À San Bruno, en Californie, une voiture autonome Waymo a été interceptée par la police pour un demi-tour interdit. Face à l'absence de conducteur humain, les agents n'ont pu émettre de contravention, révélant un vide juridique que la législation peine à combler. Cet événement soulève des questions cruciales sur la responsabilité des intelligences artificielles sur la route.

La scène s'est déroulée lors d'une opération de contrôle routier à San Bruno, au sud de San Francisco. Des officiers de police ont été témoins d'une manœuvre pour le moins audacieuse : un véhicule, identifiable comme un robotaxi de la société Waymo, a effectué un demi-tour illégal à un feu de signalisation.

Procédant à l'interception, les agents ont fait une découverte déconcertante : l'habitacle était vide. Pas de conducteur à interpeller, pas de responsable à qui adresser des remontrances. Juste une machine obéissant à ses propres algorithmes.

Le carnet à souches face au vide juridique

L'embarras des forces de l'ordre a été total. Comme l'a expliqué le département de police de San Bruno dans une publication, le problème est avant tout administratif. « Étant donné qu’il n’y avait pas de conducteur humain, une contravention n’a pas pu être émise », précisant avec une pointe d'ironie que leurs « carnets de contraventions n’ont pas de case 'robot' ».

Waymo voiture autonome amende San Bruno

Credit : San Bruno Police Department

Cette situation, décrite comme une "première" pour le service, met en lumière un vide juridique béant. Les agents ont dû se contenter de contacter Waymo pour signaler le "bug", espérant qu'une reprogrammation future éviterait la récidive.

Waymo, entre promesses et incidents répétés

Filiale d'Alphabet (Google), Waymo est à la pointe de la technologie de la conduite autonome depuis son lancement en 2009. En réponse à l'incident, l'entreprise a assuré que son système était "conçu pour respecter le Code de la route" et qu'elle examinait la situation pour améliorer la sécurité routière.

Waymo Jaguar.

Pourtant, cet événement n'est pas un cas isolé. L'entreprise a déjà dû faire face à un rappel de ses véhicules pour un problème logiciel et fait l'objet d'une enquête de la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA) suite à 22 signalements de comportements erratiques ou d'infractions potentielles. Ces Jaguars blanches bardées de capteurs, malgré leur sophistication, ne sont pas infaillibles.

Une législation qui tente de rattraper son retard

Face à la multiplication des incidents impliquant des véhicules autonomes, bloquant la circulation ou interférant avec les services d'urgence, les législateurs californiens ont commencé à réagir. Une loi, portée par le député Phil Ting et signée par le gouverneur Gavin Newsom, a été adoptée pour renforcer le cadre réglementaire. Elle autorisera notamment la police à émettre des "avis de non-conformité" directement aux entreprises et exigera la mise en place d'une ligne d'urgence pour les premiers intervenants. Le hic ? Cette législation n'entrera en vigueur qu'en juillet 2026, laissant près de deux ans de flou juridique.

Cet événement de San Bruno, loin d'être anecdotique, agit comme un puissant révélateur des défis posés par l'autonomisation des transports. Il illustre la course engagée entre l'innovation technologique et l'adaptation des cadres légaux. Alors que les robotaxis continuent de se déployer, la question de la responsabilité en cas d'infraction reste entière, et l'échéance de 2026 paraît soudain bien lointaine pour encadrer une technologie déjà bien présente sur nos routes.