Depuis plusieurs trimestres, les opérateurs européens demandent des réformes de la réglementation du marché des télécoms et la possibilité de se regrouper, sans quoi des opérateurs télécom étrangers (US et chinois, principalement) finiront par les racheter un à un.

Logo AT&T pro  De fait, l'opérateur US AT&T ne cachait pas son envie de racheter un opérateur mobile européen ou de prendre une participation dans l'un des plus gros acteurs du secteur, et les observateurs suggèrent que le britannique Vodafone pourrait être une cible.

Mais maintenant que les révélations concernant les écoutes des communications par la NSA se concentrent sur l'espionnage des flux dans plusieurs pays européens, et que des versions contradictoires circulent, Europe et Etats-Unis s'accusant mutuellement de piétiner la vie privée des citoyens européens, les obstacles risquent de s'accumuler rapidement.

Au-delà du risque naturel de voir une acquisition menée en Europe par AT&T échouer sur la crainte de voir émerger un acteur monopolistique écrasant tout sur son passage, ce dont l'opérateur a déjà fait les frais sur son marché en tentant de racheter T-Mobile USA pour 39 milliards de dollars (et qui peut expliquer son envie d'expansion en Europe), c'est aussi la différence de vues entre le Nouveau et le Vieux Continent sur la nature des données personnelles qui pourrait finir par devenir une question épineuse capable de faire capoter une proposition.

Là où les Etats-Unis souhaiteraient plus de libertés sur des données personnelles considérées comme des éléments commerciaux, l'Europe leur a donné un statut spécifique et protégé dans une certaine mesure des exploitations commerciales avec le principe du "privacy by design", à savoir le développement de solutions et logiciels en prenant compte dès la conception des questions de sécurisation des données personnelles.

Les deux continents n'étaient déjà pas d'accord sur ce point et la révélation des écoutes de la NSA, et alors que AT&T a été présenté dans les documents produits par Edward Snowden comme un participant actif de ces collectes, ne fait qu'accentuer la dissension. Au-delà des divergences sur l'accès légal aux données personnelles, qu'en serait-il en plus sur celui plus discret demandé par les services de renseignement américain, pourraient se demander les responsables politiques européens.

Les révélations sur la NSA ne pouvaient pas arriver à un plus mauvais moment pour un accord télécom transatlantique, relève un responsable de banque d'affaires interrogé par The Wall Street Journal. De quoi faire les affaires d'acteurs issus d'autres zones géographiques et tout aussi intéressés pour racheter des opérateurs télécom européens ?