douane relevés sur les voitures électriques venant de Chine, pendant cinq ans : une mesure phare pour corriger les distorsions de concurrence et protéger les constructeurs européens.

Et alors que le marché tend à s'orienter vers de grands SUV électriques reproduisant les travers du thermique et maintenant des prix élevés mais apportant un sentiment de sécurité aux consommateurs, l'idée de faire émerger de petits véhicules électriques plus en phase avec la transition énergétique reprend de la vigueur.

Le projet e-Car vise à relancer la production locale de petits modèles accessibles et adaptés aux usages urbains avec l'idée d'éviter la désertification industrielle et de permettre aux acteurs du Vieux Continent de reprendre l’initiative sur un marché où la bataille fait rage, particulièrement sur les véhicules d’entrée de gamme.

Un cadre réglementaire en pleine évolution

Les grands groupes européens tels que Renault ou Stellantis ont réclamé plus de souplesse : les normes actuelles, conçues pour des voitures lourdes et coûteuses, tassent la rentabilité des citadines électriques.

Ils espèrent un ajustement réglementaire qui faciliterait la viabilité économique de ces modèles. Dans les termes des dirigeants, il faudrait une “règle spéciale” ou une évolution du cadre, à l’image des kei cars japonaises.

Si ce n’est pas acté officiellement, Bruxelles opte néanmoins pour une simplification : meilleure cohérence des exigences, délais d’entrée en vigueur mieux calibrés et montée en puissance progressive du déploiement des infrastructures, notamment batteries et bornes de recharge.

La Commission européenne agit pour l’accessibilité

Le plan d’action automobile dévoilé par Bruxelles veut actionner différents leviers qui doivent rendre les voitures électriques plus accessibles : des dispositifs de “leasing social” sont prévus pour les ménages modestes, et le soutien à l’industrie du batteries se veut plus marqué, avec des critères de durabilité au cœur des aides publiques.

L’ambition vise à sécuriser toute la chaîne de valeur, tout en renforçant un environnement réglementaire encourageant l’innovation. La philosophie d’Ursula von der Leyen est claire : « Concilier décarbonation et compétitivité, en ajustant le tempo plutôt que la destination. »

Constructeurs et Bruxelles, un travail d’équipe

La réussite de cette offensive dépend d’un partage des responsabilités : aux constructeurs, de proposer des modèles efficaces, abordables et produits en Europe ; à Bruxelles, d’écrémer les surcouches réglementaires et d’assurer le développement de solutions énergétiques à coût maîtrisé.

Les professionnels espèrent que ces efforts permettront réellement l’émergence de la fameuse “e-car” à 15 000 €, rare sur le marché actuel et pas encore d'origine européenne.

Mais le défi est aussi commercial : il faudra éviter le contournement des droits par les investisseurs étrangers et garantir que la production génère de la valeur et du savoir-faire local.

Des enjeux stratégiques pour l’industrie européenne

En favorisant les petites voitures électriques fabriquées en Europe, Bruxelles espère rallumer la flamme industrielle tout en répondant aux bouleversements du marché mondial.

Pour les consommateurs, c’est la promesse d’un accès élargi à la mobilité électrique, via des citadines conçues non seulement pour la ville mais aussi pour une nouvelle approche du transport individuel.

Encore faudra-t-il que le public y soit réceptif. Si le tarif élevé des véhicules électriques peut être un frein, les caractéristiques techniques comptent aussi. Une autonomie trop faible, une charge lente et plus généralement une commodité contrainte sont autant de repoussoirs.

Il ne suffira donc pas de concevoir des voitures électriques peu chères pour séduire et il faudra bien accompagner la stratégie pour faire de l'e-Car un succès capable de compter pour la transition énergétique.