Cinq ans après le début de l'affaire Fortnite, le combat des titans entre Apple et Epic Games est loin d'être terminé. La saga judiciaire, qui a déjà connu de multiples rebondissements, vient d'entrer dans un nouveau chapitre décisif.

Ce mardi, Apple était de retour devant la cour d'appel fédérale pour tenter d'invalider une décision qui l'accuse d'avoir délibérément bafoué un premier jugement et qui menace de faire s'écrouler le juteux modèle économique de l'App Store.

Pourquoi Apple est-il de nouveau devant les juges ?

C'est l'histoire d'une victoire au goût amer pour Epic Games, et d'une manœuvre audacieuse d'Apple qui s'est retournée contre elle. En 2021, la juge Yvonne Gonzalez Rogers avait certes blanchi Apple des accusations de monopole, mais avait condamné la firme pour violation de la loi californienne sur la concurrence. Elle avait alors ordonné à Apple de cesser d'interdire aux développeurs d'insérer des liens vers des systèmes de paiement externes.



La réponse d'Apple ? Autoriser les liens, mais imposer une nouvelle commission de 27 % sur toutes les transactions effectuées via ces derniers. Une pirouette jugée "anticoncurrentielle" par la juge Rogers, qui a estimé en avril dernier qu'Apple avait "volontairement défié" son injonction. Cette décision d'outrage au tribunal, assortie d'une interdiction de prélever ladite commission, est au cœur du nouvel appel d'Apple.

Quels sont les arguments des deux camps ?

Devant la cour d'appel, les avocats d'Apple ont plaidé la bonne foi, arguant que l'injonction initiale de 2021 ne mentionnait rien sur les commissions. Pour eux, la juge a outrepassé ses droits en imposant une "règle de commission zéro" qui s'apparente à une sanction financière de plusieurs milliards de dollars. "Apple n'a rien essayé de cacher", a martelé son avocat.



Un argument qui n'a pas semblé convaincre les juges. "Elle [la juge Rogers] a pensé que vous aviez essayé de cacher quelque chose", a rétorqué l'un d'eux. Pour Epic Games, la position est claire : la solution d'Apple n'est qu'un subterfuge pour maintenir ses barrières anticoncurrentielles et la firme a "induit la cour en erreur".

Le combat est-il uniquement américain ?

Ce bras de fer judiciaire n'est pas limité aux États-Unis et illustre la pression mondiale qui s'exerce sur le modèle économique de l'App Store. Parallèlement à la procédure américaine, un autre front s'est ouvert en Australie. Là-bas, la cour fédérale a également jugé que les règles d'Apple étaient anticoncurrentielles. Epic Games y demande désormais non seulement l'autorisation des paiements alternatifs, mais aussi le "sideloading" (l'installation d'applications en dehors de l'App Store), le tout sans aucune commission pour Apple.



Entre la législation européenne du DMA et ces batailles judiciaires sur plusieurs continents, l'étau se resserre autour de la forteresse dorée qu'Apple a construite autour de son écosystème.

Foire Aux Questions (FAQ)

Quel a été le point de départ de cette affaire ?

Le conflit a débuté en août 2020 lorsque Epic Games a introduit un système de paiement direct dans son jeu Fortnite pour contourner la commission de 30 % d'Apple. En représailles, Apple a banni Fortnite de l'App Store, déclenchant la bataille juridique qui dure depuis.

Apple a-t-il été renvoyé devant le procureur ?

Oui. En plus de sa décision sur le fond en avril, la juge Yvonne Gonzalez Rogers a transmis le dossier aux procureurs fédéraux pour une éventuelle enquête pénale, estimant qu'Apple avait "volontairement" violé son injonction, ce qui est une accusation extrêmement grave.

Quelle est la prochaine étape ?

La cour d'appel du 9ème circuit va devoir rendre sa décision. Elle peut soit confirmer la décision d'outrage de la juge Rogers, ce qui serait un coup très dur pour Apple, soit l'annuler, ce qui relancerait le débat sur le fond. Dans tous les cas, le combat est loin d'être terminé et pourrait de nouveau remonter jusqu'à la Cour Suprême.