Le consensus autour de la transition vers le tout-électrique en Europe est en train de voler en éclats. Antonio Filosa, le nouveau directeur général de Stellantis (Peugeot, Fiat, Jeep), a rejoint ses homologues de BMW et Mercedes-Benz dans une critique ouverte et frontale de l'échéance de 2035.
Pour ces géants de l'industrie, le calendrier imposé par l'Union européenne n'est tout simplement pas tenable face aux réalités du marché, une position qui annonce des négociations tendues avec la Commission européenne.
Pourquoi les constructeurs montent-ils au créneau maintenant ?
La fronde des constructeurs automobiles s'explique par une conjoncture difficile. Le ralentissement des ventes de voitures électriques, la montée en puissance des marques chinoises très agressives et une rentabilité sous pression créent un cocktail explosif. Les déclarations sont sans ambiguïté :
- Pour Antonio Filosa (Stellantis), les objectifs de 2030 et 2035 "ne sont pas réalistes tels que définis".
- Ola Källenius (Mercedes-Benz) a qualifié l'échéance de 2035 d'"inatteignable".
- BMW va encore plus loin en proposant de repousser l'interdiction à 2050.
Cette offensive coordonnée vise à alerter sur le risque d'un "déclin rapide de l'industrie automobile européenne" si la trajectoire n'est pas assouplie.
Quelles sont les "flexibilités" demandées par l'industrie ?
Loin de rejeter en bloc la décarbonation, les industriels réclament des aménagements pour éviter une transition trop brutale.
Antonio Filosa a détaillé plusieurs pistes pour "enrayer le cercle vicieux" de la baisse des ventes. Il propose notamment de "verdir" le parc existant avec des primes à la casse, d'instaurer des "supercrédits CO2" pour les petites voitures électriques afin d'encourager leur production, et de mieux valoriser les véhicules hybrides.
L'idée est de redynamiser un marché automobile en souffrance pour rendre les véhicules plus abordables, notamment les utilitaires, un segment particulièrement en difficulté.
Quelle est la position de la Commission européenne ?
La pression est désormais maximale sur Bruxelles. L'interdiction des moteurs thermiques en 2035 est une mesure phare du Pacte vert européen, actée en mars 2023.
Cependant, le texte inclut une "clause de revoyure" cruciale fixée à 2026. Ce rendez-vous, qui devait être une simple formalité, est désormais au centre de toutes les attentions. Il servira à faire un premier bilan et, potentiellement, à ajuster le tir.
La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, doit d'ailleurs entamer un "dialogue stratégique" avec le secteur, signe que la porte n'est pas totalement fermée à des aménagements.
Foire Aux Questions (FAQ)
L'interdiction de 2035 est-elle déjà gravée dans le marbre ?
Non, pas entièrement. Si la loi a été votée, la "clause de revoyure" prévue en 2026 permettra de réévaluer la situation en fonction des avancées technologiques et des réalités du marché. La pression actuelle des constructeurs rend cette clause plus importante que jamais.
Pourquoi les voitures hybrides sont-elles aussi concernées par l'interdiction ?
La réglementation européenne vise la fin des ventes de véhicules neufs émettant du CO2 à l'échappement. Cela inclut donc les voitures à essence, diesel, mais aussi toutes les formes d'hybrides (légères, "full" et rechargeables) puisqu'elles embarquent un moteur thermique.
Les constructeurs veulent-ils abandonner la voiture électrique ?
Non, ils affirment soutenir l'orientation vers l'électrification et y ont massivement investi. Ce qu'ils remettent en cause, c'est "le rythme et la rigidité" du calendrier imposé, qu'ils jugent déconnecté des capacités d'absorption du marché et de la compétitivité de l'industrie européenne.