Une étude de l'Institut mobilités en transition (IMT) contredit l'industrie automobile. Prolonger la vente de véhicules hybrides rechargeables (PHEV) au-delà de 2035 pénaliserait le climat mais aussi le portefeuille des ménages, en particulier sur le marché de l'occasion.

Le décor est planté depuis juin 2022. L'Union européenne a acté la fin de la vente des voitures neuves émettant du CO2 à l'horizon 2035, imposant de fait le 100 % électrique.

Mais cette réglementation est loin d'être acceptée par tous les constructeurs automobiles européens. Ces derniers font pression sur Bruxelles pour obtenir un assouplissement, brandissant l'étendard de la neutralité technologique.

vehicule electrique recharge

Leur objectif : continuer à vendre des véhicules hybrides rechargeables (PHEV) et des véhicules électriques à prolongateur d’autonomie (EREV) bien après l'échéance.

Ils les présentent comme une transition plus douce, offrant plus de flexibilité aux usagers. La Commission européenne doit d'ailleurs rendre sa réponse sur ce sujet sensible le 10 décembre.

Le mythe de la "neutralité technologique" analysé

Est-ce vraiment une bonne idée ? C'est la question que s'est posée l'Institut mobilités en transition (IMT), un think tank de Sciences Po. Pour y voir clair, il s'est associé à des experts reconnus : le cabinet de conseil C-Ways et l'ONG berlinoise International Council on Clean Transportation (ICCT). Ce nom n'est pas anodin, c'est l'ICCT qui avait été à l'origine du scandale du dieselgate en 2015.

Cette alliance a produit une étude d'impact approfondie, celle que les constructeurs reprochaient justement à l'exécutif européen de ne pas avoir faite. L'analyse se base sur plus de 1000 simulations, croisant des profils d'usage réels, différents segments de véhicules et types de motorisation.

Un surcoût pour les ménages modestes

Les conclusions de l'étude sont sans appel. Maintenir les hybrides rechargeables ne serait favorable ni pour le climat, ni pour le budget des ménages. L'étude de l'IMT montre que cette option coûterait plus cher aux usagers, et ce, de manière aggravée sur le marché de l'occasion.

Bornes recharge 01

Le TCO (coût total de possession) d'un hybride rechargeable s'avère supérieur à celui d'un véhicule électrique, et l'écart se creuse fortement en seconde et troisième main.

Ce sont donc les ménages les plus modestes, qui achètent majoritairement des véhicules anciens, qui seraient les grands perdants de ce scénario. L'étude met en lumière un écart de coût d'utilisation qui s'aggrave avec l'âge du véhicule, pénalisant ceux en fin de cycle.

Climat et souveraineté : les autres perdants

Au-delà du portefeuille, l'impact climatique est également pointé du doigt. Les performances réelles des PHEV, qui n'existent pas encore sur le marché européen dans leurs versions "longue autonomie" promises, restent très incertaines.

L'étude estime que leur autorisation prolongée conduirait à émettre "bien davantage de gaz à effet de serre" que la trajectoire 100 % électrique.

Enfin, l'IMT souligne qu'un tel choix pèserait défavorablement sur la balance commerciale de l'Europe et sa souveraineté. L'étude, qui a beaucoup intéressé la Commission, arrive à point nommé pour "objectiver un débat de plus en plus politique", comme le résume Jean-Philippe Hermine, directeur général de l'IMT. Reste à voir quel poids elle aura dans la décision finale de Bruxelles.