Selon le rapport Urvoas remis en décembre dernier, la France serait très fragile du point de vue de l'espionnage économique et industriel. Des informations sensibles sortiraient trop souvent dans la presse, faisant le bonheur de la concurrence tandis qu'à l'inverse le pays manquerait de méthodes pour obtenir des informations cruciales des entreprises étrangères.

Bercy  Le document affirmait ainsi que "la France est victime d'un pillage économique" qui nuit à la compétitivité de ses entreprises, dont les initiatives sont trop souvent dévoilées à l'avance. Il appelait donc le gouvernement à prendre des mesures pour préserver dans une certaine mesure "le secret des affaires".

Le ministre de l'Economie Emmanuel Macron a donc cherché à intégrer ce secret des affaires dans un projet de loi, mettant en avant la lutte contre l'espionnage économique.

Mais en proposant une définition floue qui laisserait matière à interprétation par la justice et en le présentant sous forme d'amendement au sein du projet de loi Macron sans concertation préalable, les médias se sont sentis menacés et ont fait pression pour obtenir son abandon.

Même si le ministre a affirmé à plusieurs reprises jusque sur Twitter que le texte ne visait directement pas les journalistes, ces derniers se sont sentis très concernés à l'idée de ne plus pouvoir évoquer les scandales et affaires diverses du monde économique sans risquer de tomber sous les sanctions du "secret des affaires" : jusqu'à trois ans de prison et 375 000 € d'amende.

Où s'arrête l'information légitime du public, où commence la diffusion d'informations alimentant l'espionnage industriel ? Faute d'une définition claire (mais existe-t-elle ?), de nombreux médias ont mis en garde contre un risque de "dérives liberticides", valable aussi pour les lanceurs d'alerte, sans lesquels les scandales économiques ne pourraient être mis au jour.

Selon le journal Le Monde, les articles relatifs au secret des affaires vont finalement être retirés du projet de loi Macron. Si le gouvernement veut prendre des mesures contre l'espionnage industriel, il devra sans doute repenser son action ultérieurement.

Source : Le Monde